mercredi 16 octobre 2024

Tom Lanoye (Prix des Lettres Néerlandaises 2024)


Le Prix des Lettres Néerlandaises est la plus importante récompense littéraire néerlandophone. Elle est remise tous les trois ans, alternativement en Belgique et aux Pays-Bas par le souverain. Pour cette année 2024, le roi Philippe a remis le Prix des Lettres Néerlandaises 2024 au Belge Tom Lanoye.

Né en 1958 à Saint-Nicolas, Tom Lanoye est un poète, romancier et scénariste belge. Ses livres sont traduits en français :  https://ecrivainsbelges.blogspot.com/2011/01/tom-lanoye-enfin-traduit-en-francais.html

C'est aussi un homme engagé, comme je vous en avais parlé dans cet article :   https://journalpetitbelge.blogspot.com/2012/10/tom-lanoye-un-ecrivain-belge-engage.html

mercredi 14 août 2024

La librairie "Oxygène" à Neufchâteau

La revue "Le Carnet et les Instants" a la bonne idée de mettre en avant les librairies indépendantes de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Cette fois, elle s'intéresse à Guy Pierrard qui a transformé l'ancien garage Fiat de son père en une libraire "Oxygène", inaugurée en 1999 :

"Les quotidiens et les magazines sont complémentaires. Les revues d'histoire ou de géographie comme "Géo" ou "National Geographic" sont pratiquement des livres. Ils sont aussi éditeurs. Si je prends un domaine qui m'intéresse beaucoup, il y a les revues d'histoire :  "39-45", "Normandie", "Ligne de feu, ligne de front", "Moyen Age", "Diplomatie", etc. Il y a aussi tous les hors-séries, par exemple du Monde. Cela m'a permis d'attirer un public qu'un libraire pur n'a pas. Je vends plus de "Monde diplomatique" que "France Dimanche" ou "Ici Paris" parce que je pense que beaucoup de personnes ne s'attendent pas à trouver de la presse ici.

On propose un peu de tout. J'aime l'histoire, je vends donc probablement un peu plus de récits historiques. La littérature représente un tiers des ventes, avec une poussée récente du policier. Autre rayon important : celui consacré au livre de poche, une section de plus en plus prisée, sans oublier celui réservé à la BD et à la littérature jeunesse qui compte pour un quart du chiffre d'affaires. J'ai également organisé par trois fois une foire bisannuelle du livre de poche : certains rencontres, surtout celles autour du développement personnel, rassemblaient jusqu'à 400 personnes, ce qui pour n'est pas mal du tout pour Neufchâteau.

En général, j'essaie d'avoir les nouveautés d'écrivains belges comme Paul Colize, Barbara Abel, Armel Job évidemment qui est de la région, comme Patricia Hespel qu'une lectrice m'a fait découvrir. Et les éditions Weyrich de Neufchâteau :  les gens s'identifient à ce qu'ils proposent comme beaux livres sur la nature ou les livres sur la guerre qui intéressent notre public". 

Plus d'infos :    Oxygène - 26, rue Saint-Roch à Neufchâteau - 061/ 27. 15. 12

mercredi 24 juillet 2024

La librairie "La traversée" à Verviers

Bernard Quickels, le responsable de la librairie "La traversée" à Verviers, s'est confié à la revue "Le Carnet et les Instants" de la Fédération Wallonie-Bruxelles : 

"J'ai toujours aimé lire. Chez mes parents, il y avait en permanence des livres à disposition, divers et variés, même si je n'ai jamais été forcé de lire. J'ai dévoré les bandes dessinées de Johan et Pirlouit, les Astérix. Pendant une quinzaine d'années, j'ai travaillé dans plusieurs librairies où j'ai découvert tous les aspects du métier :  la vente au comptoir, le conseil aux clients, les relations avec les bibliothèques, la réception des marchandises, les factures, ... Cela m'a donné un gros bagage. J'ai aussi gagné la confiance des fournisseurs, car certains se montrent frileux avec un libraire qui sort de nulle part. 

Le nom "La traversée" est venu d'un brainstorming avec ma femme. Il nous est apparu que lire un livre, c'est comme une croisière entre deux continents, une traversée des mers entre deux cultures, une manière de créer des ponts. J'associe aussi la lecture à l'idée de lenteur, ce qui fait du bien dans notre monde actuel. Finalement, "traversée" est un terme assez bateau, c'est le cas de le dire, un terme générique derrière lequel on peut mettre tout ce que l'on veut. C'est poétique et j'aime sa sonorité. 

Après un an, j'ai engagé un employé. Après deux ans, j'en avais deux et aujourd'hui, j'ai six collaborateurs. Je suis assez fier d'avoir ainsi créé de l'emploi. Les gens ressentent votre passion. Commencer petit, suivre de près les commandes des clients, gagner la confiance de ses fournisseurs en les payant à temps, être très présent sur les réseaux sociaux pour aller chercher les gens où ils sont, bien s'intégrer dans la ville où l'on s'installe, par exemple en mettant en avant les auteurs locaux ou en répondant aux demandes de sponsors. A Verviers, j'ai la chance de ne pas avoir de librairie en périphérie, comme les "Club", des chaînes où les choix des livres est dicté par une centrale d'achats. 

Je mets en vente ce que je veux, même si je dois contenter un très large public. Celui de Verviers est assez cultivé, très au fait des critiques littéraires dans la presse, en radio et à la télé. Verviers a toujours été une ville culturelle. Elle a été le siège des éditions Marabout. Plusieurs auteurs de bandes dessinées y sont nés ou y ont vécu. Il y a aussi le théâtre et un conservatoire réputé. Verviers est la petite soeur de Liège, ville universitaire dont plusieurs enseignants vivent dans la région et viennent se fournir ici. Il y a chez nous une attirance naturelle pour le livre. Il y a toujours eu au moins deux librairies dans la cité.

On n'a pas vraiment de spécialité, j'essaie de développer tous les rayons. Notre fer de lance, c'est la littérature en général, les romans policiers, de science-fiction, etc. Quand on me présente un beau livre d'archéologie, sur l'Egypte en particulier, je le prends. Vendre un bouquin pointu représente un beau défi et me donne un sentiment de grande fierté. Et de joie : on aurait envie d'embrasser le client !

Je ne peux pas dire que je mets la littérature belge plus en avant que d'autres. Je n'ai ni table, ni étagère d'auteurs belges. Ce n'est pas un combat pour moi. Pourtant, j'en lis. Je n'ai pas vraiment de demandes non plus. En juillet, une de mes collègues a mis en avant dix livres belges sur nos réseaux sociaux. Nous en avons un certain pourcentage dans notre stock. Comme la librairie est toujours en mouvement et en pleine expansion, rien ne dit que dans un futur proche, je ne mettrai pas davantage en avant ces livres.

Nous essayons d'accueillir le plus d'auteurs possible. Nous recevons beaucoup de demandes, mais je ne peux pas accueillir tout le monde, même si c'est très dur de dire non. J'ai la chance de pouvoir choisir ceux que j'ai envie de mettre en avant :  Julia Deck, Hugues Dayez, France Brel, Philippe Saive, Thomas Gunzig, Guy Delhasse, etc". 

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mercredi 10 juillet 2024

Vincent Engel et la collection Espace Nord

                                     


L'an dernier, à l'occasion des 40 ans de la collection Espace Nord, son ancien directeur Vincent Engel s'est confié à la revue "Le Carnet et les Instants" de la Fédération Wallonie-Bruxelles :

"Ma rencontre avec la collection Espace Nord est intimement liée à son fondateur Marc Quaghebeur. On m'avait dépeint l'homme comme un tyran dont il fallait se garder. En tout cas, ne jamais rien lui demander, ne jamais rien lui devoir. Alors que j'étais jeune assistant en romanes, je reçois un appel de Marc Quaghebeur. Qui me dit :  "Vous connaissez la collection Espace Nord, Werner Lambersy et son Maître et Maisons de thé ? J'aimerais que vous en fassiez la lecture".  Je ne connaissais aucun des trois, je ne savais pas que Werner était poète, mais j'ai accepté. Marc et Werner sont devenus des amis, et moi qui ai toujours détesté analyser de la poésie, je me suis attaqué à ce chef d'oeuvre et m'en suis tiré pas trop mal, j'espère. 

Lors de notre première rencontre "en présentiel" comme on ne disait pas à l'époque, dans ses bureaux des galeries Ravenstein, Marc m'a ouvert des armoires pleines de volumes (la collection devait compter une cinquantaine de titres à l'époque) et je suis reparti avec une série d'entre eux, ravi. Car dès le départ, une des forces de la collection a été le soin et la beauté de la maquette de couverture, laquelle a su évoluer sans perdre cette excellence. 

Bien des années plus tard, j'ai eu la chance de diriger la collection. J'en ai profité pour y inscrire des titres patrimoniaux que le précédent comité avait toujours rejetés, au premier rang desquels "Jours de solitude" d'Octave Pirmez, dont l'absence me paraissait injustifiable quand les premiers auteurs belges s'étaient revendiqués de De Coster et de Pirmez (déjà dans un souci de parité Flandre-Wallonie). Mais aussi Julos Beaucarne, une anthologie de la nouvelle (outil pédagogique de premier ordre) et de la poésie. 

Même si la transition avec le nouveau comité ne s'est pas faite de manière très élégante, je reste attaché à cette collection assez unique en son genre, qui maintient un haut niveau d'exigence et de qualité, en rencontrant une double mission (pédagogique et patrimoniale).   Vincent Engel".

Pour plus d'infos :

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mercredi 26 juin 2024

La librairie "La Page d'Après" (Louvain-la-Neuve)

Suite à la faillite de la librairie française "Le Furet du Nord" en 2022, le manque d'une librairie indépendante se faisait sentir dans la ville universitaire de Louvain-la-Neuve. En 2023, Floriane Vreuls et Pierre-Yves Millet ont donc ouvert la librairie "La Page d'Après". Plus d'infos :wwww.lapagedapres.be

Originaire du Brabant wallon, Pierre-Yves Millet s'est confié à la revue "Le Carnet et les Instants" de la Fédération Wallonie-Bruxelles :

"En ce qui me concerne, j'ai été journaliste pendant 21 ans à la RTBF. Diplômé en langues et littératures romanes puis en communication de l'UCL également, je me suis lancé avec bonheur dans le journalisme, tout en me disant que je reviendrais un jour à mes premiers amours :  le monde du livre et de la littérature. Basé à la rédaction de Namur, j'ai passé beaucoup de temps à la librairie voisine Papyrus, créée par une amie qui m'a transmis son goût du métier.

Finalement, une opportunité s'est présentée, grâce à l'UCL qui voulait absolument retrouver une librairie indépendante à Louvain-la-Neuve et était prête à apporter son soutien. J'ai alors discuté avec Floriane qui est une amie depuis dix ans et on s'est lancés dans l'aventure. Floriane avait une idée précise de la tonalité qu'elle voulait donner au lieu. Elle a été visionnaire en imaginant un espace zen, avec du blanc, du bois, du vert. On en a discuté avec le menuisier et l'architecte d'intérieur qui ont conçu une librairie où les gens se sentent comme chez eux. 

Ce qu'on souhaite proposer, c'est d'abord une ambiance, un accueil. Tout le monde a accès à tous les livres, peut les regarder, les manipuler, s'asseoir pour les parcourir. En plus de l'accueil, de la bienveillance, du conseil, j'aime que la librairie soit un lieu de flânerie, calme et paisible. Que le client ait envie de prendre le temps de regarder les tables, de feuilleter les livres. La librairie est de plain-pied avec une porte à double battant. On a laissé de l'espace entre les rayons. Les meubles sont assez bas. On a aussi enlevé les faux plafonds pour donner de l'air aux 200 mètres carrés. Il n'y a pas de rayonnages centraux qui viendraient couper la vue.

Venant tous les deux de la fonction publique, nous avons dû apprendre à la fois comment créer et gérer une société commerciale et comment développer une librairie indépendante. Il fallait identifier une situation idéale, visible et accessible, avoir un loyer soutenable, établir un bon plan financier (on a calculé qu'il faudrait vendre 150 à 220 livres par jour en tenant compte d'un prix moyen pour être rentable) et s'entourer de vrais libraires. Dès que notre projet a été connu, nous avons reçu énormément de candidatures spontanées. C'est un métier qui attire. Nous avons engagé trois libraires avec une expérience, et nous avons appris le métier sur le terrain grâce à elles. 

Nous cherchons à donner une coloration à l'ensemble, et les choix s'affinent au fil du temps, en fonction des demandes et des suggestions du public, singulièrement dans les sciences humaines ou en politique, en philosophie, en développement personnel, il y a toute une gamme de possibilités entre le tout-public et le super spécialisé. La librairie évolue aussi en fonction des problématiques de société. On pressentait une attente forte. Nombre de personnes viennent encore nous dire merci pour notre initiative. Même si d'autres clients ont pris de nouvelles habitudes comme se rendre à la Fnac ou chez Claudine à Wavre et chez Twist à Ottignies. Mais on est convaincus qu'il y a de la place pour trois librairies indépendantes dans la région. 

Les collaborations sont presque illimitées... La Maison du développement durable a créé un escape game dans la ville auquel nous participons. Il y a aussi les possibilités offertes par la proximité avec l'université. Nous sommes à son écoute : si les professeurs ont des envies de collaborations, d'inviter des auteurs abordés dans les cours, en littérature par exemple, nous pouvons organiser des rencontres dans la librairie ou relayer les ouvrages des docteur honoris causa comme Bernard Foccroulle. Nous avons également des rapports étroits avec la maison d'édition Academia de Louvain-la-Neuve. C'est ainsi que nous avons organisé un speed dating entre quatre responsables de la maison et des candidats écrivains venus faire le pitch de leur projet. C'était super !".  

mercredi 12 juin 2024

Les 40 ans d'Espace Nord (1983-2023)

 A l'occasion des 40 ans d'Espace Nord, la revue "Le Carnet et les Instants" (éditée par le Service de Promotion des Lettres de la Fédération Wallonie-Bruxelles) a consacré un hors série à cette collection belge. Voici l'éditorial de ce hors série :

"Espace Nord a quarante ans. En Belgique francophone, une collection dédiée aux classiques de notre littérature n'a pourtant rien d'une évidence. Les Lettres belges, passées ou contemporaines, sont en effet peu abordées à l'école et peu représentées dans les médias et les librairies, auprès desquels les petites structures, caractéristiques de l'édition littéraire en Wallonie et à Bruxelles, peinent à conquérir de la visibilité face aux grosses machines éditoriales.

Patrimonialiser la littérature belge, c'est toutefois la ligne à laquelle se tient Espace Nord depuis quatre décennies. Certes, elle n'est pas la première (Jacques Antoine s'y était essayé dès 1976 avec Passé Présent), ni la seule collection à oeuvrer dans ce domaine. Elle se singularise cependant par son format de poche, qui va de pair avec un prix modique, gage d'accessibilité. Cette approche démocratique s'est accompagnée, tout au long de l'histoire de la collection, d'une attention spécifique au public scolaire. 

Espace Nord se signale aussi par son souci de la littérature d'aujourd'hui. A côté des Maeterlinck, Verhaeren, Simenon et Gevers, elle publie des oeuvres contemporaines, d'auteurs vivants, et réalise ainsi un audacieux et nécessaire travail de discernement et de classification, cherchant à désigner, dans le flux continu des publications de tous les genres et au-delà des modes, des oeuvres qui resteront.

Autre trait particulier :  la collection est la propriété des pouvoirs publics, en l'occurence la Fédération Wallonie-Bruxelles, qui l'a rachetée en 2011. Cette entrée dans le giron communautaire lui confère un statut sans guère d'équivalent dans le monde francophone et a contribué à sa longévité.

Une histoire de quarante ans qui n'a pas été sans remous :  créée par les éditions Labor, Espace Nord est ensuite passée chez Luc Pire puis chez Renaissance du Livre avant, donc, d'être rachetée par la Fédération Wallonie-Bruxelles, qui en a délégué, par marché public, la gestion aux Impressions Nouvelles".

Laura Delaye et Nausicaa Dewez 

Le témoignage de Marc Quaghebeur (conseiller littéraire du ministère lors de la création) :

"L'invention d'une collection de poche patrimoniale fut moins aisé que je ne l'avais cru alors qu'elle me paraissait aller de soi. Les difficultés rencontrés sont révélatrices de la situation dans laquelle se trouvait le corpus belge francophone avant la proclamation de la belgitude. Non seulement, les classiques étaient devenus le privilège des bouquinistes mais cette littérature, frappée de quasi inanité symbolique. Le lourd processus de réédition de deux titres par an, décidés par le conseil culturel de la Communauté Française, n'y pouvait rien.

Contactés successivement, et bien que l'opération ne leur fit courir aucun risque, Casterman, Duculot et Complexe se récusent en arguant de l'inévitable échec d'un tel projet, le dernier considérant que mis à part Maeterlinck, rien dans le corpus belge ne méritait réédition. Jacques Antoine, lui, voyait dans le poche une quasi insulte à la littérature, sa collection Passé Présent, lancée en 1976, constituant sa concession maximale au commercial.

Chez Labor, Alexandre André, promoteur avant 1940 d'une collection bon marché de classiques belges, éprouve lui aussi des réticences à l'égard du poche. Tout change à la suite de l'arrivée de Dominique Friart. C'est avec elle que je pose les bases de la collection Espace Nord. Daniel Blampain nous rejoint assez rapidement. C'est ensuite le tour de Jacques Dubois puis du premier comité (Jacques Carion, Paul Edmond, Jean-Marie Klinkenberg, Michel Otten). 

A l'automne 1983, le hall du palais des Beaux-Arts de Bruxelles accueille la présentation des huit premiers volumes (Simenon, Maeterlinck, Malva, Crommelynck, De Coster, Gevers, Nougé, Juin). La presse est unanime. Les 5.000 premiers exemplaires de plusieurs titres doivent rapidement connaître un nouveau tirage. 

Une conscience francophone accrue accompagne le processus. L'amorce d'une collection francophone avec les éditions L'Age d'Homme, créatrices des poches de la Suisse romande, n'aboutit pas. A Strasbourg, en 1989, je propose le projet à Hubert Nyssen. Certains titres d'Espace Nord constituent les premiers titres de la collection Babel. Las, celle-ci devient très vite la collection de poche d'Actes Sud. La combat francophone n'est toujours pas gagné". 

mercredi 29 mai 2024

"Le passager d'Amercoeur" (Armel Job)

                                     

Ancien enseignant, ancien directeur d'école, Armel Job poursuit sa carrière d'auteur depuis une trentaine d'années et a été élu membre de l'Académie Royale de langue et de littérature françaises de Belgique. A l'occasion de la sortie de son nouveau roman "Le passager d'Amercoeur", Armel Job a répondu aux questions du Soir Mag :

"Quelle est la genèse de ce roman ?

- Cette histoire est inspirée par des souvenirs de jeunesse. Avec le temps qui passe, on réfléchit à ce qu'il s'est produit dans notre vie. J'ai repensé à quelqu'un que j'ai connu, dont je me suis inspiré pour créer le personnage de Momo. Je l'ai fréquenté un temps, puis on s'est perdu de vue. J'ai par la suite entendu des anecdotes à son sujet. Il est notamment décédé jeune dans des circonstances dramatiques. J'ai donc fait appel à une série de souvenirs pour composer les personnages de ce livre, qui est une fiction du début à la fin. J'ai ensuite construit un roman sur des thèmes qui m'intéressaient, comme une relation mère/fils possessive.

- L'amour d'une maman pour son enfant est particulièrement puissant. Mais à double tranchant ?

- Totalement. Momo est dévoré par l'amour excessif de sa mère. Sa vie s'est construite en opposition à cela, il est en révolte permanente. Mais c'est un amour dont il n'arrive pas à se dépêtrer, car il est fasciné par sa maman. Il est coincé au milieu de sentiments contradictoires. Tout ce qu'il fait est le résultat de l'ambiguïté vécue depuis son enfance. Il a subi des relations incestueuses et cela a des répercussions sur sa vie. Je trouvais intéressant d'aborder le thème des relations incestueuses d'une mère envers son fils, comme l'a étudié Boris Cyrulnik. Il n'existe pratiquement aucune plainte dans ces cas-là.

- On sent que la psychologie de vos personnages est primordiale ?

- C'est essentiel en effet. Mon travail consiste à comprendre comment les gens réagissent aux différentes situations qu'ils vivent. Dans mes livres, je distille un peu d'intrigue policière, une technique pour retenir l'attention du lecteur. Mais ce qui compte vraiment, c'est essayer de comprendre comment chacun se débrouille avec la réalité. Comme par exemple un homme qui est sous l'emprise d'une femme. Je pense que le roman sert à cela, à montrer comment on interprète le réel avec les modestes moyens que nous avons à notre disposition.

- Que retirez-vous de l'écriture de ce roman ?

- L'occasion de réfléchir à ce que sont les êtres humains et le monde dans lequel nous vivons. La démarche du romancier est celle de la curiosité. Je m'interroge sur les autres en mettant en scène des personnages. J'espère, quand je livre le résultat de mes réflexions au lecteur, que celui-ci est également amené à se poser des questions. Un roman est réussi s'il permet au lecteur de s'interroger. Dans la vie, on est tenté de poser des jugements rapidement, on a rarement le loisir de réfléchir posément aux sujets abordés ou vécus par les autres. Le roman permet de le faire".

Cliquez ci-dessous sur "Job Armel" pour retrouver mes autres articles consacrés à cet auteur belge. 

mercredi 15 mai 2024

La Maison Maurice Carême à Anderlecht

                                     


Bonne nouvelle :  le gouvernement régional bruxellois a décidé de classer comme monument l'ancienne maison du poète belge Maurice Carême (1899-1978) et son jardin à Anderlecht. Cette maison à trois façades a été construite en 1933 selon les plans de l'architecte Charles Van Elst pour le poète. Maurice Carême et son père ont participé activement à sa construction. D'inspiration régionaliste, elle est réalisée dans un style évoquant les anciens béguinages (l'architecte Charles Van Elst est connu pour la restauration de la Maison d'Erasme et du béguinage d'Anderlecht).

Né en 1899 à Wavre, Maurice Carême était instituteur. Il a poursuivi en parallèle une carrière littéraire avec la publication de 80 ouvrages diffusés dans toute la francophonie et traduits en plusieurs langues. Deux écoles portent aujourd'hui son nom, et ses poèmes ont été étudiés par de nombreux écoliers. 

A la mort du poète en 1978, sa maison d'Anderlecht est conservée dans son état d'origine et transformée en musée. Pendant 40 ans, sa compagne Jeannine (décédée en 2020) va faire vivre sa mémoire en devenant présidente de la Fondation Maurice Carême, en veillant sur son oeuvre et sa maison, en répondant aux questions des journalistes, et en tenant chaque année un stand à la Foire du Livre de Bruxelles. 

                 

mercredi 1 mai 2024

Stéphane Lambert et les livres de poche

                            


L'écrivain belge Stéphane Lambert s'est confié à la revue "Le Carnet et les Instants" du Service de Promotion des Lettres de la Fédération Wallonie-Bruxelles :

"En 2014, c'était un coup de coeur de mon éditrice pour mon texte sur Rothko qui avait eu une vie très honorable en grand format aux Impressions Nouvelles. En publiant deux de mes textes simultanément, c'était une manière pour mon éditrice de sceller notre collaboration et d'appuyer la publication de l'inédit. C'était une bonne idée, car ces deux titres sont ceux de mes livres qui se vendent le mieux. Pour les autres titres en poche, ce furent chaque fois des rééditions de textes épuisé en grand format chez Arléa, s'ils se sont vendus raisonnablement bien. A deux reprises, j'ai publié directement un inédit en pochez chez Arléa.

La vie du format poche a une dynamique propre, qui est moins dépendante du diktat médiatique. Les lecteurs peuvent acheter sur un coup de tête un livre de poche, ce qui est moins vrai pour un livre grand format. Comme il s'agissait de deux livres sur des peintres (Monet et Spilliaert), c'était parfait pour les librairies dans les musées. Une actualité comme une importante exposition peut aussi accélérer ou justifier le passage ou la publication en poche d'un livre sur un peintre. L'économie du poche est aussi moins lourde.

D'ailleurs, en tant qu'auteur, on ne touche pas grand chose sur les poches, mais ils atteignent un nouveau public, les jeunes par exemple qui lisent principalement dans ce format. Cela donne la possibilité d'entrer dans le domaine scolaire. Et dans les salons littéraires, j'ai remarqué que le public achète aussi plus facilement des livres de poche. Le passage en poche met aussi à la disposition des lecteurs qui voudraient davantage me découvrir un bel ensemble de mes textes.

Je relis les épreuves. Cela permet de corriger les coquilles qu'on aurait repérées dans la précédente édition, de retoucher certains passages, voire d'actualiser certaines informations. Je suis également consulté pour le choix du visuel et la nouvelle quatrième de couverture.

Avec un marché si petit, dominé par l'édition française, à l'heure où la littérature occupe de moins en moins de place dans la société, si on veut vraiment faire exister une collection de poche dédiée aux écrivains belges, il faut qu'elle soit subventionnée. C'est une question de survie de notre patrimoine et de notre création littéraire". 

mercredi 17 avril 2024

Isabelle Bary et les livres de poche

                             


Isabelle Bary a répondu à trois questions de la revue "Le Carnet et les Instants" du Service de Promotion des Lettres de la Fédération Wallonie-Bruxelles :

"Votre premier roman, "Zebraska" (publié chez Luce Wilquin), est reparu six ans plus tard chez J'ai lu. Comment cela s'est-il passé ?

- "Zebraska" avait rencontré un vif succès en Belgique mais publié par une maison d'édition belge aux petits moyens, il avait peiné à se faire une place hors des frontières. Grâce à un agent français à qui le livre a plu, il a atterri chez une éditrice de J'ai lu, qui a proposé de le rééditer sans attendre une éventuelle nouveauté, mais sous forme inédite pour le marché français. Pour "Zebraska" qui aborde le sujet de la différence chez un adolescent à haut potentiel et celui du monde de demain, mon enthousiasme à le voir réédité en format poche était accompagné de l'idée de pouvoir, grâce à son petit prix, toucher plus facilement les jeunes par le biais des écoles. Ce qui a d'ailleurs été le cas, puisque j'ai rencontré des centaines de jeunes grâce au sujet, bien sûr, mais aussi aux avantages financiers du format. Cela donne au livre une seconde vie, au niveau non seulement national, mais aussi international, puisque les maisons d'édition françaises de format poche distribuent leurs romans dans toute la francophonie.

- Est-ce que vous avez été associée comme auteure à cette réédition ?

- Lorsque J'ai lu m'a proposé une collaboration, "Zebraska" avait déjà six ans et j'avais moi-même envie d'y apporter quelques changements, de le moderniser en quelque sorte. L'idée pour J'ai lu était d'atteindre un lectorat plus étendu (le marché français bien sûr) mais aussi des personnes qui n'avaient rien à voir avec le haut potentiel. Or, ma première version se passait essentiellement dans la tête de mon héros, ce qui était moins accessible pour quelqu'un qui n'était pas du tout intéressé par le sujet a priori. Nous avons réfléchi ensemble à comment améliorer le récit existant afin de l'actualiser et de le rendre plus abordable pour tous. Plusieurs idées sont sorties de ces réflexions :  écourter certaines parties trop détaillées, aller vers plus d'action et faire davantage agir le personnage principal au lieu de le faire toujours penser, ajouter un nouveau personnage qui permettrait plus d'interactions, simplifier l'écriture notamment par la réécriture du texte au présent et par un découpage plus cadencé et des chapitres plus courts. C'était très technique, tout nouveau pour moi, très intéressant. Je travaillais plusieurs chapitres, puis les envoyais à J'ai lu qui me donnait son feed-back. C'était un réel plaisir de travailler avec cette équipe, dont le professionnalisme est incroyable.

- Outre une forme de reconnaissance, qu'a représenté pour vous cette édition en poche ?

- La reconnaissance des pairs, bien sûr, mais aussi un suivi professionnel. Je me suis senti entourée, épaulée, portée par une structure qui avait les moyens de le faire. Ensuite, il y a la visibilité. Le marché touché est bien plus vaste. Les ventes peuvent ainsi exploser et donner de la crédibilité (même si cela n'a pas forcément un lien de cause à effet!) à notre travail d'auteur. Cela ouvre des portes. Cette édition, comme je l'ai évoqué plus tôt, m'a également permis de visiter beaucoup de classes d'ados entre 16 et 18 ans, de dialoguer avec des jeunes sur les sujets de la différence, de l'importance du livre et du monde de demain. Enfin, et ce n'est pas le moindre des cadeaux, cette forme de notoriété professionnelle m'a permis de proposer une adaptation BD du roman à plusieurs maisons d'édition. Les éditions Dupuis ont accepté le projet et nous y travaillons actuellement avec le scénariste Eric Corbeyran, le dessinateur Ludovic Borecki et le coloriste Benoît Bekaert". 

mercredi 3 avril 2024

"Le mystère de la femme sans tête" (Myriam Leroy)

                           


A l'occasion de la sortie de son roman "Le mystère de la femme sans tête", l'auteure belge Myriam Leroy a répondu aux questions du magazine Flair :

"Comment est né ce projet de roman ?
- Nous étions en décembre 2020. Je venais de perdre un procès qui était impossible à perdre, c'était inattendu. Quelques jours plus tard, je me balade au cimetière d'Ixelles et je découvre la tombe d'une femme. Sous son nom, il est marqué "Décapitée". Je m'engouffre dans son histoire qui me permet d'affronter l'échec que je venais de vivre en justice. Paradoxalement, cette rencontre tragique m'a sauvée, m'a appelée. Tout au long de la rédaction de ce bouquin, à chaque fois que j'allais au cimetière d'Ixelles, je tombais immédiatement sur elle. Aujourd'hui, je ne la vois plus si je ne la cherche pas. Comme si elle n'avait plus rien à me dire, que je pouvais continuer mon chemin.

- Marina Chafroff était-elle réellement derrière ce coup de couteau à un officier allemand dans le but de sauver soixante otages ? Aucune source n'a pu le confirmer. Frustrant ?
- Non car l'enjeu du projet n'était plus tellement de reconstituer la vérité, mais de montrer ce que l'histoire de Marina pouvait dire de nous. Au départ, je voulais écrire une enquête journalistique avec un point final. Mais je suis repartie de zéro en assumant aussi le pouvoir de l'imagination. Mine de rien, cela reste un livre sur la vérité puisque j'y dévoile mon processus d'écriture.

- Défendre une idée justifie-t-il le fait d'abandonner ses propres enfants ?  

- C'est l'angle mort de cette histoire. Personne ne comprend, surtout pas ses enfants. Mais nous étions en 1942 et Marina était russe. Elle n'avait pas exactement le même rapport à la violence, à la mort, à l'au-delà. Elle était extrêmement pieuse, hyper religieuse. Tout cela a dû jouer. 

- Dans cette histoire, personne n'est tout blanc ou tout noir. Vous arrivez à vous dire que chacun a ses raisons ?

- Pas du tout. J'ai même plutôt tendance à devoir me réfréner. Dans la vie, je pense que ne pas juger est une faute morale. Dans les livres, par contre, juger est une faute esthétique. Juger ses personnages, c'est insupportable. Je ne sais pas pourquoi je suis à ce point contradictoire. J'ai un peu de mal avec les donneurs de leçons. Et puis, ici, j'étais aussi dans l'obligation de ne pas juger mes personnages puisque la plupart d'entre eux ont encore de la descendance. On pourrait croire, à tort, qu'on peut s'emparer de cette histoire comme si de rien n'était car elle a eu lieu il y a 80 ans... Mais non, il faut encore faire preuve de précaution. 

- C'était la première fois que vous écrivez un roman historique. L'exercice vous a plu ?

- Oui. Même si au départ, je me disais que ce n'était pas pour moi. A ce moment-là, je ne pensais pas que ce quelqu'un pouvait être moi. Je ne suis pas historienne, je ne savais pas comment chercher mes sources. J'étais assez démunie, désorientée mais heureusement, les portes se sont ouvertes. J'ai toujours aimé les vieux journaux, les archives, la désuétude du passé...mais ce n'est pas une motivation suffisante. Je crois que le sujet d'un roman doit être profondément vital, sans qu'on ne sache toujours l'expliquer. Qu'on doit avoir l'impression qu'on va s'effondrer si l'on ne continue pas à creuser". 

mercredi 6 mars 2024

Hommage à Colette Nys-Mazure à Tournai

 


Cliquez ci-dessous sur "Nys-Mazure Colette" pour retrouver mes autres articles consacrés à cette Grande Dame de la littérature belge. 

lundi 19 février 2024

Charly Delwart et les livres de poche

                                


Né en 1975, l'auteur belge Charly Delwart a confié à la revue "Le Carnet et les Instants" du Service de Promotion des Lettres de la Fédération Wallonie-Bruxelles : 

"Pour moi, cela reste assez opaque. J'ai simplement reçu une lettre où les éditeurs indiquaient leur souhait de faire passer le livre en poche. Je pense qu'ils ont leur public à l'esprit et qu'ils sentent si le livre peut plaire à un grand nombre. Pour "Databiographie", ils ont pris les droits pour le poche avant même que l'édition grand format sorte, et donc avant qu'il y ait des retours médiatiques ou commerciaux. La version poche est sortie deux ans après, au moment de la sortie du roman suivant, "Le grand lézard", pour lequel ils n'ont pas pris les droits. Cela a redonné un coup de projecteur sur le livre et lui a permis d'arriver dans d'autres réseaux de lecture. On a sorti une version légèrement différente, suite à un travail avec la correctrice. Pour la couverture, ils m'ont envoyé différentes propositions, mais tout s'est fait à distance car on était en pleine pandémie". 

lundi 5 février 2024

Geneviève Damas et les livres de poche

                        


Geneviève Damas s'est confiée à la revue "Le Carnet et les Instants" du Service de Promotion des Lettres de la Fédération Wallonie-Bruxelles :

"Mon premier roman "Si tu passes la rivière" (publié par Luce Wilquin) a été réédité au Livre de poche. Je pense que cela est lié au fait qu'il a été lauréat du Prix des cinq continents de la francophonie et qu'il a été finaliste au Festival de Chambéry. Je crois qu'à l'époque, il fallait atteindre un seuil de 5.000 ventes pour passer en poche, ce qui a été le cas. Luce Wilquin a commencé à démarcher et a fait un boulot de dingue pour ce livre. Les négociations se sont passées entre maisons d'édition. Ils ont eu un coup de coeur au Livre de poche, qui l'a republié en 2014. Le contrat a été conclu pour dix ans et ils ont déjà annoncé qu'ils le prolongeraient de dix ans. Ils semblent miser sur le long terme.

Le Livre de poche a déjà acheté les droits de mon dernier roman, "Strange", paru chez Grasset, après l'avoir lu avant même qu'il sorte. Le contrat a été signé en juin alors que le livre est sorti à l'automne. J'en ai tiré un intérêt financier, car ils paient un à-valoir conséquent, mais ce qui est extraordinaire, c'est l'accessibilité qu'acquiert le livre. Cette démocratisation est super importante. C'est gai aussi de savoir que "Si tu passes la rivière" non seulement existe toujours, mais qu'il sort des frontières car les collections de poche partent aussi en Afrique....".

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lundi 15 janvier 2024

Nicolas Ancion et les livres de poche

                       


Né en 1971 à Liège, l'auteur belge Nicolas Ancion confie à la revue "Le Carnet et les Instants" du Service de Promotion des Lettres de la Fédération Wallonie-Bruxelles :

"Pocket avait une collection intitulée "Nouvelles Voix", dans laquelle la maison republiait des auteurs que l'équipe éditoriale avait envie de présenter à un plus large public. Valérie Miguel-Kraak et Laurent Boudin ont imaginé élargir cette aventure éditoriale à des auteurs venus d'autres pays de la francophonie. Quand ils ont vu dans "Livres Hebdo" l'annonce de la parution au Grand Miroir de "Nous sommes tous des playmobiles",  ils ont demandé à lire le recueil et ont acheté les droits en poche alors que le livre n'était sorti chez nous que depuis quelques semaines. Ce ne sont pas les chiffres de vente qui ont motivé leur choix, mais le contenu du recueil. Ils ont par la suite enchaîné en republiant "Quatrième étage",  "Ecrivain cherche place concierge",  "Les ours n'ont pas de problème de parking" et "L'homme qui valait 35 milliards". J'ai été partie prenante dans toutes ces rééditions, vu que j'avais récupéré les droits sur ces titres et que je me suis occupé de la cession en poche. 

Outre que ces sorties chez Pocket ont permis à ces textes de toucher un public beaucoup plus large, c'était aussi l'occasion de franchir la frontière, car la diffusion en France de ces titres était très aléatoire. D'un coup, les livres se sont retrouvés dans les gares, les supermarchés, dans les rayonnages de presque toutes les librairies. Les éditeurs parisiens, surtout en poche, ne travaillent presque plus le fonds sur la durée :   les nouveaux titres chassent les anciens. Pour s'assurer qu'un titre reste en rayon, ils le rééditent chaque année ou presque avec une nouvelle couverture, un nouvel ISBN et les critères sont alors très pragmatiques :  si les ventes n'augmentent pas d'une année sur l'autre ou sont insuffisantes, ils abandonnent la commercialisation du titre. 

Le poche n'est pas un livre comme un autre, c'est un objet courant, familier. Il rend la littérature accessible, d'un point de vue financier bien sûr, mais aussi par la proximité qui se crée avec les lecteurs. Le grand public pense que si c'est en poche, c'est que ça a déjà marché. Ces arguments sont formidables, car ils réduisent à néant un obstacle majeur qui fait que la littérature contemporaine a toujours l'air d'être publiée....pour d'autres que soi. En poche, c'est différent. Comme si la littérature descendait de son piédestal. 

Le paradoxe, c'est qu'on vend beaucoup de livres mais que cela ne rapporte presque rien :  l'auteur ne touche que 5 % du prix de vente hors TVA. Concrètement, sur un recueil à 6,60 euros, ça fait 30 centimes bruts (avant charges sociales et impôts). Chaque fois qu'on vend 2.000 exemplaires en poche, on gagne 440 euros. Les lecteurs imaginent qu'on gagne bien sa vie si on est publié en poche. Ce n'est pas aussi simple".

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