"L'enfant neuf" est un ouvrage autobiographique dans lequel Colette Nys-Mazure (née à Wavre en 1939) retrouve son regard d'enfant pour nous raconter la mort brutale de ses parents survenue en l'espace de quelques semaines alors qu'elle avait sept ans. Colette commence son récit le 17 octobre par le dernier petit-déjeuner pris avec ses deux parents, son frère Jean-Paul et sa soeur Chantal. Elle évoque ensuite l'accident de voiture de son papa Antoine, les visites des proches et les funérailles. Elle est perdue dans ce monde d'adultes : "Les grandes personnes n'entendent pas nos paroles. Elles écoutent d'autres voix et celles-ci paraissent de plus en plus alarmantes".
En effet, sa mère n'étant plus que l'ombre d'elle-même ("Plus rien de commun avec la femme qui courait se jeter dans les bras de Papa ou nous saisissait dans les siens pour nous faire tournoyer"). Colette est hébergée à Kain (Hainaut occidental) chez sa tante Jeanne, son oncle Jean et leurs trois filles. Le 11 janvier, sa maman Elisabeth s'éteint à l'hôpital. Dans la deuxième partie du livre, Colette reprend son regard d'adulte pour analyser l'impact de cette double perte dans sa vie : "Il me faudra des années pour mesurer l'impact de cette rupture première ; ce qu'elle a modifié dans ma perception de l'existence, dans la manière de croire et d'espérer".
Elle y rend hommage à l'écoute sans jugement et aux conseils de son institutrice Mère Marie-Tarcisius, devenue ensuite une confidente ("la femme qui m'a servi de mère"). Elle raconte comment elle a pris conscience de la vulnérabilité des adultes. Elle remercie ses proches de l'amour qu'ils lui ont donné et de lui avoir parlé de manière naturelle de ses défunts parents : "La faculté d'adaptation des enfants est infinie pour autant qu'ils se sentent aimés, sollicités, tirés vers le haut. Le goût d'apprendre, le stimulant de l'école m'ont arrachée à la délectation morose. J'ai été relancée vers la vie plutôt qu'enfoncée dans le malheur (...) Il m'a été donné de rencontrer dès l'aube la mort, sa ruine, et tout aussitôt la puissance de l'amour gratuit, de la pure bonté. Là s'ancre l'élan de la vie, le goût d'être et d'aimer. Avoir reçu un tel amour rend capable de donner à son tour". Malgré la gravité du sujet, Colette, fidèle à sa foi, nous fait comprendre que la Vie doit être plus forte que la Mort. A conseiller aux personnes qui viennent de perdre un proche.
Si c'est dans ce livre qu'elle évoque le plus sa famille, elle en parle aussi dans d'autres ouvrages. Ainsi, dans "Seuils de Loire", le Moulin Géant, qui héberge sa résidence de poète, lui fait penser à son arrière-grand-père Augustin Desmet qui était meunier à Tournai. Son Moulin de l'Agache (une pie en tournaisien) construit en 1808 avait été détruit par les Allemands en octobre 1918. Augustin est mort à 72 ans en 1921, mais ses filles (parmi lesquelles Henriette, la grand-mère de l'auteur) ont raconté à Colette de nombreuses anecdotes à ce sujet.
Dans "La liberté de l'amour", elle rend à nouveau hommage à l'attention que lui ont prodiguée ses oncles et tantes du Tournaisis, ainsi que Mère Marie-Tarcisius qui lui a transmis sa foi mais l'a découragée d'entrer au couvent : "Je la sentais désireuse de m'aider à trouver ma voie propre, sans aucun préjugé. Outre l'amour inconditionnel, elle m'a révélé le respect de la liberté, de l'autonomie de chacun (...) Je suis convaincue que c'est une sainte authentique de notre temps, mais elle n'a nul besoin de canonisation officielle".
Colette devient titulaire d'une maîtrise de lettres modernes de l'Université Catholique de Louvain. Sur le plan privé, elle se marie avec Jean-Marie - qui avait perdu, lui aussi, sa maman - et confie dans "La liberté de l'amour" : "Il se peut qu'influencés par ces débuts tragiques et par la qualité de notre entourage, nous ayons jeté toutes nos forces dans un couple résolu à durer. C'était et c'est un projet fort. Nous avons souhaité une famille nombreuse et désiré l'élargir en accueillant des enfants d'ailleurs, par le biais d'un organisme international". Elle évoque aussi la maternité ("Le fait de donner la vie n'implique pas de donner sa vie pour les enfants"). Trois de ses cinq enfants vivent aujourd'hui à l'étranger et on sent une pointe de tristesse de ne voir ses petits-enfants que deux ou trois fois par an. Mais elle ajoute : "Allons! Ils sont heureux et font leur vie avec allégresse, n'est-ce pas ce que tu souhaitais?".
Professeur de français de 1961 à 1999, elle donne régulièrement des conférences et continue d'animer des ateliers de lecture et d'écriture. En 1975, elle obtient le Prix Froissart dont la récompense était l'édition de son premier livre, "La vie à foison". Si la poésie reste son territoire privilégié, elle écrit aussi du théâtre, des nouvelles, des essais et des livres pour la jeunesse.
Dans "Célébration du quotidien" , Colette Nys-Maure explique son objectif dès les premières pages : "Nous ne nous étonnons pas assez, nous ne nous émerveillons qu'occasionnellement. Histoire d'éveil et question d'usure. Alors, pour moi comme pour vous, j'ai entrepris une célébration de ce quotidien décrié, ignoré, délaissé". Elle dédie son livre à son amie Elisabeth qui est gravement malade, mais qui est présente à chaque chapitre et donne encore plus de sens au titre du livre. Que ce soit dans une cuisine, une gare ou un balcon, l'auteur nous incite à profiter du moment présent, sans trop penser au passé ou au futur : "Pendant ce temps-là, ne néglige-t-on pas de vivre ce qui est donné ici et maintenant, d'aménager l'immédiat? A coup sûr, la meilleure façon de se préparer à égrener demain d'autres regrets".
Colette nous parle aussi de ses réflexions sur le rôle de femme-épouse-mère et conseille : "Enfant, tu n'aurais pu vivre si je t'avais étouffé sous ma demande, si je t'avais voulu en accord avec mon désir plutôt qu'avec le tien. Pour ne pas peser sur toi de tout mon amour, il me fallait exister pour mon compte, rester la femme de ton père autant que ta mère". Mais elle évoque aussi la nostalgie quand les enfants grandissent : "Ai-je assez pleuré en allant d'une chambre désertée à l'autre en me répétant que c'était fini le temps des nourrissons, des lits pleins, des souffles cueillis sur les bouches entrouvertes, des mots échappés au sommeil. Le temps où la vie est justifiée par le seul fait d'élever ces petits qu'on a choisis de mettre au monde, d'avoir à leur donner des racines et leur ouvrir les ailes". Puis viennent les petits-enfants... Colette nous incite aussi à apprivoiser la solitude et à se réserver des moments juste pour nous-mêmes. La religion est également très présente dans sa vie.
Dans les derniers chapitres de "Célébration du quotidien", elle revient sur la disparition de ses parents lorsqu'elle avait sept ans qui a influencé sa vie et son oeuvre, et lui permet d'apprécier toutes les petites joies du quotidien : "Chaque matin, je m'étonne et je me réjouis d'être en vie ; je ne m'y habitue pas. J'ai appris aussi combien on pouvait compter sur l'amour des proches : ceux-là qui nous ont élevés comme leurs propres enfants avec une tendresse sans calcul. Ils nous ont prouvé que rien n'est jamais fini et que l'amour est vraiment plus fort que la mort".
Après "Célébration du quotidien", Colette s'interroge dans "Secrète présence" sur quelle présence nous pouvons offrir à nos proches : ni trop près, ni trop loin, sans l'imposer ou réclamer des comptes. Elle revient sur son enfance marquée par le décès de ses parents et témoigne : "Je redoutais les adultes - souvent les parents de compagnes de classe ou des amis de la famille - qui me figeaient dans ma situation d'orpheline et me couvaient de regards compatissants. Envie de secouer cette chape de piété et de courir rejoindre les insouciants dans la cour, sur la plage. Etre comme tout le monde. Ne pas me sentir marquée. Oui, il s'agit de ne pas entretenir le goût du malheur, mais de délivrer les sources, d'accompagner le chant profond de la vie toujours la plus forte".
Epouse, maman de cinq enfants et plusieurs fois grand-mère, elle évoque les amis qu'on laisse en chemin, son amour de la famille ("Orpheline à sept ans, j'ai reçu de celle dont je suis issue amour et secours pour croître comme les autres. J'ai littéralement vécu de cette solidarité, j'y ai puisé des forces pour l'existence"), les difficultés à laisser ses enfants vivre leur propre vie ("Sans doute sommes-nous plus soucieux de donner des racines à nos enfants que de leur ouvrir les ailes"), le besoin d'un jardin secret pour tous, la vie de couple, la retraite, la place de la femme dans notre société, la vieillesse ("Dans les maisons pudiquement appelées de repos, certains ne reçoivent plus jamais un baiser et meurent de faim du coeur") et la mort.
Cette phrase de Colette résume bien son livre : "Trouver sa place, la garder sans croire qu'on la perd lorsque le cercle familial, amical ou professionnel s'élargit ou se modifie, l'histoire de toute une vie, non?". Et elle conclut son ouvrage par cette citation de Rilke : "Si ta vie quotidienne te paraît pauvre, ne l'accuse pas, accuse-toi plutôt. Dis-toi que tu n'es pas assez poète pour en convoquer les richesses".
Dans "Contes d'espérance" (paru en 1998), Colette nous présente 19 contes qui n'ont rien de fantastique ou d'irréel. Elle a puisé l'inspiration dans notre vie quotidienne et raconte l'histoire de personnes ordinaires qui souffrent (dans tous les sens du terme) à l'approche de Noël : Françoise qui a perdu l'appétit de vivre, Antoinette qui attend la naissance d'un enfant avant de mourir, Laura et le chat perdu, Mr Brice qui redonne le goût d'apprendre à deux cancres rencontrés dans la rue, Chantal et son amour impossible pour un homme marié, Mme Bravoure qui n'a plus d'énergie suite au décès de son mari, Antoine et son premier Noël sans sa maman, etc. Des lecteurs reprocheront probablement l'abondance de bons sentiments, les happy end systématiques et les références chrétiennes de ce livre, mais ces 19 nouvelles nous incitent à mieux apprécier les joies simples de notre quotidien et apportent de la douceur, de l'amour, de la sagesse et de l'espérance dans un monde qui en manque si souvent...
Mères, professeurs de français et auteurs dans le Tournaisis, Colette Nys-Mazure et Françoise Lison-Leroy ont co-écrit "Flore et Florence" , un roman pour enfants. Elles nous racontent l'été du passage de l'école primaire aux études secondaires de Flore et Florence, amies depuis toujours. On les suit en vacances à Hardelot et en Bretagne, puis de retour chez elles dans le Hainaut occidental. Au cours de cet été doux et paisible, elles nous font partager leur quotidien : le départ de la grande soeur en Indonésie, leurs cours de théâtre, leurs premiers émois amoureux, la mort de leur beau moniteur, leurs relations avec leurs parents, les déceptions et les satisfactions en amitié. Le roman se termine par leur entrée à l'école secondaire. La lecture de "Flore et Florence" permettra aux professeurs d'aborder de nombreux thèmes avec des élèves du même âge que les deux héroïnes. Mon reproche est le manque de surprise et l'absence de rebondissement. Tout le roman est résumé dans la quatrième de couverture.
Colette a rédigé "Seuils de Loire" , un ouvrage de 141 pages, dans le cadre d'une résidence de poète qui s'est déroulée en 2002 pendant deux mois au Centre Municipal de Rochefort-sur-Loire. Lors de sa première visite, un vent glacé lui inspire cette réflexion : "Comment ne pas me sentir en pays connu puisque je retrouvais des airs de chez nous? Là comme ici, la girouette tourne plus volontiers que l'éventail ne bat de l'aile". Le Moulin Géant de Rochefort-sur-Loire, qui héberge sa résidence de poète, lui fait penser au Moulin de l'Agache de son arrière-grand-père, mais évoque aussi les moulins de Froyennes, Villeneuve-d'Ascq, Damme ou Kain. Les références au Tournaisis sont fréquentes : "Mon territoire est fendu par l'Escaut, puissant et modeste. Rien à voir avec le Rhône, la Loire ou la Moldau, mais c'est mon fleuve et je le fréquente assidûment, supportant mal l'air de dédain de quelques touristes, pressés de comparer, incapables de contempler".
Colette fait l'éloge de la correspondance et de l'écriture : "Comment tant de personnes peuvent-elles se priver d'écrire? Ignorent-elles l'émotion des lettres retrouvées qui disent l'être disparu, vibrant encore sous les doigts, les yeux?". Au terme de sa résidence de poète, elle conclut : "Ces êtres croisés et ces lieux arpentés sont en moi ; aucun vandale ne les défigurera. L'écriture comme témoin, légataire. Mémoire passeuse. Dans le sillage des grands hommes poètes qui m'ont précédée ici : la bande à Cadou, Pierre Garnier, Pascal Commère, Thierry Renard, et, déjà dans la perspective de ceux qui me suivront, je me suis imprégnée d'un pays".
"La liberté de l'amour" est une longue conversation de 2005 entre le journaliste Christophe Henning et Colette qui dédie cet ouvrage "à ceux et celles qui m'ont communiqué l'intime conviction d'un amour plus fort que la mort". Outre son enfance et sa vie de femme et de mère, elle revient notamment sur "Célébration du quotidien", publié en 1997, qui a marqué sa carrière littéraire : "Nous nous masquons notre réalité mortelle, nous fuyons vers l'arrière ou vers l'avant en négligeant ce présent très quotidien qu'il nous est donné de vivre ; nous recherchons l'extraordinaire et c'est lorsque l'ordinaire nous est interdit que nous en mesurons la valeur". Colette Nys-Mazure refuse cependant d'être enfermée dans le courant minimaliste cher à Philippe Delerm. Elle nous raconte ensuite ses quatre résidences d'écrivain - notamment à l'Academia Belgica à Rome - et son besoin d'avoir deux heures solitaires le matin pour lire et écrire.
Dans le chapitre intitulé "Enseigner savoir et saveur", Colette confie : "Aujourd'hui, le travail de l'enseignant se trouve sérieusement compliqué : d'une part, l'école n'est qu'un des accès à l'information et son crédit s'est affaibli ; d'autre part, les élèves sont habitués à zapper lorsqu'une émission les ennuie, et surtout, ils ont tant d'énergie à dépenser que, faute d'activité physique quotidienne, l'attention soutenue au cours leur devient difficile, voire impossible". Aujourd'hui retraitée, elle préfère animer des ateliers d'écriture que donner une conférence, et tente de faire redécouvrir le plaisir de la lecture à ses stagiaires. Colette évoque ensuite la société de consommation, les nouvelles technologies, la religion et son souhait d'être enterrée au Jardin des Poètes au sommet du Mont-Saint-Aubert. Même si la mort est souvent évoquée dans cet ouvrage, on le termine avec un message d'espoir et d'optimisme. C'est un bon résumé de la vie et de l'oeuvre de cette Grande Dame de la littérature belge dont les médias ne parlent pas assez.
Sorti en 2008, "Perdre pied" est le premier roman de Colette Nys-Mazure qui s'est inspirée du tableau "Sur la plage de Boulogne" d'Edouard Manet. Tous les personnages de cette toile, seuls ou en groupe, s'ignorent. Dans le roman, des personnes en souffrance se retrouvent au même moment face à la Manche. Il y a Julian, en chaise roulante suite à un accident de moto. Hilde qui vient travailler à l'hôtel des Dunes après une rupture amoureuse. Mosane, une adolescente sans nouvelles depuis six mois de son père journaliste, et sa mère Amélie. Antoine (75 ans), qui regrette de n'avoir pas eu le courage d'être un artiste à part entière, et qui a peur de la maladie et de la dépendance. Jeanne, la responsable de la maison d'hôte, dont le fils est atteint du sida.
Toutes ces personnes, résidents ou locataires, vont faire connaissance et se soutenir mutuellement. Leurs problèmes, leurs soucis et leurs doutes ne s'envolent pas, mais cette semaine face à la mer va leur permettre de reprendre pied et de retrouver un peu de courage et de confiance en eux. Ce roman très bien écrit s'intègre parfaitement dans les messages que tente de faire passer l'auteur à travers son oeuvre. Mon seul petit reproche est que j'ai eu du mal au début à entrer dans l'histoire et à m'y retrouver avec tous les personnages.
Fidèle à sa foi, Colette Nys-Mazure a consacré tout un livre à la Noël en 2009, comme elle l'avait fait dix ans plus tôt dans "Contes d'espérance". Dans "Noël en ce monde : contes pour aujourd'hui" , elle nous raconte la Nativité et des histoires qui se terminent par un message positif. Dans la nouvelle "De tombeaux en berceaux", elle évoque à nouveau Elisabeth, son amie décédée, à qui elle avait dédié "Célébration du quotidien". Colette nous incite à l'espérance de jours meilleurs, et rappelle que la Vie est plus forte que la Mort.
Certains passages sont autobiographiques, comme lorsqu'elle parle de ses grands-parents paternels : "Bon Papa était accablé par la mort de son fils aîné, mon père, et lui survivait tant bien que mal. Bonne Maman était exsangue et répétait aux amies, à voix basse, mais je l'entendais : "Ce n'est pas naturel, nous aurions dû partir les premiers". Elle et lui souffraient différemment : un mur de silence s'élevait entre eux ; leur dignité leur interdisait de mendier près de l'autre le tendre réconfort dont ils auraient eu besoin".
La bonne idée de ce livre très bien écrit, c'est d'avoir ajouté un CD d'une vingtaine de minutes. La voix douce de Colette et la musique d'ambiance donnent une autre perception des textes. Elle nous propose également un conte de Noël à jouer en famille ou entre amis. Dans sa conclusion, Colette écrit : "Noël à l'horizon. Seigneur, aide-moi à faire bon usage de la nostalgie. A ranger allègrement dans une malle les jardins d'enfance définitivement clos qui continuent à encenser la mémoire (...) S'ils illuminent notre souvenir, ils risquent aussi de nous y fixer, de nous alourdir. Ne permets pas, Seigneur, que nous gênions les autres de nos regrets, de nos déceptions. Demain, c'est Noël. Ne pourrions-nous déposer notre bagage non pour l'oublier, mais pour courir plus léger vers Toi, vers nos frères, sans encombrer personne de notre trésor privé, à jamais inaliénable?".
Dans l'introduction de "L'eau à la bouche" , Colette nous confie : "Qu'est-ce qu'un poème dans la marche du monde? Peut-on encore écrire des poèmes après les horreurs des camps d'extermination et les génocides? Interrogations légitimes. Chaque homme qui naît recommence l'histoire, et la poésie, comme toute forme d'art, accompagne, éclaire, soutient son existence tout en creusant le mystère de l'être au monde (...) Comme nous en avons besoin dans cet univers mécanisé, robotisé, informatisé à outrance. Cultiver la gratuité, la beauté avec ce matériau qui appartient à tous : les mots de la langue. Faire sien le quotidien et le transfigurer. Ecrire, lire la poésie accroît la liberté et donc la joie (...) Nous avons besoin de poèmes comme de l'air que nous respirons. Une longue fréquentation de la poésie de tous bords m'a convaincue que la vision poétique, loin de nous éloigner du réel et du présent, communique au quotidien une qualité particulière, une lumière et une chaleur, un émerveillement comparables à l'effet du feu sur le bois sec".
Dans cet ouvrage, Colette retrouve sa pédagogie d'ancienne professeur de français pour sortir la poésie de sa tour d'ivoire et la faire découvrir au grand public, avec des mots simples, sans analyse littéraire complexe. Elle a choisi des poètes francophone qu'elle apprécie (en variant les générations, les pays et les styles) afin de nous donner l'eau à la bouche ("Puisse cette série susciter chez les plus jeunes comme chez les aînés l'envie de mordre à même la chair du poème") : Françoise Lison-Leroy, André Schmitz, Maurice Carême, Liliane Wouters, Achille Chavée, François Emmanuel pour la Belgique, mais aussi Racine, Charles Baudelaire, Joachim du Bellay, Andrée Chedid, Serge Wellens, René Char, etc. Une courte présentation permet de les situer dans le temps et l'espace.
Colette Nys-Mazure et moi? Je l'ai découverte par hasard à la télévision en zappant dans les années 90 ; elle répondait aux questions de Michèle Cédric dans son émission de la RTBF. Sa personnalité m'avait plu. Quelques années plus tard, j'ai acheté ou emprunté à la bibliothèque plusieurs de ses ouvrages. Comme on l'aura constaté dans les comptes-rendus ci-dessus, ce n'est pas sa poésie qui m'attire, mais ses leçons de vie, son humanisme, sa douceur, sa sagesse et son optimisme. Beaucoup de ses citations me font penser à ma vie ou à celle de mes proches, et me font réfléchir. Ensuite, j'ai eu envie de la rencontrer lors de trois séances de dédicaces (à Tournai-La Page, à la librairie Decallonne et à la Foire du Livre de Bruxelles) et, même si ce sont des moments très courts qu'il faut partager avec les autres lecteurs, j'ai pu constater qu'elle était fidèle à ce qu'elle écrit dans ses livres. Nous avons eu aussi quelques échanges par courrier ou par mail. Et enfin, en mars dernier, le destin m'a offert un beau cadeau : en revenant de la Foire du Livre de Bruxelles, un problème technique m'a obligé à changer de train et de ligne, je monte énervé et en retard dans un autre train à la recherche d'une place....et me retrouve à côté de Colette Nys-Mazure! Elle me reconnaît, dépose son livre et a la gentillesse de parler avec moi pendant près de 3/4h. Un beau moment entre un auteur et un lecteur.
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Oui, c'est une auteure dont l'écriture va dans le profond, le simple mais l'essence. Quelle chance tu as eue de la rencontrer et de lui parler... Une toute grande dame de notre littérature que je "connais" d'ailleurs grâce à toi!
RépondreSupprimerbonjour petit belge et merci pour la belle description de cette grande dame. En te souhaitant un excellent week end et avec mes bisous de Namur.
RépondreSupprimerBeau portrait d'un écrivain majeur de notre paysage littéraire. Une grande dame en effet. Bravo pour ce long article bien mérité. Cordialement, Apolline Elter
RépondreSupprimerExcellent auteur en effet
RépondreSupprimerPour moi Célébrations du Quotidien sort très clairement du lot
T. van de WERVE
Bravo pour ce très bel article et hommage tellement mérité. Belle année à vous, Apolline
RépondreSupprimerC'est une auteure que j'apprécie beaucoup, j'aime son écriture, par exemple " Contre les rigueurs de l'hiver, contre l'étroit calcul du temps trop compté elle invente des jardins de papier".
RépondreSupprimer- Perdre Pied- a été adapté, j'ai vu le film à la télévision.
Amicalement
Marcelle