A l'occasion des 25 ans de sa librairie, Pierre Bodson s'est confié à la revue "Le Carnet et les Instants" :
"C'est un rêve un peu fou qui s'est réalisé. Originaire de Paliseul dans le Luxembourg belge, j'ai grandi dans la boucherie familiale. Ce n'est pas anodin car j'y ai compris que j'aimerais le contact avec les gens. De plus, les parents de mon meilleur ami d'enfance tenaient une imprimerie et une librairie. Quand ils étaient absents, je prenais la place de cet ami qui n'était pas du tout lecteur. Je craignais le côté gestion et comptabilité. En plus, à l'époque, je me projetais dans l'univers de la chanson, j'étais reconnu pour ma voix remarquée par un professionnel, j'ai participé à des concours de chants, mais mes parents me voyaient plutôt comme instituteur.
Financièrement, c'était un risque et mes parents ont paniqué. D'abord, le projet a été mûri pendant un an avec une étude de marché préliminaire. J'avais l'avantage de ne pas avoir de surface commerciale à louer, et d'être aidé par le salaire de mon épouse. Il faut toujours avancer l'argent pour les livres, parfois des sommes importantes, avant d'en voir le bénéfice. Et la marge bénéficiaire est très faible. Beaucoup s'imaginent que nous gagnons très bien notre vie...mais ils ne prennent pas conscience de la prise de risque ! Le plus gros poste, ce sont les frais de transports. Tout se paie, y compris les retours. Heureusement, nous sommes soutenus par le Syndicat des libraires francophones de Belgique qui fait un travail formidable. Il porte nos revendications et nous soutient sur plusieurs fronts, comme le combat gagné pour le prix unique du livre, la création de Librel pour contrer Amazon, des formations, les relations avec certains partenaires comme les maisons de distribution, etc. Seuls, nous aurions plus de difficultés pour obtenir des résultats.
Il faut concilier la passion de la lecture, la gestion et le feeling avec la clientèle. Les gens sont venus car il y avait un réel manque à l'époque pour les amoureux de littérature et les curieux de culture à Libramont, mais aussi à Saint-Hubert, Neufchâteau et Bertrix. Très vite, ils ont aussi pris l'habitude de commander. Depuis 25 ans, il n'y a pas un seul jour sans une commande. Notre succès est aussi lié à la qualité de la clientèle qui est conciliante et accepte d'attendre ses livres.
Comme petit libraire, on n'a pas beaucoup le temps de lire, c'est le cas de le dire, en particulier tout ce qui paraît aux rentrées littéraires. Heureusement, les représentants ont vite compris le style de la maison, son identité, sa cohérence. Par exemple, nous vendons aussi des cartes postales mais nous privilégions celles avec des textes qui ont du sens. Pour nous aider, il y a aussi tout ce qui tourne autour de notre passion pour la littérature : les grandes émissions comme "La grande librairie", "Sous couverture", en radio "La librairie francophone" que je n'ai pas ratée une seule fois d'autant que des libraires y interviennent, les journaux et les revues dont une qui me tient particulièrement à coeur : "Page".
Si ce sont surtout des dames qui participent à nos animations, je constate qu'il y a maintenant beaucoup de jeunes papas qui s'intéressent à la littérature jeunesse. Sinon, les hommes viennent plus pour les BD et les romans policiers ainsi que pour les livres régionaux ou traitant de la guerre, la nature, le jardinage. Les apéro-lectures, c'est un lieu où l'on partage ses propres expériences, son vécu, ses émotions, où l'on se dévoile parfois à partir d'une fiction. Peut-être les hommes ont-ils plus de mal à se confier ?".
Plus d'infos : letempsdelire.be
Privilégions nos libraires au lieu de commander sur Amazon !
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