Isabelle Bary a répondu à trois questions de la revue "Le Carnet et les Instants" du Service de Promotion des Lettres de la Fédération Wallonie-Bruxelles :
"Votre premier roman, "Zebraska" (publié chez Luce Wilquin), est reparu six ans plus tard chez J'ai lu. Comment cela s'est-il passé ?
- "Zebraska" avait rencontré un vif succès en Belgique mais publié par une maison d'édition belge aux petits moyens, il avait peiné à se faire une place hors des frontières. Grâce à un agent français à qui le livre a plu, il a atterri chez une éditrice de J'ai lu, qui a proposé de le rééditer sans attendre une éventuelle nouveauté, mais sous forme inédite pour le marché français. Pour "Zebraska" qui aborde le sujet de la différence chez un adolescent à haut potentiel et celui du monde de demain, mon enthousiasme à le voir réédité en format poche était accompagné de l'idée de pouvoir, grâce à son petit prix, toucher plus facilement les jeunes par le biais des écoles. Ce qui a d'ailleurs été le cas, puisque j'ai rencontré des centaines de jeunes grâce au sujet, bien sûr, mais aussi aux avantages financiers du format. Cela donne au livre une seconde vie, au niveau non seulement national, mais aussi international, puisque les maisons d'édition françaises de format poche distribuent leurs romans dans toute la francophonie.
- Est-ce que vous avez été associée comme auteure à cette réédition ?
- Lorsque J'ai lu m'a proposé une collaboration, "Zebraska" avait déjà six ans et j'avais moi-même envie d'y apporter quelques changements, de le moderniser en quelque sorte. L'idée pour J'ai lu était d'atteindre un lectorat plus étendu (le marché français bien sûr) mais aussi des personnes qui n'avaient rien à voir avec le haut potentiel. Or, ma première version se passait essentiellement dans la tête de mon héros, ce qui était moins accessible pour quelqu'un qui n'était pas du tout intéressé par le sujet a priori. Nous avons réfléchi ensemble à comment améliorer le récit existant afin de l'actualiser et de le rendre plus abordable pour tous. Plusieurs idées sont sorties de ces réflexions : écourter certaines parties trop détaillées, aller vers plus d'action et faire davantage agir le personnage principal au lieu de le faire toujours penser, ajouter un nouveau personnage qui permettrait plus d'interactions, simplifier l'écriture notamment par la réécriture du texte au présent et par un découpage plus cadencé et des chapitres plus courts. C'était très technique, tout nouveau pour moi, très intéressant. Je travaillais plusieurs chapitres, puis les envoyais à J'ai lu qui me donnait son feed-back. C'était un réel plaisir de travailler avec cette équipe, dont le professionnalisme est incroyable.
- Outre une forme de reconnaissance, qu'a représenté pour vous cette édition en poche ?
- La reconnaissance des pairs, bien sûr, mais aussi un suivi professionnel. Je me suis senti entourée, épaulée, portée par une structure qui avait les moyens de le faire. Ensuite, il y a la visibilité. Le marché touché est bien plus vaste. Les ventes peuvent ainsi exploser et donner de la crédibilité (même si cela n'a pas forcément un lien de cause à effet!) à notre travail d'auteur. Cela ouvre des portes. Cette édition, comme je l'ai évoqué plus tôt, m'a également permis de visiter beaucoup de classes d'ados entre 16 et 18 ans, de dialoguer avec des jeunes sur les sujets de la différence, de l'importance du livre et du monde de demain. Enfin, et ce n'est pas le moindre des cadeaux, cette forme de notoriété professionnelle m'a permis de proposer une adaptation BD du roman à plusieurs maisons d'édition. Les éditions Dupuis ont accepté le projet et nous y travaillons actuellement avec le scénariste Eric Corbeyran, le dessinateur Ludovic Borecki et le coloriste Benoît Bekaert".