"C'est vrai : ce roman est pour une grosse part autobiographique. J'ai vraiment connu cet éblouissement, enfant, quand j'ai entendu ma tante Aimée au piano. C'était comme une grande porte qui s'ouvrait pour moi vers la musique. Et puis toute l'histoire de ma tante, ses secrets, c'est tout aussi réel. Mais certaines scènes sont imaginaires, comme ma dernière rencontre avec Aimée. J'aurais aimé qu'elle ait lieu, je corrige la vie en écrivant.
A cet âge-là, j'étais fonceur, je voulais réussir vite. Mon professeur a vu arriver un malabar qui tapait du Rachmaninov sur un clavier et va devoir en faire quelqu'un qui joue du Chopin. L'étude de la musique va m'affiner, m'apprendre la patience, l'attention aux autres, à la nature. Et Chopin va m'initier à l'intime. J'aime l'écriture intime et intérieure plutôt que les effets de manche. Certaines personnes comme mon professeur de piano ont déposé des choses en nous et c'est seulement aujourd'hui, à 57 ans, que je comprends tout l'apport de cette dame. Ce que je raconte, ce sont les vertus de l'apprentissage. Connaître ses limites, comment les déplacer, découvrir ses qualités. Et aussi comment se concentrer et se déconcentrer. Un musicien doit avoir suffisamment de technique pour ne plus devoir y penser quand il entame un concert.
Quand je commence à écrire, il faut que je libère complètement mon imagination. Mais auparavant, j'ai longuement préparé mon récit. L'idée de ce roman, par exemple, est née il y a des années, après une conférence consacrée à Chopin. J'écris vite mais je compose lentement. La musique a le privilège d'être au-delà des langues, mais la littérature a la vertu de la clarté de la pensée et de la précision du raisonnement. Elle est plus directement compréhensible".
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire