lundi 28 mai 2012
Décès de Jacqueline Harpman
Née à Etterbeek en juillet 1929, Jacqueline Harpman avait dû quitter la Belgique pendant la deuxième guerre mondiale pour se réfugier avec son père, un juif d'origine néerlandaise, à Casablanca au Maroc. C'est là qu'elle effectue ses études secondaires et se passionne pour la littérature, en particulier Balzac, Proust et Freud. A l'automne 1945, elle rentre en Belgique et entame des études de médecine qu'elle abandonne après deux ans en raison de la tuberculose. Elle passe ainsi près de deux ans au sanatorium d'Eupen dans les années 50 pour soigner cette maladie. Sa carrière littéraire démarre en 1959 avec la publication de son premier roman, "Brève Arcadie", qui reçoit le Prix Rossel. En 1963, elle épouse l'architecte et critique d'art Pierre Puttemans avec qui elle aura deux filles. Son roman, "Les Bons Sauvages", paru en 1966, ne rencontre pas le succès espéré. Déçue, elle abandonne la littérature pendant une vingtaine d'années.
Jacqueline Harpman entame alors des études de psychologie à l'Université Libre de Bruxelles et est diplômée en 1970, à l'âge de 41 ans. Elle signe son retour à littérature en 1985 avec "La mémoire trouble". Elle confie : "Je crois que je n'avais plus rien à dire. Et puis brusquement dans les années 80, le désir de raconter des histoires m'est revenu et ne m'a plus quitté. Il est tel aujourd'hui que j'ai l'impression qu'il demeurera présent jusqu'à la fin de mes jours. J'ai aussi découvert Freud en même temps que le plaisir d'écrire. J'ai exercé les deux métiers ; ils n'ont aucune influence l'un sur l'autre. Quand on écrit, on exprime ce que l'on sent. La psychanalyse demande, elle, l'interprétation et la réponse. Il ne suffit pas de dire. Lire, comme écrire, est un soulagement temporaire, mais on ne se nettoie de rien. Voir quelqu'un qui reprend possession de soi est bouleversant. Je rêve de cela pour mes patients : qu'ils deviennent maîtres de leur histoire, c'est-à-dire de leur univers intérieur".
Son roman le plus connu est probablement "La plage d'Ostende" (éditions Stock, 1991). Elle y raconte comment Emilienne, 11 ans, grandit dans sa passion pour Léopold, 25 ans, et se révèle à lui après s'être rendue indispensable. En 1996, Jacqueline Harpman reçoit le Prix Médicis pour son roman "Orlanda", dans lequel la partie masculine de l'âme d'une jeune femme, Alice, investit le corps de Lucien. Orlanda (c'est le nom que l'auteur donne à cette "partie d'âme") vit alors de nouvelles expériences.
Elle remporte aussi le prix triennal du roman de la communauté française de Belgique en 2003 pour "La dormition des amants". En 2006, elle reçoit le grand prix de littérature de la Société des Gens de Lettres pour l'ensemble de son oeuvre. Son dernier roman date de 2007 : "Ce que Dominique n'a pas su", prix 2009 des Amis de la bibliothèque de la Ville de Bruxelles. Jacqueline a encore écrit deux pièces de théâtre ("Mes Oedipes" et "Avant/Après"), ainsi qu'un essai ("Ecritures et psychanalyse", paru en 2011). Ses livres ont été traduites dans de nombreuses langues (néerlandais, anglais, grec, etc.).
Jacqueline Harpman était aussi membre de la Société belge de psychanalyse et de l'Association psychanalytique internationale, chevalier de la Légion d'Honneur et chevalier des Arts et des Lettres. Elle est décédée ce 24 mai des suites d'une longue maladie. Elle avait 82 ans.
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Un portrait riche et bien formulé
RépondreSupprimerUn hommage digne de Jacqueline Harpman
Bravo!
Apolline Elter