mercredi 29 mai 2024

"Le passager d'Amercoeur" (Armel Job)

                                     

Ancien enseignant, ancien directeur d'école, Armel Job poursuit sa carrière d'auteur depuis une trentaine d'années et a été élu membre de l'Académie Royale de langue et de littérature françaises de Belgique. A l'occasion de la sortie de son nouveau roman "Le passager d'Amercoeur", Armel Job a répondu aux questions du Soir Mag :

"Quelle est la genèse de ce roman ?

- Cette histoire est inspirée par des souvenirs de jeunesse. Avec le temps qui passe, on réfléchit à ce qu'il s'est produit dans notre vie. J'ai repensé à quelqu'un que j'ai connu, dont je me suis inspiré pour créer le personnage de Momo. Je l'ai fréquenté un temps, puis on s'est perdu de vue. J'ai par la suite entendu des anecdotes à son sujet. Il est notamment décédé jeune dans des circonstances dramatiques. J'ai donc fait appel à une série de souvenirs pour composer les personnages de ce livre, qui est une fiction du début à la fin. J'ai ensuite construit un roman sur des thèmes qui m'intéressaient, comme une relation mère/fils possessive.

- L'amour d'une maman pour son enfant est particulièrement puissant. Mais à double tranchant ?

- Totalement. Momo est dévoré par l'amour excessif de sa mère. Sa vie s'est construite en opposition à cela, il est en révolte permanente. Mais c'est un amour dont il n'arrive pas à se dépêtrer, car il est fasciné par sa maman. Il est coincé au milieu de sentiments contradictoires. Tout ce qu'il fait est le résultat de l'ambiguïté vécue depuis son enfance. Il a subi des relations incestueuses et cela a des répercussions sur sa vie. Je trouvais intéressant d'aborder le thème des relations incestueuses d'une mère envers son fils, comme l'a étudié Boris Cyrulnik. Il n'existe pratiquement aucune plainte dans ces cas-là.

- On sent que la psychologie de vos personnages est primordiale ?

- C'est essentiel en effet. Mon travail consiste à comprendre comment les gens réagissent aux différentes situations qu'ils vivent. Dans mes livres, je distille un peu d'intrigue policière, une technique pour retenir l'attention du lecteur. Mais ce qui compte vraiment, c'est essayer de comprendre comment chacun se débrouille avec la réalité. Comme par exemple un homme qui est sous l'emprise d'une femme. Je pense que le roman sert à cela, à montrer comment on interprète le réel avec les modestes moyens que nous avons à notre disposition.

- Que retirez-vous de l'écriture de ce roman ?

- L'occasion de réfléchir à ce que sont les êtres humains et le monde dans lequel nous vivons. La démarche du romancier est celle de la curiosité. Je m'interroge sur les autres en mettant en scène des personnages. J'espère, quand je livre le résultat de mes réflexions au lecteur, que celui-ci est également amené à se poser des questions. Un roman est réussi s'il permet au lecteur de s'interroger. Dans la vie, on est tenté de poser des jugements rapidement, on a rarement le loisir de réfléchir posément aux sujets abordés ou vécus par les autres. Le roman permet de le faire".

Cliquez ci-dessous sur "Job Armel" pour retrouver mes autres articles consacrés à cet auteur belge. 

mercredi 15 mai 2024

La Maison Maurice Carême à Anderlecht

                                     


Bonne nouvelle :  le gouvernement régional bruxellois a décidé de classer comme monument l'ancienne maison du poète belge Maurice Carême (1899-1978) et son jardin à Anderlecht. Cette maison à trois façades a été construite en 1933 selon les plans de l'architecte Charles Van Elst pour le poète. Maurice Carême et son père ont participé activement à sa construction. D'inspiration régionaliste, elle est réalisée dans un style évoquant les anciens béguinages (l'architecte Charles Van Elst est connu pour la restauration de la Maison d'Erasme et du béguinage d'Anderlecht).

Né en 1899 à Wavre, Maurice Carême était instituteur. Il a poursuivi en parallèle une carrière littéraire avec la publication de 80 ouvrages diffusés dans toute la francophonie et traduits en plusieurs langues. Deux écoles portent aujourd'hui son nom, et ses poèmes ont été étudiés par de nombreux écoliers. 

A la mort du poète en 1978, sa maison d'Anderlecht est conservée dans son état d'origine et transformée en musée. Pendant 40 ans, sa compagne Jeannine (décédée en 2020) va faire vivre sa mémoire en devenant présidente de la Fondation Maurice Carême, en veillant sur son oeuvre et sa maison, en répondant aux questions des journalistes, et en tenant chaque année un stand à la Foire du Livre de Bruxelles. 

                 

mercredi 1 mai 2024

Stéphane Lambert et les livres de poche

                            


L'écrivain belge Stéphane Lambert s'est confié à la revue "Le Carnet et les Instants" du Service de Promotion des Lettres de la Fédération Wallonie-Bruxelles :

"En 2014, c'était un coup de coeur de mon éditrice pour mon texte sur Rothko qui avait eu une vie très honorable en grand format aux Impressions Nouvelles. En publiant deux de mes textes simultanément, c'était une manière pour mon éditrice de sceller notre collaboration et d'appuyer la publication de l'inédit. C'était une bonne idée, car ces deux titres sont ceux de mes livres qui se vendent le mieux. Pour les autres titres en poche, ce furent chaque fois des rééditions de textes épuisé en grand format chez Arléa, s'ils se sont vendus raisonnablement bien. A deux reprises, j'ai publié directement un inédit en pochez chez Arléa.

La vie du format poche a une dynamique propre, qui est moins dépendante du diktat médiatique. Les lecteurs peuvent acheter sur un coup de tête un livre de poche, ce qui est moins vrai pour un livre grand format. Comme il s'agissait de deux livres sur des peintres (Monet et Spilliaert), c'était parfait pour les librairies dans les musées. Une actualité comme une importante exposition peut aussi accélérer ou justifier le passage ou la publication en poche d'un livre sur un peintre. L'économie du poche est aussi moins lourde.

D'ailleurs, en tant qu'auteur, on ne touche pas grand chose sur les poches, mais ils atteignent un nouveau public, les jeunes par exemple qui lisent principalement dans ce format. Cela donne la possibilité d'entrer dans le domaine scolaire. Et dans les salons littéraires, j'ai remarqué que le public achète aussi plus facilement des livres de poche. Le passage en poche met aussi à la disposition des lecteurs qui voudraient davantage me découvrir un bel ensemble de mes textes.

Je relis les épreuves. Cela permet de corriger les coquilles qu'on aurait repérées dans la précédente édition, de retoucher certains passages, voire d'actualiser certaines informations. Je suis également consulté pour le choix du visuel et la nouvelle quatrième de couverture.

Avec un marché si petit, dominé par l'édition française, à l'heure où la littérature occupe de moins en moins de place dans la société, si on veut vraiment faire exister une collection de poche dédiée aux écrivains belges, il faut qu'elle soit subventionnée. C'est une question de survie de notre patrimoine et de notre création littéraire".