Installé sur le pont des Arts en face de l'île de la Cité à Paris, Julien, un quadragénaire désoeuvré, célibataire sans enfants, ne sait plus où il en est et on l'imagine au bord du suicide : "Je n'ai jamais eu l'art de rendre les gens heureux autour de moi. Ni d'être heureux avec eux. Le bonheur s'apprend par imprégnation et je n'ai pas été imprégné de beaucoup de beauté durant mon enfance. Ni après. La vie te largue et tu largues la vie. Quand on ne reçoit pas de cadeau, on n'a pas envie d'en faire".
Julien nous raconte son enfance monotone à Gorcy en Lorraine (non loin de la frontière belge), les longues absences de son papa délégué commercial et la détresse de sa mère. A 20 ans, il décide de quitter sa famille pour aller vivre à Paris. Mais la désillusion est grande : "Arriver à Paris, c'est entrer en indifférence. Tout à coup, le moi que je réussissais quand même à être à Gorcy n'était plus rien. Ici, personne ne me connaissait et je ne connaissais personne. Avec un peu de bagout, on finit toujours par se faire des amis, mais j'ai toujours été un solitaire et un muet".
Julien dépense toutes ses économies puis enchaîne les petits boulots mal payés, mais il n'a pas la vie palpitante qu'il croyait trouver dans la capitale, et se décrit comme "un anorexique de l'âme enfermé dans le refus de m'épanouir". Il nous parle de sa vie comme de "quarante années de galère avant de comprendre que c'est moi qui tiens les rames de mon désastre".
J'ai adoré ce beau roman de l'écrivain belge Frank Andriat que j'ai lu en une soirée. Certaines réflexions m'ont fait penser à ma vie ou à celle de proches. J'aime beaucoup cet extrait : "On croit toujours que l'autre est mieux que soi. Tu t'attaches aux lueurs qui brillent à l'extérieur sans prendre le temps d'observer la lumière en toi, même si elle n'est pas plus forte que la flamme d'une allumette".
Le roman se termine par une note positive : une rencontre imprévue sur le pont des Arts permet à Julien de faire la paix avec son passé et de mieux savourer le présent afin d'affronter l'avenir, d'avoir confiance en lui et d'être enfin heureux. Une vraie leçon de vie.
mardi 9 mars 2010
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Beau compte-rendu, qui donne envie. Un sujet qui semble triste mais porteur d'un mieux qui arrive tard dans la vie du personnage. Enfin réconcilié avec lui-même j'espère. S'il voit sa petite lumière bien à lui ...
RépondreSupprimerTrès beau compte rendu en effet: l'atmosphère du roman est pleinement respectée.
RépondreSupprimerBravo
Apolline Elter
ohlà! tu donnes envie de lire ce roman!!!
RépondreSupprimerj'espère que nous aurons tous l'occasion de faire cette rencontre qui nous réconcilie avec nous-même: la sérénité est sans doute un des biens les plus précieux de l'existence. Merci pour ce beau et sensible compte-rendu PB.
RépondreSupprimerJe suis là. Je sais que je me fais rare mais je n'arrive pas à multiplier les minutes !
RépondreSupprimerJe ne connais pas ce roman de Frank Andriat mais je prends note. Je crois que c'est un auteur qui mérite d'être connu.
Je viens de lire ce bouquin mais, contrairement à toi, je n'ai pas beaucoup aimé. Il ne se passe rien, c'est une longue recherche d'une vérité que le héros découvre enfin. Même si le livre est court, je l'ai trouvé très long!
RépondreSupprimerLes goûts et les couleurs...