samedi 31 décembre 2011

Prix de Littérature 2011 du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Le Prix de Littérature 2011 du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles vient d'être attribué à l'auteur belge Jean-Baptiste Baronian pour sa biographie de Rimbaud. Né en 1942 à Anvers, il est membre de l'Académie Royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique. Jean-Baptiste Baronian en a parlé au groupe "Vers l'Avenir" :

"Quelle a été votre démarche pour cette biographie de Rimbaud?

- Cette biographie de Rimbaud, ainsi que celles de Baudelaire et de Verlaine écrites auparavant, étaient des commandes. Ma démarche a été d'essayer d'innover par rapport à ce qui existait déjà. Pas évident. Mon parti pris a été de me mettre dans la peau de Rimbaud et d'écrire sa vie comme le ferait un romancier. J'ai créé un climat romanesque mais en respectant la réalité. Par exemple, pendant que Rimbaud est en Ethiopie, Verlaine, à Paris, se démène pour qu'on reconnaisse ses oeuvres. Mais je n'en parle pas, car Rimbaud ne le sait pas. J'ai aussi utilisé beaucoup de guides d'époque pour décrire les lieux où il a vécu.

- Baudelaine, Verlaine, Rimbaud : on sent que vous avez des affinités avec ces trois poètes?

- Exact et çà m'a fait réellement plaisir qu'on me demande d'écrire la biographie de chacun d'eux car je ne suis pas connu pour cette affinité. J'ai une étiquette fantastique ou policière sur le dos.

- Dans la foulée, vous sortez également une édition de poèmes de Verlaine illustrée?

- C'est dans la continuité. Les biographies ont rencontré un bon accueil et dans la foulée on m'a proposé la réalisation de cet album. J'ai choisi 100 poèmes illustrés par une série de tableaux. A nouveau, j'ai veillé à ce que ce soient des peintres contemporains de cette époque. J'ai beaucoup aimé faire ce travail. C'est un autre aspect de ma personnalité, un certain éclectisme. Je ne pense pas que la culture puisse ne pas l'être.

- On sent que vous admirez particulièrement Verlaine?

- C'est celui qui me plaît le plus. Pour moi, c'est le plus grand des trois. Derrière une certaine accessibilité, il dissimule une poésie très complexe, une pure musicalité et une grande profondeur. Il parle des instants de la vie, de la joie, de la tristesse avec une force et une puissance inégalée et inégalable. C'est fascinant parce que, en même temps, c'est un voyou, un lâche, un ivrogne. Il est même laid. Il a quasi tous les défauts.

- Pour revenir à Rimbaud, vous n'en avez pas fini avec lui?

- Je supervise actuellement un dictionnaire Rimbaud qui doit paraître dans le courant de 2013 dans la collection Bouquins chez Robert Laffont. J'y travaille avec une trentaine de collaborateurs.

- Et côté biographie, un autre rêve?

- J'aimerais beaucoup écrire des bios de musiciens. Des hommes comme Ravel ou Debussy. Mais pour l'instant, le temps manque. Un jour peut-être..."

mercredi 21 décembre 2011

Le nouveau Musée des Lettres et Manuscrits à Bruxelles

Au coeur de Bruxelles, dans la célèbre Galerie du Roi, la princesse Léa de Belgique a inauguré en 2011 un nouveau musée : le Musée des Lettres et Manuscrits. A l'heure où les correspondances privées sur papier ont pratiquement disparu au profit des mails, le goût des collectionneurs pour les choses écrites ne fait qu'augmenter. Lettres autographes et manuscrits deviennent rares et leur valeur fait l'objet de spéculation. Quelques exemples concrets : un lot de 136 lettres inédites d'Hergé avec des dessins et croquis a été vendu 90.000 euros en 2008 ; la vente du manuscrit du "Manifeste du surréalisme" d'André Breton a atteint 3,6 millions d'euros en 2008 ; Sotheby's a vendu des écrits de Rimbaud, Verlaine, Mallarmé, Oscar Wilde ou Gide pour 1,5 million d'euros... Pour les passionnés, posséder une lettre, un autographe, un manuscrit ancien de la main de personnages célèbres, c'est pénétrer dans les coulisses de la création et de la vie d'un être qu'ils admirent ou qui les fascinent. Gérard Lhéritier est l'un d'entre eux : il a accumulé plusieurs milliers de documents en une vingtaine d'années et a créé en 2010 le Musée des Lettres et Manuscrits à Paris.

Un an plus tard, c'est au tour de la capitale belge d'avoir son Musée des Lettres et Manuscrits (www.mlmb.be) au numéro 3 de la Galerie du Roi, non loin de la grand-place. Il présente 600 documents (lettres autographes, manuscrits, tapuscrits, dessins, photos inédites) d'hommes illustres, écrivains, scientifiques, artistes ou hommes d'Etat. S'y côtoient pêle-mêle Charles Quint, Louis XIV, de Gaulle, Eisenhower, Léopold Ier, Casanova, Beckett, Vian, Hemingway, Voltaire, Dickens, Vésale, Marie Curie, Einstein, Dali, Renoir, Sisley, Delacroix, Van Gogh, Magritte, Mozart, Beethoven, Chopin parmi les plus connus.

Le rez-de-chaussée du musée présente actuellement une exposition temporaire sur Georges Simenon. D'autres personnalités belges sont présentées à l'étage : André Baillon, Georges Eeckhoud, Max Elskamp, Achille Chavée, Hergé, Hugo Claus, Emile Verhaeren, Charles Van Lerberghe, Maurice Maeterlinck, René Magritte, James Ensor, Félicien Rops, Ernest Solvay, Jacques Brel, Pierre Alechinsky, etc.

Le catalogue de la collection permanente (336 pages) offre un bon complément à la visite du musée. Publié par les éditions Racines, ce beau livre réunit 120 lettres, manuscrits et dessins sélectionnés et commentés par les équipes du Musée des Lettres et Manuscrits. Autant d'informations originales qui apportent un éclairage nouveau sur notre histoire et les hommes qui l'ont façonnée.

samedi 17 décembre 2011

Interview de l'écrivain Philippe Desterbecq

En mars 2009, je vous avais parlé de la sortie du premier livre de l'auteur belge Philippe Desterbecq (http://ecrivainsbelges.blogspot.com/2009/03/premier-livre-de-philippe-desterbecq.html) qui vient de répondre par mail à mes questions :

"Deux ans et demi après cet article, quel bilan tirez-vous de la parution de votre premier livre, "Nouvelles et textes de moi"?

- Cette première expérience m'a ouvert quelques portes, m'a permis de connaître un peu le monde de l'édition, de faire mes armes, je dirais. C'est une expérience inoubliable, un rêve qui s'est réalisé. Toutefois, je regrette la manière dont çà s'est passé et je ne conseille à personne de publier un bouquin à compte d'auteur ou à compte mixte (comme moi). Une fois l'argent reçu, la maison d'édition laisse tomber l'auteur qui doit se débrouiller par lui-même.

- Pourquoi avez-vous ensuite rejoint les éditions Chloé des Lys?

- J'ai entendu parler de Chloé des Lys par une auteure qui quittait les éditions Elzévir et était très contente de sa nouvelle maison d'édition. J'avais, dans un tiroir, un conte que j'ai écrit il y a bien longtemps et qui n'avait pas trouvé d'éditeur à l'époque. J'ai voulu tenter ma chance une fois encore et j'ai envoyé mon manuscrit chez Chloé des Lys. Neuf mois plus tard, j'ai reçu un avis favorable du comité de lecture. Quelques mois encore ont passé, j'ai rencontré Laurent Dumortier, le big boss des éditions Chloé des Lys, et j'ai signé mon contrat. Cette fois, je n'avais rien à payer mais je devais m'investir pour la "création" du bouquin. Tout s'est très bien passé.

- Présentez-nous votre deuxième livre qui est sorti en 2011 : "L'étoile magique".

- "L'étoile magique" a, à la base, été écrit pour les élèves de ma classe, c'est-à-dire pour des enfants d'une dizaine d'années. C'est un conte moderne (pas de fées ou de sorcières) qui, à mon plus grand étonnement, plait aussi aux adultes. C'est l'histoire d'un petit garçon, fou d'astronomie, qui découvre, un jour, une étoile bizarre dans le ciel. Elle a sept branches et brille d'un éclat particulier. Au même moment, il voit une étoile filante. La tradition veut qu'un voeu se réalise s'il est fait lors de l'apparition d'une météorite. Pierrot fait donc un voeu qui, à son plus grand étonnement, se réalise. C'est le début d'aventures extraordinaires que mon héros ne maitrisera pas totalement. J'ai voulu, dans ce conte, montrer qu'on ne peut pas toujours s'amuser au détriment d'autrui, que l'on doit parfois réparer ce qu'on a détruit et que, finalement, c'est le coeur qui gagne. Je n'en dis pas trop ; je ne veux pas dévoiler l'enchainement des faits. Contrairement à mes nouvelles pour adultes, ce conte se termine bien.

- Quels sont vos projets?

- Un autre rêve trotte dans ma tête. Il n'est malheureusement pas encore au stade de projet car je ne sais pas comment faire pour qu'il se réalise. Je ne sais pas à qui m'adresser et ne connais pas les démarches à entreprendre. Je voudrais que "L'étoile magique" devienne un film ou un dessin animé. Je peux paraitre ambitieux mais je trouve que cette histoire est très visuelle et je verrais très bien Pierrot et ses copains devenir les personnages d'un film. Autrement, j'ai un troisième manuscrit qui est prêt à être envoyé chez Chloé des Lys ou ailleurs. Je vais bientôt m'en occuper. Il s'agit d'une version longue de la dernière nouvelle de mon recueil. Elle s'intitule "Et si ce n'était qu'un rêve...". Si tout va bien, ce nouveau roman pourrait sortir dans...2 ans (eh oui, il faut du temps et de la patience!)".

vendredi 9 décembre 2011

Remise des Prix Rossel 2011

Les Prix Rossel 2011 ont été remis cette semaine dans le cadre prestigieux du palais des Académies à Bruxelles, en présence de l'écrivain français Bernard Pivot (très connu pour son émission littéraire "Apostrophes"), du secrétaire perpétuel de l'Académie Royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique Jacques De Decker, de la commissaire de la Foire du Livre de Bruxelles Ana Garcia, de nombreux auteurs et éditeurs.

Le Prix Rossel des Jeunes 2011 (d'une valeur de 1.250 euros) a été attribué par un jury de rhétoriciens à Lydia Flem pour "La reine Alice" (éditions Le Seuil). Elle y raconte l'histoire d'une femme atteinte du cancer que l'imagination aide à tenir debout. Inspirée par l'héroïne de Lewis Carroll, elle devient Alice aux turbans avec les premières chimios. Lydia Flem n'élude rien des difficultés (perte des cheveux, douleurs, angoisses, traitements, p.ex.) mais parvient à transformer la douleur en beauté et douceur.

Le 69ème Prix Rossel (d'une valeur de 5.000 euros) a été remis par un jury de professionnels à Geneviève Damas pour son premier roman "Si tu passes la rivière" (éditions Luce Wilquin). Il raconte l'histoire de François, 17 ans, qui ne connaît du monde que la violence. On le suit dans ses démêlés familiaux et judiciaires. Plusieurs personnes vont l'aider à "passer la rivière", à se regarder en face, à comprendre, à vivre, à avancer... Ce Prix Rossel 2011 est également une belle récompense pour l'éditrice belge Luce Wilquin dont je vous ai parlé il y a quelques semaines et qui fêtera les 20 ans de sa maison d'édition en 2012.

mercredi 30 novembre 2011

Les finalistes du prix Rossel 2011

Décerné depuis 1938, le Prix Rossel est la plus importante récompense que peut obtenir un auteur belge francophone (on le surnomme d'ailleurs souvent le "Goncourt belge"). Le jury est composé d'anciens lauréats (comme Pierre Mertens, Michel Lambert, Ariane Le Fort et Thomas Gunzig), de deux libraires représentant le Syndicat des libraires francophones de Belgique et de Jean-Claude Vantroyen, ancien chef du service Culture du journal "Le Soir". Le Prix Rossel des Jeunes existe depuis 2001 et son jury est composé de rhétoriciens issus d'écoles de la communauté française.

Les cinq nominés du Prix Rossel 2011 sont : "Les eaux amères" d'Armel Job (éditions Laffont), "La séduction des hommes tristes" de Françoise Lalande (éditions Luce Wilquin), "L'atelier de la chair" de Emmanuelle Pol (éditions Finitude), "Kosaburo 1945" de Nicole Roland (éditions Actes Sud) et "Si tu passes la rivière" de Geneviève Damas (éditions Luce Wilquin).

Les cinq nominés du Prix Rossel des Jeunes 2011 sont : "Karen et moi" de Nathalie Skowronek (éditions Arléa), "La reine Alice" de Lydia Flem (éditions Seuil), "Cheyenn" de François Emmanuel (éditions Seuil), "Si tu passes la rivière" de Geneviève Damas (éditions Luce Wilquin) et "Kosaburo 1945" de Nicole Roland (éditions Actes Sud).

Verdict le 7 décembre prochain...

mardi 22 novembre 2011

L'auteur belge Carine-Laure Desguin

La lecture de "Vieillir sans toi" de Michel Cyprien en 2007 redonne l'envie d'écrire à Carine-Laure Desguin, une infirmière à domicile de la région de Charleroi ("L'écriture, c'est chez moi comme des vents qui déboulent et qui soufflent tellement fort que rien ne leur résiste", a-t-elle un jour répondu en interview). Elle écrit "Rue Baraka", un roman qui raconte la rencontre entre Tarek, déconnecté de la vie et des autres ayant un regard désabusé sur tout, un vieux peintre au regard enfantin et sa compagne Clara. Le manuscrit est accepté par les éditions Chloé des Lys. Afin de commencer à se faire connaître, Carine-Laure crée son blog en 2009 : http://carinelauredesguin.over-blog.com . Son premier roman sort l'année suivante.

En juin 2010, elle accepte de répondre à mes questions : http://carinelauredesguin.over-blog.com/article-un-amoureux-des-auteurs-belges-de-la-belgique-et-51672960.html

Un an et demi après cette interview, Carine-Laure poursuit son parcours littéraire. Son prochain ouvrage sera "Les enfants du Grand Jardin", un conte surréaliste. Entretemps, elle participe à des concours et a eu plusieurs récompenses (3ème prix du concours de poésie des Mutualités Socialistes de Charleroi pour son poème "L'arrivée", 2ème prix du concours de textes érotiques du cercle littéraire montois Clair de Luth pour son texte "Sans jamais rien se dire", 1er prix du concours de poésie moderne de Prom-Auteur pour son poème "Les éclectiques libertés", etc.).

mercredi 16 novembre 2011

9ème Foire du Livre Belge

La 9ème Foire du Livre Belge se tiendra ce vendredi 18, samedi 19 et dimanche 20 novembre 2011 au centre culturel d'Uccle. L'inauguration officielle aura lieu vendredi à 18h30 par le bourgmestre d'Uccle Armand De Decker et le ministre bruxellois Emir Kir, suivie d'une présentation des prix littéraires de l'année (André Goosse, Yvon Toussaint, Myriam Watthee, Vincent Engel, Thibaut Bertrand, Geneviève Damas, Mathieu Barthelemy et Corinne Hoex). Samedi et dimanche, la foire sera ouverte de 10h à 18h (entrée libre). De nombreuses interviews d'auteurs belges auront lieu, précédées ou suivies de séances de dédicaces (horaire complet : www.ccu.be). Il y aura aussi plusieurs débats, dont "De la BD au cinéma, un rêve prolongé?" avec notamment Jean Van Hamme et le fils de Peyo samedi à 15h, et un débat autour de Maurice Maeterlinck (Prix Nobel de littérature 1911) avec Jacques De Decker et Jacques Franck dimanche à 15h30.

jeudi 10 novembre 2011

Tournai La Page 2011

Le salon Tournai La Page 2011 aura lieu ces samedi 12 et dimanche 13 novembre 2011 à la Halle aux Draps sur la grand-place de Tournai. Le thème de cette année est le livre au féminin. Je n'ai pas trouvé d'horaire et de liste d'auteurs présents en séance de dédicace (ce qui est une erreur de communication, selon moi...). Plusieurs animations sont prévues : présentation d'un ouvrage d'Antoine Depage (samedi à 11h), séance de lecture autour de Marguerite Yourcenar (samedi à 15h30 et à 16h45), table ronde autour de Geneviève Bergé, Anina Danton, Julie Douard et Myriam Montoya (samedi à 17h15), table ronde autour de Françoise Houdart, Frédérique Maloy et Evelyne Wilwerth (dimanche à 10h), un café des poètes en hommage à Andrée Chedid (dimanche à 15h30), table ronde autour de Chantal Deltenre, Caroline De Mulder, Françoise Noiville et Michèle Vilet (dimanche à 16h30), remise des prix (dimanche à 18h).

mardi 1 novembre 2011

Le parcours littéraire de Geneviève Bergé

Dans le dernier numéro de la revue "Le Carnet et les Instants", Geneviève Bergé retrace son parcours littéraire. Après avoir été rédactrice en chef pendant plusieurs années de la revue "Indications", elle écrit son premier roman au début des années 90 :

"A Indications, nous étions attentifs à la diversité de ce qui se publiait ; on ne s'intéressait pas qu'aux maisons qui avaient pignon sur rue. De plus, à l'époque, je lisais beaucoup de poésie, ce qui m'a permis aussi d'apprendre à connaître des maisons d'édition plus confidentielles. J'étais suffisamment en contact avec les éditeurs pour savoir où orienter mes envois. J'avais choisi les grands éditeurs traditionnels parisiens et quelques éditeurs de province que j'aimais bien comme Verdier ou Champ Vallon. A priori, je trouvais que mon manuscrit correspondait plus à ce genre de maison. Sincèrement, je ne pensais pas être éditée. J'espérais simplement recevoir un avis".

Le manuscrit de son roman "Les Chignons" est accepté par les éditions du Cheyne et Gallimard. Geneviève choisira ces derniers qui le publieront en 1993 : "C'était magique. J'avais si souvent écrit leur adresse quand j'envoyais les articles qu'Indications publiait sur leurs livres. Quand je suis arrivée, j'ai été mise en contact avec Jacques Réda, qui travaillait dans la maison, tandis qu'Alain Bosquet, que je n'ai jamais rencontré, travaillait de l'extérieur. Jacques Réda faisait aussi partie des écrivains que j'appréciais car il écrivait des textes hors genres, inclassables, avec pas mal d'humour et de finesse dans les descriptions. De bonhomie aussi. Intuitivement, c'est ce que je cherchais à faire, même si je ne m'en rendais pas compte à ce moment-là : pouvoir exprimer des événements éventuellement banals sans m'en tenir à la trame d'un roman et mettre en route la machinerie qui leur permet d'exister. Ce qui m'a plu chez Gallimard et chez Jacques Réda, c'est notamment qu'ils publiaient des ouvrages qui ne correspondaient pas aux grands standards. Avant même qu'il ne soit paru, j'étais déjà invitée à droite et à gauche par des gens qui ne l'avaient pas lu, simplement parce que l'éditeur était Gallimard. J'étais propulsée dans le monde littéraire en recevant des invitations, comme je n'en ai jamais plus reçu après".

C'est ainsi qu'elle passe dans une émission de Michel Field sur Antenne 2. "Les Chignons" reçoit le Prix Franz de Wever de l'Académie de littérature et de langue françaises de Belgique, et le Prix France-Belgique de l'Association des Ecrivains de langue française.

Le contrat avec Gallimard oblige l'auteur à leur présenter ses cinq manuscrits suivants et, si les deux premiers sont refusés, le contrat est rompu : "J'ai fait la bêtise de leur envoyer deux manuscrits qui n'étaient pas très bons. Ils ont eu raison de les refuser, même s'ils hésitaient à chaque fois à travers des lettres circonstanciées. Alain Bosquet n'était plus lecteur chez eux et j'ai senti que je n'avais plus personne pour me soutenir, si ce n'est Jacques Réda. Ce qui a été dur, c'est qu'il me reprochait d'écrire quelque chose différent des "Chignons" alors que, pour mon deuxième texte, j'ai précisément eu envie d'écrire différemment, notamment à la suite de remarques de certains de mes lecteurs à propos du premier. Tout est allé trop vite, trop bien avec le premier. Je me demandais ce que j'allais écrire par après, si je n'allais pas être la femme d'un seul livre. Je n'ai pas tellement bien vécu cette première parution, d'être mise aussi rapidement sous les projecteurs, d'avoir des articles tellement élogieux et engageants. A la limite, j'aurais voulu que le livre paraisse et qu'il mène sa vie. Comme certains écrivains qui reçoivent le Goncourt, j'ai eu un peu de mal à retomber sur mes pattes et à trouver ma vraie voie par après. L'écriture et la publication des "Chignons" ont représenté une sorte d'euphorie, mais j'ai l'impression que le vrai travail a commencé après".

Geneviève Bergé retravaille son manuscrit "Au bord du noir" qui est refusé par plusieurs éditeurs. Le romancier Michel Lambert lui suggère de le soumettre aux éditions suisses de L'Age d'Homme. Son fondateur et directeur Vladimir Dimitrijevic a, en effet, constitué un catalogue impressionnant d'écrivains belges, à côté d'autres noms de la littérature mondiale. "Au bord du noir" est paru au début de l'année 1998 pour la Foire du Livre de Bruxelles.

Le troisième livre de Geneviève, "La ménagère et le hibou", est une approche poétique et philosophique de l'oeuvre de Rembrandt à travers le regard d'une femme d'aujourd'hui. Il est refusé par les éditions Gallimard et du Rocher, mais les éditions L'Age d'Homme lui renouvellent leur confiance :

"Vladimir Dimitrijevic avait une politique d'encouragement à ses auteurs. Il n'aurait pas pris n'importe quoi, mais il était disposé à publier des livres moins vendables, en ayant en tête que cet auteur pouvait avoir une trajectoire. Evidemment, en termes de presse, j'ai senti la différence par rapport à Gallimard. Je devais assurer moi-même la promotion en Belgique, ce qui n'est pas mon talent. Je ne suis pas assez entreprenante pour démarcher moi-même. Par contre, j'ai pu rencontrer plusieurs fois Vladimir Dimitrijevic en personne à la Foire du Livre de Bruxelles où il était présent chaque année. C'était toujours sympathique, y compris lorsque je n'ai plus publié chez lui. Il est resté convivial, positif, offrant tous les livres que je voulais sur son stand, prenant des nouvelles sur mes projets, m'invitant à lui présenter d'éventuels manuscrits, s'intéressant à mon travail". A noter que Vladimir Dimitrijevic est décédé le 28 juin 2011 dans un accident de voiture.

Pour son quatrième manuscrit, "Un peu de soleil sur les planchers", Geneviève décide de ne l'envoyer qu'à un seul éditeur, Luce Wilquin : "J'en ai eu assez de toutes ces démarches et ces lettres de refus, qui me déprimaient. J'avais eu l'occasion de rencontrer Luce Wilquin lors d'une soirée littéraire et elle avait l'air de connaître mon travail, au point de me proposer de venir un jour chez elle. De mon côté, j'avais envie d'être un peu moins seule autour de ces questions d'édition et j'avais déjà pu constater que Luce Wilquin était très fidèle à ses auteurs. Elle avait aussi constitué un catalogue intéressant et je lui ai donc proposé mon texte qu'elle a accepté tout de suite".

Geneviève a trouvé la maison d'édition qui lui convenait et qui a publié également son cinquième livre, "Le tableau de Giacomo", paru en 2010 : "J'ai trouvé auprès de Luce Wilquin une éditrice professionnelle, tout en étant accueillie personnellement. J'ai rencontré d'autres auteurs publiés chez elle. Ce que je trouve agréable et honnête, c'est que l'on sent que l'on est dans une relation gagnant-gagnant. Par exemple, quand j'ai été finaliste pour des prix en France, elle a trouvé cela intéressant aussi pour sa maison, qui pouvait de la sorte aller à la rencontre d'autres lecteurs et pénétrer d'autres marchés. On se sent dans un partenariat où chacun a un rôle et quelque chose à gagner. Chaque année, elle a son propre stand à la Foire du Livre de Bruxelles où l'on croise beaucoup de monde".

Plus d'infos sur les éditions Luce Wilquin (qui fêteront leurs 20 ans en 2012) : http://www.wilquin.com/

mercredi 26 octobre 2011

Nouveaux livres de Colette Nys-Mazure

Colette Nys-Mazure vient de sortir deux nouveaux livres (que je n'ai pas encore lus) :

1° "L'Envers et l'Endroit précédé de Tapisserie angevine" aux éditions Cénomane.
C'est un ensemble de textes inspirés par la rencontre avec des femmes et des hommes en situation d'apprendre ou de réapprendre à lire et à écrire : "J'ai perçu le poids du non-dit et de l'héritage familial, la place irremplaçable des grands-parents aussi bien que le sentiment d'avoir été oublié" dit Colette Nys-Mazure. Dans ce sillage, elle a écrit dix nouvelles qui explorent un passé parfois trouble et les questions qui taraudent encore le présent, tentant d'élucider ce qui se dissimule sous les apparences et les silences.

2° "L'Espace du pardon" aux éditions Invenit.
Ce livre de 39 pages s'intègre dans une collection des éditions Invenit qui met en lumière le lien entre la peinture et l'écriture, l'image et les mots, dans d'élégants petits livres qui nous proposent la méditation d'un écrivain sur un tableau des musées du Nord-Pas-de-Calais. Colette Nys-Mazure a choisi "Le Reniement de Saint-Pierre", un tableau du Musée de la Chartreuse à Douai. Il a été peint par un mystérieux peintre de l'école française du XVIIème siècle, actif à Rome, connu sous l'appellation du Pensionnaire de Saraceni, émule du Caravage.

Cliquez ci-dessous sur "Nys-Mazure Colette" pour retrouver mes comptes-rendus d'autres livres de Colette Nys-Mazure.

mercredi 19 octobre 2011

L'avenir du Fonds Espace Nord

Le Fonds Espace Nord a été racheté par la Communauté française qui a chargé les Impressions Nouvelles de le gérer. Son responsable Taguy Habrand évoque l'avenir du Fonds Espace Nord dans la dernière revue "Le Carnet et les Instants" (publiée par le Service de Promotion des Lettres de Communauté française) :

"Les transferts successifs d'Espace Nord au cours des dernières années ont eu un effet préjudiciable sur l'identité de la collection. On a vu se succéder politiques éditoriales, maquettes, formats ou distributeurs, ce qui a donné lieu à un résultat insuffisamment cohérent. Le redéploiement de la collection consiste d'abord à dresser un état des lieux de la situation concrète du patrimoine, au niveau des stocks, des archives graphiques et des contrats. Puis, à rétablir la confiance des libraires et des lecteurs, confrontés à un ensemble bigarré qui fait tout sauf collection ou à des titres épuisés en dépit d'une demande régulière. Concrètement, cela suppose une harmonisation de l'esthétique des volumes, l'établissement d'un catalogue précis des titres disponibles en librairie et la remise à disposition de la collection Espace Nord dans son intégralité. Sur ce dernier point, la contribution de Cairn.info sera décisive.

Le rachat d'Espace Nord par les pouvoirs publics a été décidé en vue de protéger la collection, de ne pas rejouer les erreurs du passé, mais en aucun cas de cadenasser son dynamisme ou de la mettre sous respirateur artificiel. La Communauté française reste propriétaire de tout ce qui touche de près ou de loin à Espace Nord, ce qui revient à dire que certaines décisions lourdes, à l'instar d'opérations de déstockage ou de soldes, nous sont impossibles sans l'aval des pouvoirs publics. Mais d'un point de vue purement pratique, la mission de gestion confiée aux Impressions Nouvelles et à Cairn.info maintient la situation qui prévalait jusqu'ici : l'éditeur reste éditeur, assure la publication des nouveautés et veille à la pérennité du catalogue. Ces aspects seront quantifiés contractuellement, à raison de 8 nouveautés et 8 rééditions de titres épuisés par an. Concernant le choix des titres, il sera réalisé par un comité éditorial interprofessionnel que nous présenterons cet automne.

L'intérêt des Impressions Nouvelles ne date pas d'hier et nous nous étions déjà manifestés par le passé en vue de sauver ce qui pouvait l'être, sans succès. L'appel d'offres nous a permis de déposer un projet solide et argumenté, qui dépasse de loin ce qui était demandé. Le caractère audacieux d'Espace Nord, les risques qui lui sont associés, les interrogations quant au rôle et à la gestion d'une collection patrimoniale déjà forte de 300 titres font du projet une expérience typique, en résonance avec la culture des Impressions Nouvelles. Puis, il y a le goût pour le travail bien fait. Les pionniers qui ont érigé Espace Nord ont contribué à faire exister la littérature francophone de Belgique. Poursuivre cette action de longue haleine avec la même exigence est la meilleure façon de saluer les énergies déployées jusqu'ici. Et nous ferons en sorte d'en assurer la visibilité, tant en librairie que dans les bibliothèques ou les écoles, ainsi qu'à l'étranger où de nombreux centres de recherche s'intéressent précisément aux littératures francophones.

Ces dernières années, l'exploitation numérique d'Espace Nord a souvent fait l'objet de promesses non tenues, de slogans destinés à s'attirer la sympathie des pouvoirs publics ou l'attention de la presse. Par-delà les discours, on ne s'improvise pas éditeur numérique, en particulier pour une collection aussi vaste que Espace Nord, et nous ne souhaitons pas jouer les imposteurs ou les prophètes. La rencontre avec Cairn.info, spécialisé dans la numérisation et l'accès à des ressources en sciences humaines, nous a permis de proposer un programme sans esbroufe qui verra, dans les deux années qui viennent, la mise ou la remise à disposition d'une quarantaine de titres phares d'Espace Nord et d'une quinzaine de nouveautés en version papier et en version numérique, ainsi qu'un accès à tous les autres titres de la collection, sans exception, en impression à la demande. Au-delà, nous essaierons sans doute, même si cela ne fait pas à proprement parler partie de notre mission, de réfléchir ensemble au développement, à partir de la collection Espace Nord, d'une bibliothèque numérique de référence sur la littérature belge francophone, bibliothèque numérique qui se destinerait, en Belgique comme à l'étranger, aux établissements d'enseignement et aux institutions de recherche".

jeudi 13 octobre 2011

Départ de Jean-Luc Outers du Service de Promotion des Lettres

A l'occasion de son départ du Service de Promotion des Lettres en communauté française qu'il a dirigé pendant 20 ans, l'écrivain Jean-Luc Outers a répondu à une interview pour la revue "Le Carnet et les Instants" :

"Comment fonctionnait ce Service de la Promotion des Lettres que vous avez découvert il y a vingt ans?
- On peut dire que le travail de mon prédécesseur était centré, pour résumer, sur ce qu'on pourrait appeler le "patrimoine littéraire" en développant les Archives et Musée de la Littérature et en créant la collection Espace Nord pour rendre enfin accessible un patrimoine constitué de livres qui pour beaucoup avaient disparu de la circulation sans être réédités et n'étaient donc plus accessibles pour le public. Il a lancé ce vaste chantier qui est toujours d'actualité puisque, comme vous le savez, la communauté française est désormais propriétaire de cette collection. Quant au Service des Lettres de l'époque, c'était une petite équipe qui s'occupait principalement de la gestion administrative. Parallèlement, ce qu'on appelait la Promotion des Lettres était géré par une asbl qui avait son siège au palais des Beaux-Arts, subsidiée par les pouvoirs publics, et s'occupait de la promotion de la littérature belge auprès des écoles, d'organiser des expositions, des rencontres littéraires, etc. Quand je suis arrivé au ministère, le ministre de l'époque a considéré que cette asbl jouait un rôle de service public et devait intégrer l'administration de la communauté française. Mon premier chantier a donc été d'intégrer le personnel et les missions de cette asbl au sein du Service des Lettres. On peut d'ailleurs dire qu'aujourd'hui encore, il reste des traces de cette ancienne organisation et une répartition du travail entre des tâches plus administratives et d'autres davantage liées à la promotion.

- Et cette double nature du Service de la Promotion des Lettres a-t-elle été un frein ou un moteur pour son développement?
- D'après moi, ce fut plutôt une chance car l'appel d'air introduit par cette intégration a permis de ne pas cantonner notre travail au seul volet administratif mais de le doter aussi d'un contenu qui lui donne du sens tout en multipliant les rencontres avec des gens passionnants : écrivains, éditeurs, etc. Cette ouverture vers l'extérieur me semble indispensable pour éviter à l'administration de se renfermer sur elle-même.

- Pour revenir un instant sur le travail de Marc Quaghebeur que vous évoquiez et qui a permis, avec d'autres, de circonscrire un véritable champ de la littérature belge francophone, souscrivez-vous avec cette "identité en creux" qui est devenue une sorte de lieu commun de nos lettres?
- Ma position est sensiblement différente. J'estime que la littérature commence par la langue, cette langue qui forge notre rapport au monde. Ecrire, c'est donc mettre un mot derrière l'autre et au travers de cette action se développe un sens. Pour cette raison, j'estime que la littérature belge francophone appartient au corpus de la littérature française. Mon premier roman a été publié dans la collection "Blanche" de Gallimard et non dans celle "Du monde entier" qui regroupe les écrivains étrangers. La question de la traduction et du caractère intraduisible de certains mots ou de certaines expressions souligne cette primauté de la langue. Certains titres de mes propres livres comme "La place du mort" ou "Corps de métier" sont souvent impossibles à traduire dans d'autres langues. Ceci dit, il y a quand même l'histoire de la Belgique qui est singulière. C'est un petit pays et je rappelle toujours, de mémoire, cette phrase de Milan Kundera à propos de la Tchécoslovaquie : "Les petits pays sont ceux qui vont disparaître et qui le savent". Il n'existe donc pas chez nous ce destin qui parfois s'apparente à l'éternité et que connaissent les grandes nations comme la Russie, l'Angleterre, l'Allemagne ou la France. Cette singularité se retrouve dans notre littérature marquée par la liberté et une forme de fragilité. Même notre langue est poreuse et traversée d'influences germaniques. Le symbolisme belge en est la parfaite illustration. Mais cette spécificité qu'on trouve chez Maeterlinck ou Verhaeren a aujourd'hui à peu près disparu. La jeune génération d'auteurs belges s'inscrit plutôt dans le courant d'une identité européenne. Pour revenir sur ce que je disais, un écrivain est avant tout confronté à un code, celui de la langue. Il doit essayer de faire sa propre langue dans la langue. Il doit aller jusqu'au bout de la langue, jusqu'à la rendre irrégulière. C'est ce qui distingue également l'écrivain du journaliste ou l'écrivain de l'écrivant, pour reprendre la distinction de Roland Barthes. On reconnaît donc un écrivain avant tout à sa langue.

- Et le complexe de l'écrivain belge vis-à-vis de la France s'est-il atténué?
- Je crois qu'il ne faut pas se tromper : la France est une chance pour l'écrivain belge francophone car nous évoluons, malgré tout, dans la même langue. En ce qui me concerne, comme auteur, je n'ai jamais caché mon identité belge et j'ai toujours été bien accueilli en France. La plupart des éditeurs parisiens ont également bien compris que ce qui peut les menacer avant tout, c'est justement le parisianisme. C'est par la périphérie que la langue et la littérature se régénèrent.

- Venons-en maintenant aux chantiers que vous avez vous-même initiés. Commençons par les bourses aux auteurs.
- J'ai toujours été très surpris de la différence qui existe entre le statut de l'écrivain et d'autres catégories d'artistes. On considère normal qu'un musicien soit payé pour un concert, qu'un comédien le soit également pour ses prestations mais pour l'écrivain, hormis des droits d'auteur faméliques qui souvent ne lui étaient même pas payés, il n'existait rien. Nous avons donc essayé d'instituer une réelle professionnalisation du métier d'écrivain en mettant en place une série de bourses. Ces bourses sont, à mes yeux, du même ordre que les aides octroyées par les pouvoirs publics à un théâtre, par exemple. Les demandes sont examinées par la Commission des Lettres qui est l'une des instances d'avis dont nous assurons le suivi.

- Concernant maintenant l'aide au monde de l'édition belge francophone, comment s'est opérée l'évolution?
- Quand je suis arrivé, il y avait peu d'éditeurs strictement littéraires et la plupart fonctionnaient de manière tout à fait artisanale. Ces structures, dans l'offre éditoriale en Belgique francophone dominée par la bande dessinée et les sciences humaines, représentaient un pourcentage extrêmement faible. Elles avaient donc un mal fou à trouver des auteurs et à se diffuser surtout en France. C'était un véritable problème. Les auteurs en souffraient eux aussi car leurs droits n'étaient souvent pas payés par manque de surface financière de ces éditeurs. Nous avons donc mis en place des contrats-programmes avec ces derniers pour leur permettre d'avoir une aide substantielle dans le développement de leur politique éditoriale. En échange, ils s'engagent à publier un certain nombre de titres par an, à rétribuer les auteurs, à investir dans la promotion et à avoir une véritable distribution en Belgique et en France.

- Et au-delà de nos frontières, quelle place occupe aujourd'hui la littérature belge francophone et quels sont les outils qui participent à son rayonnement?
- Les deux premières choses essentielles, ce sont les envois d'ouvrages sélectionnés par la Commission des Lettres à destination des universités à l'étranger (environ 20.000 par an dans une quarantaine de pays) et les lecteurs présents dans certaines d'entre elles qui y enseignent notre littérature. Ensuite, il y a le développement de la traduction par lequel nous nous donnons des aides qui connaissent un succès croissant, générant une vingtaine de traductions par an. Enfin, il y a le collège des traductions de Seneffe créé en 1996 et qui accueille en été des traducteurs venus des quatre coins du monde pour traduire des écrivains belges francophones. C'est un lieu très important qui joue un véritable rôle catalyseur. Mais le problème du rayonnement de nos lettres reste la France, surtout pour les auteurs publiés en Belgique. La frontière demeure. La création de la Librairie Wallonie-Bruxelles à Paris en 1994 était une tentative pour rendre cette production visible en France, physiquement présente. Albert Mockel, dans les années 1930, avait déjà eu cette idée.

- Un autre instrument de visibilité important pour notre littérature, c'est "Le Carnet et les Instants" qui au départ n'était qu'un agenda des lettres belges.
- C'est en 1992 que "Le Carnet et les Instants" a pris la forme d'une revue dont le rédacteur en chef était Carmelo Virone. On peut dire que c'est l'outil le plus complet sur la littérature belge et son actualité. Le tirage est aujourd'hui d'environ 6.000 exemplaires. La partie réservée à la critique, au regard de la place de plus en plus restreinte accordée à la littérature dans la presse générale, est très importante car elle rend compte de livres dont on ne parlerait parfois nulle part ailleurs. C'est également un bon baromètre de la vie de nos lettres. On constate par exemple depuis quelques années une diminution sensible du nombre de publications.

- Quels sont vos éventuels regrets ou chantiers que vous n'avez pas pu voir aboutir à l'heure où vous quittez votre poste?
- Je dirais simplement que certaines choses ont parfois pris beaucoup de temps pour se mettre en place. Il y a également la question du rendez-vous avec le public pour des choses que nous avons organisées ou soutenues, et pour lesquelles nous aurions espéré davantage d'audience même si l'arrivée d'un événement comme le Marathon des Mots est à ce titre plutôt réjouissant car il assure la présence d'une manifestation de dimension internationale dans notre paysage culturel. Cette question du public pose également celle d'un recul de la place de la littérature dans la vie des gens, et pas seulement chez nous. Face à la multiplication des médias et des loisirs, cette place est de plus en plus difficile à défendre. Passionner les jeunes pour la lecture aujourd'hui, c'est un grand défi. Le plus grand peut-être".

jeudi 6 octobre 2011

Agenda littéraire

12 octobre à 11h : remise du Prix Littéraire des bibliothèques de Bruxelles à l'hôtel de ville.

Du 12 au 16 octobre : 20ème édition de la Fureur de Lire. Durant cinq jours, librairies, bibliothèques et lieux culturels proposent au public de tous âges plusieurs centaines d'animations : rencontre avec des auteurs et illustrateurs, lectures à voix haute, expositions, promenades contées, repas littéraires, etc. A travers la diversité des activités proposées émergent aussi des thématiques régionales, comme la gastronomie à Liège, l'amour et le développement durable dans le Brabant wallon, la poésie à Namur ou la gastronomie au Luxembourg. Programme complet : http://www.fureurdelire.be/

15 et 16 octobre (de 10h à 17h) : "Histoire de jalousie", atelier animé par Colette Nys-Mazure pour huit stagiaires ayant déjà une pratique de l'écriture à l'Espace Biergopack à Schaerbeek.

15 et 16 octobre : 4ème édition de la Foire du Livre politique à Liège. Programme complet : http://www.lafoiredulivre.net/

20 octobre (de 12h30 à 13h30) : Au palais des Beaux-Arts de Bruxelles, présentation de "Le frère du pendu" de Mariane Sluszny et "Cheyenn" de François Emmanuel. Ce sont deux romans épousant l'itinéraire d'un cinéaste à la recherche du réel.

20 octobre à 20h : A l'Association des Ecrivains Belges, rencontre-débat sur les belgicismes dans la poésie avec Jacques Mercier, suivie d'une présentation du poète Guillaume Duthoit.

10 novembre à 20h : A l'association des Ecrivains Belges, rencontre-débat sur "Simenon, poète?" avec Anne Richter, suivie d'une présentation du poète Tristan Sautier.

17 novembre à 20h : Présentation du roman "Papillon mortel" et de l'essai "22 astuces pour une vie plus magique" de Evelyne Wilwerth à la bibliothèque de Braine-le-Comte.

17 novembre à 20h : Rencontre à Eugies avec Jacques De Decker autour de son oeuvre dans le cadre des "Saisons de la Mémoire".

24 novembre à 18h : Dans le cadre de l'exposition "La Wallonie des grands écrivains" dont il est le parrain, la bibliothèque Chiroux à Liège accueille le poète, chanteur et plasticien Julos Beaucarne qui s'entretiendra avec Karel Logist de l'ensemble de son oeuvre.

28 novembre à 20h15 : A Passa Porta (Bruxelles), lecture croisée de "Spoutnik" de et avec Jean-Marie Piemme, ponctuée d'un échange avec un autre homme de théâtre et écrivain, Dimitri Verhulst.

jeudi 29 septembre 2011

"Le château de Boussu raconté aux enfants"

Antoine et sa soeur Eléonore se promènent au château de Boussu quand il rencontre Papy Ramassetout. C'est le point de départ de "Le château de Boussu raconté aux enfants" qui est l'oeuvre de deux Boussutois : la romancière Françoise Houdart et l'illustrateur Jacky Assez. L'ouvrage permettra aux enfants de se rendre compte de ce qu'était la grandeur du site qui a accueilli Charles-Quint, Mazarin, Louis XIV et François Ier!

Françoise Houdart a répondu aux questions du journal "La Province" :

"D'où est parti le projet?
- Je suis Boussutoise. Le château fait donc partie de ma vie. En 2000, j'avais d'ailleurs écrit un roman qui se situait au château de Boussu : "Belle-Montre". Je viens souvent me balader dans le parc. J'y suis allée avec ma petite-fille de 4 ans ; elle avait mis sa robe de princesse. Et quand nous sommes arrivées sur place, devant les ruines, elle m'a demandé : "Il est où le château?". Cette question me revenait tout le temps. C'est comme çà que le projet a démarré. Le but est de montrer aux enfants ce qu'était le château.

- Vos trois personnages ne sont pas sans rappeler des personnes qui existent?
- Le papy Ramassetout, c'est un peu Marcel Capouillez, le conservateur du site que je connais très bien. Le gamin qui est toujours dans le parc, c'est un peu Jacky Assez. Sauf que dans le livre, j'en ai fait un enfant baptisé Antoine. Il vient dans le parc pour réaliser un herbier. Eléonore, elle, est un peu comme ma petite-fille qui rêve de princesse. Eléonore est aussi le prénom de la fille de Jean de Hennin-Liétard, seigneur de Boussu.

- Vous écrivez des romans. Est-ce plus facile d'écrire pour les enfants ou pas?
- C'est un plaisir différent, mais une vraie difficulté. Il fallait trouver le bon ton, le bon niveau de langage, sans tomber dans la niaiserie. J'ai réécrit le texte plusieurs fois. Pour le vocabulaire ancien, nous avons de toute façon élaboré un lexique à la fin de l'ouvrage. Dans le texte, nous avons parfois inséré des encarts sous forme de loupe pour expliquer un fait, une fonction. Nous avons voulu faire un livre pédagogique".

mercredi 21 septembre 2011

Agenda de la Maison de la Poésie à Namur

13 octobre 2011 à 19h : soirée langue française avec Marc Wilmet, auteur de "Grammaire critique du français". Marc Wilmet enseigne la linguistique à l'Université de Bruxelles et dans plusieurs universités étrangères. Ses travaux lui ont valu le Prix Francqui, la plus haute distinction scientifique décernée en Belgique.

21 octobre 2011 à 19h : dans le cadre d'Europalia Brésil 2011, séance de lecture du livre "Lettre de Copacabana" de l'auteur belge Paul Dulieu, accompagné par le comédien Pierre Mainguet et le guitariste Massimo Pasuch. Né dans un faubourg de Namur, Paul Dulieu a fait des études de sociologie et de linguistique. Il a travaillé à l'UCL, à l'IAD et aux Nations Unies, et a fait de nombreux voyages au Brésil. Dans "Lettre de Copacabana", il écrit à Christophe, son vieil ami démographe : comment le Brésil peut-il exister, si loin de la raison raisonnante? Pourquoi les Brésiliens ne se révoltent-ils pas?

27 et 28 octobre 2011 à 13h30 : spectacle "La jeune première" de Jean-Pierre Dopagne. Né à Namur en 1952, Jean-Pierre Dopagne partage sa vie entre le théâtre et l'enseignement (il est actuellement professeur à la Haute Ecole Paul-Henri Spaak à Nivelles). Auteur de nombreuses pièces de théâtre, il dénonce les dysfonctionnements de la société et de l'âme humaine, à travers une écriture où se mêlent la cruauté, la tendresse et l'humour.

18 novembre 2011 à 19h : rencontre littéraire avec Florence Richter, auteur de "Ces fabuleux voyous : crimes et procès de Villon, Sade, Verlaine et Genet". Criminologue de formation, Florence Richter a travaillé une dizaine d'années dans ce secteur, avant de devenir administratrice-déléguée des Midis de la Poésie à Bruxelles, journaliste littéraire indépendante et éditrice. Depuis 2008, elle est chercheur aux Facultés Universitaires Saint-Louis et a publié son premier livre, couronné par l'Académie Royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique.

3 décembre 2011 à 20h : spectacle de la Compagnie du Simorgh afin de fêter le 100ème anniversaire de l'attribution du Prix Nobel de littérature à l'écrivain belge Maurice Maeterlinck.

Plus d'infos sur toutes ces activités : www.mplf.be

dimanche 18 septembre 2011

Interview croisée de Micheline Boland et Louis Delville (2ème partie)

3° Comment se passe votre travail d'écriture? Est-ce que vous travaillez parfois sur un même projet? Est-ce que vous vous montrez des parties de textes ou préférez-vous montrer le résultat final? Qui a le plus d'influence sur l'écriture de l'autre?

Micheline : Je travaille le plus souvent directement sur ordinateur. Je me sers parfois de notes prises à la main sur de petits papiers. Il est assez rare que Louis et moi travaillions sur un même projet. Lorsque c'est le cas, nous l'abordons de manière différente (je pense, par exemple, à l'habillage d'un film muet que nous avons tous les deux réalisé à notre façon, Louis a établi un parallèle entre ce film et des images de la catastrophe du Bois du Cazier en 1956. Moi, j'étais partie sur l'idée d'écrire de la poésie à propos de chaque séquence avant de mêler narration et poésie). Il arrive que Louis lise un début de nouvelle ou de conte mais le plus souvent il prend connaissance d'un résultat final. Il est axé sur la compréhension maximale du texte, a horreur du flou, des zones d'ombre et de certains termes comme observer ou remarquer. Pour ma part, j'aime parfois laisser des imprécisions que le lecteur peut meubler comme il l'entend. Nous avons parfois une influence l'un sur l'autre, plus particulièrement en ce qui concerne la chute de nos histoires. Louis n'apprécie pas trop quand une nouvelle finit bien...

Louis : Mon tempérament paresseux fait que j'écris très peu. Chez moi, c'est toujours directement sur ordinateur. Lors des ateliers d'écriture, c'est évidemment avec stylo et papier. Les seuls moments de travail commun sont parfois consacrés à un conte que nous avons le projet de défendre ensemble, ce qui se passe régulièrement lors du concours de Surice et le fameux "habillage" du film : une superbe aventure pour un projet unique. J'aime relire les écrits de Micheline pour les peaufiner et éliminer les petites imperfections laissées par excès de précipitation de l'auteur... Micheline a toujours l'impression que tous ses lecteurs vont comprendre et je joue souvent le "candide"! Elle relit volontiers mes bêtises et souvent retrouve des fautes d'orthographe! Avons-nous une influence l'un sur l'autre? Je ne le crois pas. Parfois, je lui suggère une autre façon de tuer sa "victime"! Quant à moi, j'apprécie qu'elle m'aide à trouver une chute meilleure que celle que j'ai imaginée.

4° Est-ce facile de se faire une place dans le monde littéraire belge? Comment faites-vous pour vous faire connaître?

Micheline : Il n'est pas facile de se faire une place dans le monde littéraire belge. Il est plus difficile aujourd'hui que lorsque mon premier recueil de contes est sorti d'avoir ses livres repris en bibliothèque. Actuellement, les bibliothécaires doivent passer par une centrale d'achat. Même quand on est copine avec une bibliothécaire, c'est le parcours du combattant. Pour que le livre puisse être vendu en librairie, il faut que l'éditeur passe par un distributeur ou encore que l'on laisse ses livres en dépôt. Pour me faire connaître, je participe à des foires du livre où je distribue des petits textes qui sont comme des échantillons de mon écriture. J'ai un site et un blog, je suis membre de Facebook, certains contes sont repris sur des sites en rapport avec les thèmes développés (exemple : "Charles Quint et le chocolat" est sur le site chococlic.com). Je participe à certains concours. Cela m'a, par exemple, donné l'occasion d'entendre une de mes nouvelles diffusée par la RTBF. Les responsables d'un journal publicitaire local acceptent de faire de la publicité pour mes livres quand ils sortent et de publier certains de mes textes courts. Grand merci à eux! De plus, je suis conteuse. Quand je conte, il m'arrive de dire que j'écris aussi et de distribuer des cartes de visite... Je ne suis guère douée en marketing et cela réclame un effort non négligeable. Par ailleurs, je ne fais partie d'aucune association d'écrivains. Celles-ci demandent que l'on offre plusieurs de ses livres avant de pouvoir juger si on est digne ou pas d'en être membre. Je soulignerai qu'entre auteurs de la maison d'édition Chloé des Lys, nous sommes solidaires et nous faisons volontiers de la publicité les uns pour les autres.

Louis : Il n'est guère facile de se faire connaître et de trouver, même une toute petite place, au sein de ce monde littéraire, même simplement belge! Les débutants non édités par un "grand" éditeur n'ont guère de chance : toutes les portes sont fermées. Les bibliothèques sont pauvres et doivent respecter des réglements draconiens sous peine de se voir privées de leurs subsides. Les libraires n'ont pas de place et ne veulent pas prendre le risque d'avoir des invendus. Que faire donc? Cibler tout azimut, faire parler de soi partout, essayer de rencontrer des gens influents, entretenir des relations, ne jamais hésiter à se montrer ni à parler de son ou de ses livres, fréquenter les autres auteurs pour se rendre compte de ce qu'ils font mieux que vous. Malheur aux timides et aux inactifs! Utiliser les moyens modernes de communication comme Facebook, un blog, YouTube permet de toucher un nombre incalculable de clients potentiels. J'essaie aussi de laisser des "traces" de mes écrits partout où je peux par la distribution de petits textes joliment présentés. Un seul but : faites parler de vous!

5° Quels sont vos projets pour les prochains mois? Avez-vous une "envie littéraire" que vous aimeriez réussir? Est-ce qu'écrire un livre à deux vous plairait?

Louis : Comme j'écris très peu, je n'ai sûrement pas de livre en préparation! Par contre, d'autres projets sont déjà dans le pipe-line :
- une participation à une chorale qui s'est formée pour un unique concert début octobre. Au programme, des chansons ouvrières et révolutionnaires. De quoi fêter dignement le centième anniversaire de l'Exposition Internationale de Charleroi 1911-2011.
- pour continuer dans la même voie, enfin présenter devant public le projet proposé à la Bibliothèque Marguerite Yourcenar de Marchienne-au-Pont : "Contes et anecdotes du vieux Charleroi de 1666 à l'an 2000".
- en commun avec Micheline, un projet avorté en ce mois d'août et que je compte relancer pour la fin d'année si notre partenaire commercial joue le jeu, cette fois! Je n'en dirai pas plus et vous aurez peut-être la surprise...
- continuer le chemin du conte. Trois formations cette année avec trois vrais conteurs. De quoi être un peu mieux armé! Une présentation prévue en octobre dans le Brabant wallon.
- participer au concours de contes de Surice et peut-être y être finaliste au printemps?
- rencontrer des amis et parler d'avenir... Concernant l'écriture d'un livre à quatre mains, je me demande lequel de nous deux serait le plus réticent? Mais j'examinerai cette possibilité avec bienveillance s'il y a demande!

Micheline : Je travaille actuellement à la mise au point de la maquette "Des bleus au coeur", mon prochain recueil de nouvelles qui paraîtra en 2012 chez Chloé des Lys. Par ailleurs, le manuscrit d'un troisième recueil de contes attend la décision du comité de lecture... J'ai l'un ou l'autre projet de participation à des spectacles de contes et de présentation d'un de mes livres dans une bibliothèque. Je n'en dirai pas plus parce que j'ai déjà été victime de la distraction d'une bibliothécaire, du désistement d'un responsable commercial et de l'oubli d'un journaliste. De ce fait, je deviens un peu superstitieuse! Comme les autres années, j'aimerais aussi participer à certaines foires du livre (cela dépend de mon éditeur). Je viens d'écrire deux débuts de nouvelles qui seront achevées par des enfants ; je suis curieuse de lire, au printemps prochain, ce qu'ils en auront fait. Je continue à écrire des nouvelles, des contes, de la poésie en fonction de mon inspiration spontanée et des thèmes de concours. Je ne participe quasiment qu'à des concours gratuits mais il m'arrive de travailler sur les thèmes proposés et de les considérer comme une forme de stimulation. Une envie littéraire? Durant l'hiver, j'ai commencé un roman. Peut-être vais-je penser à le terminer plutôt que de me contenter d'histoires courtes... Je me dis "quand je serai à court de sujets, je m'y remettrai", mais cela m'arrive si rarement! L'écriture d'un livre à quatre mains? Je n'y ai pas encore pensé. Pourtant, voilà qui pourrait être un beau projet. Ecrire un roman un chapitre sur deux pour mieux faire rebondir l'histoire? C'est à envisager... Merci à toi, Petit Belge, pour l'attention que tu portes aux auteurs belges et pour cette interview croisée à laquelle nous avons répondu avec plaisir.

dimanche 11 septembre 2011

Interview croisée de Micheline Boland et Louis Delville (1ère partie)

1° Comment vous êtes-vous rencontrés et étiez-vous déjà intéressés à l'époque par l'écriture, les contes et l'improvisation?

Micheline : Nous nous sommes rencontrés à Charleroi en faisant la queue devant un cinéma. A l'époque, j'écrivais déjà. J'avais été attirée par l'écriture aux alentours de mes dix ans. A l'école, l'institutrice nous proposait des sujets de rédaction. Elle appréciait mes textes, mes parents aussi. Je me suis plu à refaire des rédactions chez moi en modifiant le cadre et les personnages. A l'adolescence, j'ai écrit des poèmes et des nouvelles. J'ai participé aux deux recueils "Poésie-20" édités sous la houlette de Pierre Coran. Cela a été l'occasion de rencontrer d'autres adolescents qui écrivaient et de publier des textes dans diverses revues. J'ai commencé à écrire des contes beaucoup plus tard, vers l'âge de cinquante ans : le mari d'une amie ayant lu une de mes nouvelles m'avait suggéré de prendre part au concours de contes de Surice, un petit village près de Philippeville. J'ai suivi son conseil... Quelques années auparavant, Louis et moi, nous étions inscrits à des formations au jeu de l'acteur et cela nous avait beaucoup intéressés. Il faut dire que Louis et moi partageons quasiment tous nos loisirs. Tous deux nous faisons du tir à l'arc, de l'écriture, de l'impro. Nous partageons beaucoup de goûts et d'intérêts.

Louis : Assez bizarrement, j'ai rencontré Micheline à Charleroi en faisant la queue devant un cinéma! Durant toutes mes études, je n'ai jamais été intéressé par la littérature, ni l'écriture. Une rédaction était pour moi la pire des punitions. Mon esprit scientifique et cartésien ne comprenait pas que l'on puisse écrire des choses longues... Et comme j'ai entrepris (et réussi) des études d'ingénieur technicien en électronique, cela ne s'est pas arrangé avec l'âge. J'étais et je suis pourtant amateur de musique classique et de théâtre, mais comme spectateur uniquement. Jusqu'au jour où...Micheline m'a proposé de suivre avec elle une formation au jeu de l'acteur. Une vraie révélation : moi aussi, j'étais capable de faire passer des sentiments, de "jouer", moi le spécialiste des visites guidées de l'usine où je travaillais! Et quand on est monté une fois sur les planches...on aspire à y retourner. En 1997, Micheline est finaliste du concours de contes de Surice. Je lui propose de défendre à nous deux son "berceau divin". Mes premiers pas de conteur... Quant à l'impro, cela s'inscrit dans la continuité de nos activités "verbales". On me reproche assez d'être trop conteur lors des impros et d'être un peu trop improvisateur lors de contes!

2° Donc, si je résume bien, passé le cap de la cinquantaine, vous vous lancez ensemble dans de multiples activités dans le domaine littéraire écrit ou oral. Aviez-vous déjà à ce moment le projet d'écrire un livre?

Louis : Sûrement pas! La "politisation culturelle" de ma région me faisait peur. C'était bien mal connaître celle qui allait nous emmener à la rencontre de Woyzzeck, un drame de Büchner, en enfer avec les sept pêchés capitaux et puis encore nous faire découvrir Electre de Sophocle. Frédérique Lecomte nous a beaucoup appris... Le concours de Surice se plaçait dans la continuité. C'était aussi monter sur scène et défendre un texte. A part que le texte avait été écrit par Micheline! Belles expériences que ces premières années où les répétitions d'avant-concours et l'Estival du Conte nous permettaient de rencontrer d'autres conteurs qui allaient devenir de vrais amis. Parmi eux, Paul Fauconnier avec qui j'ai suivi une formation de trois jours en 2003. Que de souvenirs avec lui, que de plaisirs et de complicité... Il me révèle que moi aussi, je suis capable d'écrire... En 2004, Micheline sort son premier livre et dans la foulée, je commence à écrire mon premier "vrai" conte. "Les mouches de Noé" sont nées en moins de deux heures! Elles seront remarquées par le jury de Surice. Le train est parti, il va être difficile de l'arrêter!

Micheline : A l'âge de dix-huit ans, j'avais déjà envoyé un roman à une maison d'édition française. J'avais essuyé un refus. En suivant une (très longue) formation en programmation neuro-linguistique (PNL), il m'est apparu rapidement que j'allais écrire un livre sur le sujet pour rendre accessible à un maximum de personnes les richesses que je découvrais. Régulièrement, je me suis mise à écrire des petits articles concrets que j'envoyais à des revues (Le Vif/L'Express, Femmes d'aujourd'hui, En Marche, Bonnes Soirées, Flair,...). Mes articles donnaient des pistes pour envisager un régime, combattre la morosité ou l'ennui par exemple ; ils paraissaient à la rubrique "courrier des lecteurs" ou même "poésie". Quand j'ai terminé la formation, j'avais de quoi alimenter la troisième partie de mon livre! Il me restait à écrire la partie théorique et aussi la partie exercices (que je voulais personnels et faciles à effectuer seul). Ensuite, j'ai relié chaque petit article à un point de théorie. Mon manuscrit terminé et relu par mon formateur qui en a écrit la préface, je l'ai envoyé à de grands éditeurs spécialisés en sciences humaines. Mais il ne fut pas accepté en raison d'un développement trop réduit, à leurs yeux, de la théorie. Bien que je sois plutôt timide, comme j'avais le réel désir de faire connaître la PNL, j'ai fait une conférence sur le sujet et animé deux formations visant à faire expérimenter les bases à un public assez large. Au sein de mon équipe de travail, j'ai aussi écrit des articles pour le journal du PMS et j'ai animé quelques réunions sur le thème des "Métaphores" (un des outils que j'ai appris à utiliser grâce à la PNL). A plus de cinquante ans, participer au concours de contes de Surice m'a amenée à écrire régulièrement des contes, même sans rapport avec les thèmes proposés. Après que j'aie écrit un nombre important de contes, grâce à Internet, Louis a découvert la maison d'édition Chloé des Lys. Tout naturellement, j'ai appelé ce premier recueil "Contes à travers les saisons" puisque ce sont les fêtes et les événements saisonniers qui sont surtout à l'origine de mon inspiration, Noël étant la fête qui m'inspire le plus. Ce recueil accepté chez Chloé des Lys, j'ai proposé à ce même éditeur mon ouvrage de PNL, il fut accepté lui aussi. Puis, j'ai fait de même avec mes nouvelles, regroupées par thème (d'où les titres "Nouvelles à travers les saisons", "Nouvelles entre chien et loups",...). Jusqu'à présent, huit titres sont sortis, le neuvième est en cours de correction, le dixième est au comité de lecture... Les autres piaffent déjà d'impatience dans mon ordinateur!

Rendez-vous la semaine prochaine pour la deuxième partie de l'interview...

vendredi 2 septembre 2011

Nouveau roman d'Eric-Emmanuel Schmitt

Avec Amélie Nothomb, c'est l'autre vedette de la littérature belge de langue francophone : Eric-Emmanuel Schmitt. Son nouveau roman, "La femme au miroir", raconte le parcours de trois femmes à des époques différentes (à la Renaissance brugeoise, au début du XXème siècle à Vienne et dans le Hollywood actuel).

A l'occasion de la sortie de son roman, Eric-Emmanuel Schmitt s'est confié au journal "La Dernière Heure" : "On me considère souvent comme un stakhanoviste ou un écrivain très fécond. Or, de mon côté, j'ai toujours ce sentiment de ne pas en faire assez. Au début, cette prolixité posait problème à mon éditeur. Aujourd'hui, vu mes tirages, le souci semble résolu... Au début, je ne m'autorisais pas à parler des femmes ou à la place des femmes. Je me disais que je n'avais pas le droit de le faire, pas la légitimité. Ensuite, j'ai dû créer des personnages de femmes pour mes pièces de théâtre. Et comme je n'aime pas les petits rôles, je leur ai conçu des personnages forts qui ont séduit les femmes et ce sont elles qui m'ont autorisé à prendre la parole à travers elles. Ce sont elles aussi qui m'ont dit que j'écrivais bien sur elles. Je ne suis pas un féministe par intuition et réflexion. Pas de ceux qui vont hurler contre Dominique Strauss-Kahn ou pour Nafissatou Diallo simplement parce qu'elle est femme et lui pas. Non, je suis féministe parce que je respecte les femmes, je les admire dans un monde qui n'a pas été créé autour d'elles. La femme est un homme avec quelque chose de plus. Plus de complexité, plus de tâches à accomplir. Elle doit tenir son rôle en séduction, son rang en maternité et si elle veut travailler, c'est encore bien plus compliqué que pour les hommes. Donc, me mettre dans la peau d'une femme, c'est aller au plus profond d'un labyrinthe complexe".

dimanche 7 août 2011

Le 20ème roman d'Amélie Nothomb

Ce 18 août 2011 sort le 20ème roman d'Amélie Nothomb : "Tuer le père" (éditions Albin Michel). Il raconte les rapports et rivalités entre un père quadragénaire et son fils adoptif adolescent dans le monde de la magie.

Fidèle et constante tant à sa maison d'édition qu'à ses lecteurs, Amélie Nothomb nous offre, chaque mois d'août depuis 20 ans, un petit livre qui se lit d'une traite. Elle fait partie des dix écrivains francophones les plus achetés. Ses ventes atteignaient 492.000 exemplaires en 2010. Elle ne laisse personne indifférent : ses fans soulignent son ton vif et intelligent, la surprise de son scénario, ses personnages singuliers et déroutants ; ses détracteurs critiquent la facilité de lecture, la minceur de l'intrigue, l'abondance de sa production, l'inégalité des romans et ses excentricités. En effet, Amélie s'est créée un personnage avec ses vêtements noirs, son chapeau et son rouge à lèvre écarlate ; est-ce ces extravagances qui attirent les lecteurs ou le contenu de ses romans? Mais derrière tout cela, il y a aussi une femme qui a une relation très profonde avec ses lecteurs (dont beaucoup de jeunes) qui font la file plusieurs heures avant le début de sa séance de dédicaces à la Foire du Livre de Bruxelles, qui entretient une correspondance écrite avec certains d'entre eux, ou qui vient de verser tous ses droits d'auteurs de la réédition de "Stupeur et tremblements" en livre de poche aux victimes du tsunami au Japon, un pays qui lui tient très à coeur.

En cliquant ci-dessous sur "Nothomb Amélie", vous (re)trouverez mes comptes-rendus de certains de ses romans.

mercredi 20 juillet 2011

L'écrivain belge Daniel Charneux

Dans la dernière revue "Le Carnet et les Instants", l'écrivain Daniel Charneux (né en 1955), licencié en philologie romane de l'Université de Liège, retrace son parcours littéraire qui a commencé à Autreppe : "Mon père, instituteur, m'a appris à lire et m'a surtout donné l'amour de la littérature. En classe, il nous lisait les contes de Daudet. Son grand numéro, c'était "La chèvre de Monsieur Seguin" que nous adorions... Et puis, l'ombre de Verhaeren était là. J'ai su, gamin, qu'il avait habité dans ce petit coin des Hauts-Pays en Hainaut, appelé le Caillou-qui-bique. Son souvenir était toujours vivant chez les vieux, et je voyais son portrait dans une ferme où j'allais souvent. Ce fut un de mes premiers contacts avec la littérature".

Daniel Charneux raconte ensuite : "Plus tard, en poésie, un professeur passionné a encore renforcé mon appétit de lire. J'ai eu ma période Camus. Je me rappelle aussi ma fascination pour Lautréamont : j'ai dévoré "Les chants de Maldoror" en une après-midi fiévreuse! A cette époque, j'ai écrit des poèmes lyriques, un peu surréalistes, du sonnet au vers libre. A 21 ans, je suis devenu professeur de français à l'école secondaire de Quaregnon...et j'y suis toujours! C'est une vocation, une expérience très réussie. Directeur de l'école pendant deux ans, j'ai préféré redevenir professeur : l'enseignement s'accorde bien, pour moi, à l'écriture, à laquelle j'étais revenu longtemps après mes poèmes d'adolescent. En 1998, j'avais participé à une formation à l'animation d'ateliers d'écriture. J'en suis sorti bouleversé, transformé. L'écriture revenait dans ma vie. Grâce aux techniques que j'ai découvertes à ce moment-là, je me suis lancé. "Une semaine de vacance" a paru en 2001 chez Luc Pire, dans la collection Embarcadère. Il a reçu quelques bonnes critiques et un prix local qui m'a fait un vrai plaisir, m'encourageant à poursuivre".

Son deuxième roman, "Recyclages", est publié en 2002 dans la même collection Embarcadère. Suit un recueil de nouvelles, "Vingt-quatre préludes", qui paraît en 2004 chez Luce Wilquin, devenue son éditrice attitrée ; ces courts récits portaient le nom d'un des vingt-quatre préludes de Debussy. Deux ans plus tard, dans "Norma, roman", Daniel Charneux se prend à réinventer la destinée de Norma Jean Baker après la mort de Marilyn Monroe qui fut son image étincelante, sa légende...et son malheur : "C'est la femme qui m'intéressait, sous le mythe. Elle atteint à l'authenticité dans la vacuité. Ce roman est celui sur lequel j'ai le plus travaillé. J'avais traversé une période de doute, un passage à vide. Le Prix Charles Plisnier, décerné au livre en 2007, m'a relancé" , confie-t-il dans la revue.

Finaliste du prix Rossel, du prix Rossel des jeunes et du prix des lycéens, couronné par le Grand Prix littéraire France-Communauté française de Belgique de l'A.D.E.L.F. (Association des Editeurs de langue française), "Nuage et eau" (sorti en 2008) retrace librement la vie du moine boudhiste zen japonais Ryôkan (1756-1831). L'imagination romanesque s'y mêle à l'évocation historique, basée sur les biographies de ce moine, calligraphe, poète, ami des oiseaux et des enfants, fidèle à son destin de moine itinérant.

Dernier livre de cet écrivain : "Maman Jeanne", paru en 2009 aux éditions Luce Wilquin. C'est le récit d'une femme qui passe de la coupe de son père à celle d'un mari imposé, et qui se retrouve veuve à 30 ans avec trois fils dont la belle-famille se chargera. Au début des années 1900, elle devient servante d'un curé auprès de qui elle connaît, pour la première fois, la douceur et la tendresse. Mais enceinte, elle doit partir pour Bruxelles car le curé n'assume pas l'enfant... Ce récit raconte en fait la vie de l'arrière-grand-mère de Daniel Charneux qui s'est basé sur des lettres de Jeanne racontant cet abandon forcé.

Ajoutons que Daniel Charneux anime des ateliers d'écriture de haïkus, et prépare un nouveau roman se déroulant à Liège, la ville où il a effectué ses études universitaires.

lundi 11 juillet 2011

François Weyergans à l'Académie française

A l'occasion de son entrée en juin à l'Académie française, l'écrivain belge François Weyergans a accordé une interview à Jeannine Paque pour la revue bimensuelle "Le Carnet et les Instants" publiée par le Service de Promotion des Lettres en communauté française :

"Vous êtes le premier écrivain belge élu à l'Académie française. Bernard Gheur, un journaliste et romancier belge de vos amis a écrit à votre propos : "Pas mal de terre belge reste collée à ses semelles. Et l'on peut être sûr qu'il ne brossera pas les pieds avant d'entrer sous la Coupole". Dans certains milieux ou en privé, vous évoquez volontiers la Belgique et notamment Bruxelles, le lieu de votre naissance où vous aimez parfois séjourner.

- Bernard Gheur, on s'est rencontré grâce à une interview! Il m'a reçu chez lui à Liège. Je connais si mal Liège... Nous sommes très cinéphiles tous les deux. Des titres comme "La scène du baiser" et "Nous irons nous aimer dans les grands cinémas" sont formidables. Mais si Bernard m'avait parlé de "terre belge" au téléphone, je lui aurais dit "plutôt le pavé bruxellois". Si terre il y a, ce serait la Provence, la Haute Provence. Je revois de modestes chapelles romanes au milieu des champs de thym, sans frises ni frontons, mais pas moins solides que le Mont Ventoux qui avait, de loin, la même couleur que leurs pierres de taille. J'apprivoisais des lézards, on cueillait des pêches dont le goût s'est perdu. "Vous êtes rhénano-méditerranéen" me disait Pierre Klossowski. J'ai vécu à Bruxelles mon adolescence, cette période de la vie un peu négligée au profit de l'enfance. Ce n'est pas parce que j'y suis né que j'aime Bruxelles ; c'est une ville qui n'a pas attendu ma naissance. Je tournerais volontiers un film documentaire sur elle, comme Manoel de Oliveira a tourné "Porto de mon enfance". Mais il faudrait reconstruire en studio le jardin du Mont des Arts, tel qu'il était avant la construction de cet ensemble quasi mussolinien dont fait partie la Bibliothèque Royale où l'étudiant que je fus découvrit avec ferveur tant d'ouvrages qu'il ne pouvait pas s'acheter. Je pense à toutes les librairies qui ont disparu. Ce qui a surtout disparu, ce sont les heures que j'y ai passées. Thème connu... Heureusement, il y a de merveilleuses librairies aujourd'hui à Bruxelles, quel que soit leur nombre de mètres carrés, de Chapitre XII à Tropismes, de Filigranes à La Licorne (la Licorne qui se trouve un peu loin, chaussée d'Alsemberg, mais loin de quoi, finalement?). Et la librairie d'occasions boulevard Adolphe Max où je trouve toujours des livres épuisés sur le cinéma. Autres disparitions : des salles de cinéma, des hôtels. Mais tant qu'on a l'Hôtel Métropole, tout va bien. L'équipe de tournage de mon film "Couleur chair" habita l'hôtel Métropole pendant tout l'été 1976. La chambre que j'occupais, sublime, a disparu ; c'est devenu une salle de réunion. Mais ils ont bien restauré le bar. Et mes soeurs et moi avons fêté au Métropole l'anniversaire de notre mère l'année dernière (histoire de vous dire que ma mère va bien!). Mais je ne vais pas vous faire un guide de Bruxelles! Chaque fois que j'y reviens, je fais un petit pélérinage place Rouppe où se trouvait jadis la gare du Midi. C'est là que Verlaine a tiré sur Rimbaud. Et puis, la grand-place sera toujours la grand-place, n'est-ce pas? Une place de cette importance sans édifice religieux, c'est plutôt rare et agréable. A Bruxelles, j'achète des cahiers Atoma made in Belgium. Je m'en servais à la fin de mes études et on en fabrique toujours. Leur reliure, que je suppose brevetée, est très pratique.

- D'autres souvenirs abondent. Vous pouvez parler longuement de l'enseignement chez les jésuites, dont vous avez gardé une mémoire très vive, que vous avez utilisée dans certains de vos romans, comme "Frans et François" par exemple. Des lieux vous ont marqué durant ces années de votre adolescence, de vos premiers apprentissages.

- J'ai fait mes humanités gréco-latines dans deux collèges, Saint-Michel et puis Saint-Boniface. C'est là que j'ai appris que Louis XIV avait fait bombarder la grand-place de Bruxelles! On ne le dit pas en France, çà. Mon professeur de troisième latine s'appelait Monsieur Lahaye. Je mets son nom quand un ordinateur pose la question secrète au cas où on oublierait son mot de passe : "votre professeur préféré". Il m'a écrit lorsque j'ai publié mes premiers livres ; il disait être fier de moi. Dans les années 80, j'ai rencontré à Tokyo un autre de ses anciens élèves et nous lui avons envoyé une carte postale. Il mourut peu de temps après, je crois. Pendant un cours de français, je m'étais disputé avec lui à propos de Cocteau, sans savoir qu'un demi-siècle plus tard, ce serait l'exemple de Cocteau qui me pousserait à me présenter à l'Académie française! L'Expo 1958 a été très importante. J'ai eu 17 ans pendant cette exposition, j'ai découvert des films, des peintres, des êtres humains exceptionnels : ce serait une belle séquence pour mon film de reconstruire le pavillon américain et la fresque de Saul Steinberg. Le stabile de Calder, transfuge de ce pavillon, s'est retrouvé, lui, entre l'ancien Old England et la nouvelle cinémathèque. Et si on parlait de Venise, la ville où je suis allé le plus souvent? Il n'y a pas que Bruxelles. De toute façon, j'aime toutes les villes où je vais, c'est une chance, c'est peut-être dû à une curiosité que je considère comme un instrument de travail.

- Que pensez-vous de la Belgique actuellement? Quel est aujourd'hui votre sentiment à l'égard de votre pays ou de votre ville d'origine, des relations entre communautés et des problèmes présents en général?

- Alors, je tiens beaucoup à dire le plus grand bien de la vie intellectuelle en Flandre. Déjà en 1967, c'est la télévision dite flamande, la BRT, qui m'a commandé un film d'une heure sur Baudelaire à l'occasion du 100ème anniversaire de sa mort. J'ai pu tourner avec un chef opérateur et un ingénieur français. Mon titre était "Baudelaire is gestorven in de zomer". Il y a deux ou trois ans, j'ai fait des lectures en français, surtitrées en néerlandais, dans une dizaine de théâtres, de Brugge à Hasselt, de Knokke à Gent, à Sint-Niklaas, à Aalst, à Mechelen et dans l'extraordinaire théâtre Bourla d'Antwerpen, en compagnie de confrères néerlandophones (Anne Provoost, Bernard Dewulf entre autres). Et même à...Brussel! Je logeais à Anvers, on y rentrait tous les soirs en minibus. C'était organisé par l'étonnant Luc Coorevits, l'inventeur de Behoud de begeerte et la tournée s'appelait "Saint Amour Vlaanderen". Saint Amour,c'est à cause du vin de Bourgogne! Chaque soir, je lisais en français devant un public en or, plutôt jeune et extrêmement attentif, dans des théâtres qui étaient complets. Il y avait un partage de rires et d'émotions, une complicité forte. Ces soirs-là, elle était aux oubliettes, la malsaine frontière linguistique. Là encore, je voudrais me servir de cette tournée, ces dix jours incroyables, dans un roman. Si je vous en parle davantage, ce sera moins intériorisé, moins mystérieux pour moi. Pour rester du côté néerlandophone de cette frontière linguistique utilisée de la pire des façons, laissez-moi ajouter que je m'intéresse de très près par admiration au travail de trois peintres dits flamands : Thierry De Cordier, Luc Tuymans et Michaël Borremans. Je vais finir par acheter des dessins de Thierry De Cordier.

- Mais il fallait à l'époque quitter Bruxelles et monter à Paris? C'était irrésistible?

- N'oubliez pas que ma mère et donc la moitié de ma famille sont françaises. Un de mes oncles, sociologue, habitait Paris. Et après un passage à l'IDHEC (Institut des Hautes Etudes Cinématographiques) et mes premiers articles dans les "Cahiers du Cinéma", je suis revenu un mois à Bruxelles pour y tourner en avril 1961 mon premier court-métrage professionnel en 35mm, sur un jeune chorégraphe qui s'appelait Maurice Béjart. Avec ce film, j'ai eu un grand prix au festival de Bergame, où j'ai rencontré Marcel Duchamp. Le prix, c'était un chèque d'un million de lires que j'ai reçu en liquide dans une banque lombarde. J'avais 20 ans. Ah l'Italie! Qu'est-ce qu'on serait sans l'Italie? A propos, vous avez vu sur youtube l'intervention de Riccardo Muti à l'Opéra de Rome? Il interrompt la représentation d'un opéra de Verdi et s'adresse à la salle, où se trouvait le sieur Berlusconi, pour s'indigner des coupes dans le budget de la Culture. J'avais la chair de poule. Il faut absolument regarder çà.

- C'est aujourd'hui le plus parisien des écrivains belges, peut-être celui que l'on attendait le moins, qui va revêtir l'habit vert, porter l'épée et prononcer le discours de circonstance. Peut-on supposer, espérer, en cette occurence, qu'il s'agira, outre la pratique convenue de l'éloge, d'un objet hautement littéraire et tout à fait personnel?

- Le plus parisien des écrivains belges, où allez-vous chercher çà? J'ai écrit les 3/4 des 500 pages du "Pitre" à Cannes, à Avignon, à Venise, à Londres, à Munich, à Amsterdam, et "Macaire le Copte" dans une maison de campagne à Sologne. J'ai commencé de rédiger "Je suis écrivain" à Montréal. J'ai récemment vécu un an en Suisse. Cela dit, j'aime écrire à Paris, où vivent mes enfants et petits-enfants, et où sont mes éditeurs. Et puis c'est à Paris que je trouve tout ce dont j'ai besoin : l'amour, l'amitié, les restaurants, le musée du Louvre, le centre Pompidou, les centres culturels du monde entier ou presque, la Seine. Pour les restaurants, Bruxelles n'est pas mal non plus. Pour l'amour aussi, j'imagine. Mais l'adjectif "parisien" ne me plaît pas. Quant à "écrivain belge", c'est un autre dossier, vous en conviendrez... Elu en mars 2009, je serai reçu le 16 juin 2011 à l'Académie française. C'est un peu long, mais de prestigieux confrères ont attendu aussi longtemps, René Clair et Edmond Rostand. Ce fut long parce que l'Académie devait recevoir quatre ou cinq académiciens élus avant moi. Dans un geste à la fois sentimental et réfléchi, je reprendrai l'épée de mon ami Maurice Béjart qui fut membre de l'Académie des Beaux-Arts. Je préfère que cette épée continue de vivre plutôt que de m'en faire faire une, avec de prétendus symboles de ce qu'on appellerait mon oeuvre. J'ai fait graver les lettres de l'aphabet qui est après tout mon premier instrument de travail! La mort de Maurice vint mettre fin à plus de 40 ans d'une amitié sans disputes. J'ai eu en 2007 le douloureux honneur d'organiser ses funérailles. Elles eurent lieu dans un théâtre plutôt que dans une église".

mercredi 6 juillet 2011

Interview croisée d'Edmée De Xhavée et Nicole Versailles

Petit Belge : Avant de faire publier votre premier livre, vous avez toutes les deux créé un blog et choisi un pseudonyme. Pourquoi avez-vous fait ces deux choix et qu'est-ce que cela vous a apporté?

Edmée : Quand j'étais petite, je jouais à être une (merveilleuse) princesse adorée de tous mais d'une sauvagerie assez impressionnante (je grimpais aux arbres, me battais à l'épée et avais une chevelure avec laquelle j'aurais pu étrangler plus d'un impoli). Mais j'avais un grain de beauté sur le bras qui, lorsque je le voyais au cours de mon jeu, me rappelait cruellement que je n'étais "que" moi. Je me suis donc peut-être offert non pas la couronne d'une princesse, mais un second moi. Je me sens plus libre d'écrire sous un pseudonyme qui est un de mes prénoms de baptême et le nom d'une rue commerçante de ma ville natale, Verviers. Quant au blog, au départ, je l'ai fait pour présenter mon premier roman "Les Romanichels". Or ils ont mis si longtemps à être prêts qu'entretemps, je m'étais mise à parler de bien d'autres choses, et à me prendre au jeu. Maintenant, j'y tiens beaucoup et essaie de garder ma discipline autant que possible.

Nicole : Depuis toujours, j'aime écrire, j'ai rempli des cahiers entiers achetés tout neufs et de préférence tout rouges, de mes petites pensées personnelles. Tellement personnelles que tôt ou tard les cahiers se retrouvaient plongés dans les feux de joie de la cheminée...sous mes yeux nostalgiques de voir partir en fumée tant de mots dont je ne retrouverai plus jamais la trace. La peut d'être percée à jour par une indiscrétion commandait cet acte de destruction massive! C'est pour cette raison que l'anonymat de la toile me séduisait tellement : écrire sous les yeux du monde entier, tout en restant cachée de mon entourage... Quel paradoxe tentant! Et puis, il y avait la magie incroyable de voir affichés sur la fenêtre de mon ordinateur, accessibles à chacun, les mots que j'écrirais, mes mots à moi. Cela me semblait proprement fascinant! Je me prenais à rêver que moi aussi, je pourrais écrire de belles choses sur l'écran du monde entier, que je pourrais être lue par des dizaines de lecteurs que j'imaginais bien sûr intéressés et enthousiastes. Ecrire et être lue dans un même élan, je n'osais y penser, moi qui jusqu'alors n'avais confié qu'à mes tiroirs les plus secrets quelques mots inachevés. J'avais envie d'écrire et je me prenais à rêver qu'on me lise... Comme tant d'autres, je me suis donc peu à peu laissée séduire par l'idée exaltante de déposer dans le vaste monde du Net les traces indélébiles et passionnantes de ma vie, en réalité pas toujours si passionnante que çà et même parfois franchement quelconque. Mais qui sait? Ma vie prendrait peut-être un autre relief si elle s'affichait sur l'écran de cet ordinateur qui décidément prenait de plus en plus de place dans ma vie... Le pseudo choisi sur un coup de coeur pour sa musicalité était obligatoire, l'anonymat était à ce prix.

Petit Belge : Nicole en a déjà parlé dans la première question, mais vos romans et les textes de vos blogs sont en partie autobiographiques?

Nicole : En ce qui concerne mes livres, "Tout d'un blog" et mon récit de vie "L'enfant à l'endroit, l'enfant à l'envers" racontent beaucoup de moi, bien sûr... Même chose en ce qui concerne mon blog, qui sont des billets d'humeur à propos du quotidien, de la vie : c'est du personnel qui peut rencontrer le vécu des autres. Mon recueil de nouvelles raconte des histoires de fiction. J'ai voulu sortir de la facette "personnelle", récit de vie, faire autre chose...inventer des personnages et les aventures qu'ils vivent, j'ai aimé çà!

Edmée : Comme Nicole, le premier roman contient beaucoup d'éléments personnels réels, mêlés à de la fiction parce qu'il ne s'agit pas du tout d'une histoire vraie (je me souviens d'un ami français qui, horrifié, y a tellement cru qu'il m'a dit : "mais comment as-tu pu abandonner ton enfant???"). Le second aussi, mais avec plus de fiction. Le troisième sera un recueil de nouvelles où je pense que seuls les éléments de décor ou de mise en scène sont parfois réels, ou un personnage secondaire. Le blog, c'est personnel oui, mais je ne cherche pas à en faire un journal ou une sorte d'autobiographie. Ce sont les choses qui m'ont marquée, ont accroché ma curiosité, et que je cherche à partager.

Petit Belge : La famille, ses secrets et ses dessous de table, ainsi que la relation mère-fille sont présents dans vos ouvrages respectifs?

Edmée : Toute famille a des secrets, tout cercle social en a. Les secrets sont les tabous que l'on a enfreint, et donc forcément, les maisons sont tapissées de secrets. Ca me fascine, d'autant plus que, finalement, les gens sont de fameux comédiens! Quant à la relation mère-fille, je la trouve toujours intriguante aussi. Après tout, une mère est une mère au sortir de notre regard, nous ses enfants, mais elle est une jeune femme dans le sien propre - heureuse ou déjà lasse de ce que la vie pouvait lui offrir - et une fille inexperte dans le regard de ses parents. Elle peut aussi être une amante exceptionnelle ou une épouse trop conventionnelle aux yeux de son époux. Mais elle n'est la mère que pour ses enfants, et son rôle peut lui plaire ou pas, l'user, la ravir, l'amuser parce qu'elle confie les enfants à des nannies et offre un baiser parfumé du soir, la tuer parce qu'elle est seule et n'en sort pas. Ce sont des relations difficiles et qui ne trouvent leur plénitude, je pense, que sur la longue durée, la longue attente, la longue patience.

Nicole : La famille, ses failles, ses douleurs, son manque de dialogue sont évoqués surtout dans mon livre "L'enfant à l'endroit, l'enfant à l'envers"...mais aussi sous forme de fiction dans mes nouvelles. Dans mon récit de vie, j'ai tenté d'explorer quelque peu toutes ces failles, à travers les visages de trois générations de femmes. J'ai voulu aussi retrouver mes souvenirs d'enfant, ceux qui s'obstinaient à se cacher dans ma mémoire sélective. Je l'ai fait pour que mes enfants puissent avoir accès à leur histoire et puissent à leur tour la transmettre plus librement à leurs enfants. Quant à la relation mère-fille, elle n'a pas été simple pour moi, ce fut le berceau de beaucoup d'incompréhensions. L'amour et la haine s'y sont côtoyés bien souvent. J'ai voulu croire jusqu'au bout que l'amour pouvait triompher de tout par le dialogue et qu'il n'y a aucune malédiction d'incompréhension définitive. Je crois fermement que, quel que soit le passé, le futur reste sans cesse à construire et qu'il est dans nos mains!

Petit Belge : Vous dénoncez toutes les deux l'hypocrisie et les conventions de certains milieux, liées notamment à la religion et au "qu'en dira-t-on?". Etes-vous la rebelle de votre famille?

Edmée : Je suis certainement la rebelle, mais je ne me voyais pas comme telle. On me regardait un peu comme celle qui ne comprenait rien, la cigale impénitente, et on me sérinait "pierre qui roule n'amasse pas mousse"... C'est vrai que je n'ai pas de mousse, mais peut-être suis-je une pierre brute? Et je ne suis ni anti-religion, ni anti-famille, et je reconnais la nécessité des conventions aussi. Mais tout est dans la mesure, car souvent, c'est le fait de cacher les choses pour ne pas faire de mal aux enfants, à une épouse, à un groupe humain qui fera le plus grand désastre en fin de compte car le secret viendra au jour quand même, mais à la manière d'une bombe.

Nicole : Non, je ne suis une rebelle. Je suis juste une femme en quête de vérité. S'il me faut dire quelque chose (principalement par l'écriture), je tente de le dire tant dans le respect de l'autre que dans la fidélité à moi-même. Je suis bien plus encore une femme en quête d'amour (aussi bien donné que reçu), sans doute idéaliste à ce niveau... Je suis capable de me taire, de prendre sur moi, pour ne pas blesser l'autre...et de continuer seule au profond de moi-même mon chemin d'humanité. C'est aussi pour cette raison que j'aime écrire : il m'est donné l'occasion de m'exprimer de manière non-violente. Maintenant, dans ma fratrie, je suis considérée comme un peu "à part"...

Petit Belge : Autre ressemblance entre vos écrits : les femmes y sont très présentes et les hommes sont souvent à l'arrière-plan. Est-ce un choix ou un hasard?

Edmée : Ma vie m'a portée à construire autour de moi un mur de femmes. A savourer la force et la présence des femmes. Parce que les hommes furent, en fait, peu présents...en tout cas positivement présents. J'ai grandi dans un monde de femmes : ma mère (divorcée), sa mère (séparée), la gouvernante (une vieille demoiselle malgré de nombreux prétendants), des tantes veuves ou divorcées, des amies de ma mère célibataires ou "plantées là"... L'homme semblait ne faire que de brèves apparitions et disparaître.

Nicole : Difficile de répondre à cette question. Je répondrais spontanément que c'est un hasard, mais ce genre de hasard n'existe pas vraiment... J'aime me glisser dans la peau des femmes, essayer de mieux les comprendre, essayer de savoir ce qu'elles peuvent vivre. Mais je suis tout aussi intriguée par le monde masculin, il me fascine tout autant. Alors hasard sans doute... En tout cas, ce ne fut pas un choix délibéré. J'aime beaucoup les hommes (rires)!

Petit Belge : Quelles difficultés et quelles bonnes surprises avez-vous rencontrées pour faire connaître vos livres et votre blog?

Nicole : Je n'ai pas cherché à faire connaître mon blog. J'étais au début une simple anonyme qui écrivait simplement sur la vaste toile. Mais très vite les lecteurs sont venus... Cela m'a surprise... Il semblait qu'on aimait me lire, je n'en revenais pas mais c'était du bonheur. Ecrire et avoir cette chance d'être lue, que demander de plus? Mes lecteurs sur mon blog sont bien plus nombreux que les lecteurs de mes livres... Et la surprise la plus merveilleuse, c'est que mes livres se sont fait connaître en priorité grâce à mes amis blogueurs. C'est mon meilleur réseau!

Edmée : Les bonnes surprises ont été l'aide de gens, comme toi Petit Belge, qui ont fait que mon blog a bien démarré et avec lui l'annonce faite au bon peuple de la sortie de mon livre, ce qui a duré plus d'un an. J'ai donc eu des fidèles du blog qui ont acheté le livre. Maintenant, les éditions Chloé des Lys ne font pas de promotion ou presque, c'est donc à l'auteur de se débrouiller. Un petit noyau d'auteurs se soutient et s'entraide, ce qui assure une bonne relation sans rivalité et des échanges d'idées. Un auteur m'a, par exemple, mis une vidéo promotionnelle sur youtube, et je viens d'avoir une interview de Bob Boutique - autre auteur - qui vient de passer dans l'émission Actu TV de juin 2011. Je vais participer un peu plus à des événements littéraires, maintenant que je suis en Belgique. J'espère donc que çà aidera...

Petit Belge : Quels sont vos projets littéraires?

Nicole : Une publication des billets les plus commentés des Petites Paroles de Coumarine (très bientôt). Une publication collective d'ici la fin de l'année, dont je ne peux encore rien dire. Et puis d'autres choses en chantier...mais je préfère ne pas dévoiler ce genre de projet tant qu'ils ne se trouvent pas finalisés. J'en profite pour annoncer que le 7 septembre à 9h30, je serai interviewée dans les locaux de la Sabam dont je fais partie (dans le cadre des Mercredis du Livre). Et que le 16 octobre, je participe en tant qu'auteure au "Curieux dimanche" à la bib. Sésame à Schaerbeek (interview et dédicaces vers 13h, les détails suivront). Ces deux interviews concernent les "Dessous de table", éditions Mémory Press, 2010.

Edmée : Là pour le moment, je laisse un peu de place et d'espace à "De l'autre côté de la rivière, Sibylla". Et je pense sortir, l'année prochaine, un recueil de nouvelles (chic, diront certains, moins de personnages!) d'amour et de mals d'amour... Mais pour entretenir la forme, je compte aussi continuer à faire les petits concours littéraires qui passent, ne serait-ce que parce que c'est chaque fois un défi qui me stimule et m'évite de penser que "çà, c'est pas pour moi!".

Petit Belge : Quel regard porterz-vous sur cette interview croisée, et sur le travail et l'écriture l'une de l'autre?

Edmée : Je dois dire que j'aime énormément ce que fait Coumarine. Je visite moins son blog - je visite moins tous les blogs - parce que j'ai moins de temps, mais je le garde, avec quelques autres, "pour la bonne bouche". J'ai lu deux de ses livres avec fascination et, sans vouloir me comparer à elle, quelque part je me reconnais en elle sur bien des points. On a, je pense, le même regard sur les choses, bien qu'elle me paraisse plus sage que moi (dans le bon sens!). Coumarine, pour moi, est une dame! Son écriture est belle, profonde, sans langue de bois et sans vulgarité. J'aime beaucoup, beaucoup !!!

Nicole : Je n'ai lu que le premier roman d'Edmée qui m'a un peu déroutée par l'abondance des personnages et la complexité de son intrigue. C'est le genre de livre qu'il faut lire d'une traite, sous peine de perdre le fil de l'histoire. Edmée écrit de manière ample, avec une grande richesse de vocabulaire. Cette écriture ample et recherchée, apparaît aussi sur son blog et suscite souvent l'admiration de ses lecteurs. Edmée écrit moins sur son blog que moi, ce qui me permet quant à moi, de la lire régulièrement. Quant à cette interview croisée, j'ai trouvé l'idée originale et intéressante : Edmée et moi, nous nous ressemblons pas mal, nous sommes contemporaines, nous écrivons et publions depuis peu, et nous tenons un blog à visée plutôt littéraire. D'autre part, la place de la femme, chez elle comme chez moi, est prédominante, et cependant nous ne sommes ni l'une, ni l'autre des "féministes". N'ayant pas lu toutes ses réponses, ce sera donc une (belle) surprise de découvrir l'ensemble de l'interview... Merci Petit Belge de nous avoir permis cette confrontation amicale.

mardi 28 juin 2011

Nouveau roman de Georges Roland

L'écrivain bruxellois Georges Roland vient de sortir son nouveau roman "Le coup du clerc François" , disponible chez son éditeur Chloé des Lys et sur la librairie Chapitre.com. Il raconte l'histoire du moine copiste François qui se voit confier par les instances de Rome la mission de réécrire le lai d'une abbesse en version expurgée, conforme aux directives papales, et signé du pseudo Chrétien de Troyes. Mais le moine, facétieux et rebelle, décide de relater in extenso la vie réelle de Marie à la Cour de la reine Eléonore, souveraine de la province. Ce petit royaume est coincé entre le sud capitaliste et le nord marxiste. Les puissants monarques ont décidé de marier Eléonore à leur champion respectif pour s'approprier le contrôle de la province. Mais la reine Eléonore se préoccupe bien plus des arts et des préceptes de son chapelain. Ecrit avec ironie et dérision, le récit est émaillé d'une galerie de portraits.

jeudi 23 juin 2011

Récompenses et bourses 2011

Commençons par le plus prestigieux honneur : François Weyergans (Prix Goncourt 2005 pour "Trois jours chez ma mère") vient de devenir le premier écrivain belge reçu à l'Académie française!

Prix triennal de poésie de la communauté française (8.000 euros) : Vincent Tholomé pour son recueil "The John Cage Experiences", paru aux éditions Le Clou dans le Fer.

Prix du premier roman de la communauté française (5.000 euros) : Christophe Ghislain pour son roman "La colère du rhinocéros", paru aux éditions Belfond.

Prix du rayonnement des Lettres à l'étranger de la communauté française (4.000 euros) : Susan Bainbrigge, professeur à l'Université d'Edimbourg, qui consacre une partie importante de ses cours et de ses recherches à la littérature belge de langue française. Elle a publié le livre "Culture and Identity in Belgian Francophone Writting", a organisé un colloque sur Amélie Nothomb, a écrit des articles sur Jacqueline Harpman, Nicole Malinconi, Pierre Mertens et Suzanne Lilar.

Bourse d'appoint (3.000 euros) de la communauté française : Claire Gatineau, Anna Stelkowicz, Henry Bauchau, Laurent Ancion et Manuel Antonio Pereira l'ont obtenue pour supporter les frais entraînés par la rédaction d'un ouvrage.

Bourse de découverte (3.500 euros) de la communauté française : Salomé Mulongo, Cécile Cozzolino, Vincent Flamand et Caroline Valentiny l'ont reçue pour la publication de leur premier livre.

Bourse de création (9.000 euros) de la communauté française : Alain Bertrand, Kenan Görgün, Raoul Vaneigem, Antoine Wouters, Françoise Villers, Maurice Tazman, André-Marcel Adamek, Daniel Arnaut, Daniel Fano, Evelyne Jacobs, Karel Logist, Jack Keguenne, Francis Dannemark et Alain Cofino-Gomez l'ont obtenue comme revenu de remplacement. L'auteur doit s'engager à prendre un congé de trois mois pour se consacrer à l'écriture, et ne pas bénéficier de revenus professionnels pendant cette période.

Bourse d'année sabbatique (25.000 euros) de la communauté française : elle s'adresse à un auteur dont la notoriété est reconnue, et ne peut être obtenue qu'une seule fois. Il faut être âgé d'au moins quarante ans, avoir déjà publié trois ouvrages et soumettre un projet éditorial d'envergure. Cette bourse a été attribuée à François Emmanuel.

Bourse de résidence d'auteur (1.500 euros par mois) de la communauté française : André Doms (à Rome), Nicolas Ancion (à Montréal), Dominique Loreau (à Rome), Stéphane Lambert (à Rome), Nicole Malinconi (à Rome), Werner Lambersy (à Rome) et Stéphane Oertli (Résidence Maison Mainon) l'ont obtenue pour leur séjour d'un ou deux mois dans un lieu mis à leur disposition par la communauté française.

Pour obtenir une de ces bourses, vous devez contacter le Service de Promotion des Lettres - Commission des Lettres -44, boulevard Léopold II - 1080 Bruxelles.

mardi 14 juin 2011

"De l'autre côté de la rivière, Sibylla" (Edmée De Xhavée)

Le roman commence par l'inauguration de "Sibylla", le nouveau restaurant à Verviers d'Emma et Jean. Le frère et la soeur rendent ainsi hommage à leur ancienne gouvernante. Après le décès de leur mère Pauline Depage, la garde avait été accordée à leur riche famille maternelle au détriment de leur père Félix Lemarchand. Les deux enfants sont confiés à leur tante célibataire Marie qui engage Sibylla. Cette dernière les protège des mesquineries et des méchancetés du clan Depage qui n'a jamais accepté l'amour de Pauline pour Félix. Au fil du roman, Sibylla se remmémore l'enfance, l'adolescence et les relations d'Emma et Jean qui s'affranchissent peu à peu de leur famille maternelle et reprennent contact avec leur père. Leur vie sentimentale ne sera pas ensuite un long fleuve tranquille, mais ils peuvent toujours compter sur Sibylla pour se confier. Et c'est au moment où ils trouvent la sérénité que celle-ci passe de l'autre côté de la rivière...

"Les Romanichels" (son premier roman paru en 2009) et "De l'autre côté de la rivière, Sibylla" sont tous deux bien écrits, racontent des histoires de familles, et se terminent sur une note positive. Ils montrent comment la jeune génération s'est affranchie des conventions et de l'hypocrisie qui régnaient dans certaines couches sociales, afin de mener leur vie comme elle l'entend. Personnellement, j'ai une préférence pour ce deuxième roman par rapport aux "Romanichels".

lundi 6 juin 2011

Nouveau livre de Philippe Desterbecq

Les Editions Chloé des Lys vont prochainement publier le nouveau livre de l'auteur belge Philippe Desterbecq. Afin de vous faire patienter, voici une interview qu'il vient d'accorder : www.passion-creatrice.com/article-philippe-desterbecq-74131431.html