mercredi 25 octobre 2017

Amélie Nothomb et la Belgique

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Dans la longue interview accordée à la revue "Le Carnet et les Instants" du Service de Promotion des Lettres de la Fédération Wallonie-Bruxelles, la baronne Amélie Nothomb répond à plusieurs questions sur la Belgique :

"Accordez-vous une attention particulière aux livres d'écrivains belges francophones?
- Il n'est pas primordial pour moi qu'un auteur soit belge ou non. Mais ça me fait plaisir quand je lis un auteur belge. Ces dernières années, j'ai, par exemple, vu émerger Caroline De Mulder. Je trouve qu'elle a beaucoup de talent. C'est une belle personne dans tous les sens du terme.

- On sait aussi votre admiration pour Simon Leys.
- Oui, pour Simon Leys, pour Jacqueline Harpman, pour Simenon, pour tous les grands surréalistes. Nous ne manquons pas de gloires en Belgique, c'est certain.

- Y a-t-il pour vous quelque chose qui définirait la littérature belge?
- Ca me paraît évident :  le surréalisme. Le surréalisme belge précédait sa nomination et lui succède. Je trouve qu'il y a toujours quelque chose de surréaliste dans ce que nous écrivons en Belgique. Je pense qu'on peut qualifier ce que j'écris de surréaliste. C'est plus fort que moi : à aucun moment, je ne me dis "Soyons surréaliste!",  ça vient tout seul. C'est certainement une des manières principales que j'ai d'être belge.

- Vous vous définissez vous-même comme auteur belge?
- Oh oui!

- L'identité belge est-elle plus importante pour vous que la francophone?
- Je ne peux pas dire que francophone n'a aucune importance. J'écris en français et ce n'est pas anodin. Mais l'identité belge est plus importante, parce qu'elle différencie des Français, des Suisses, des Canadiens, et c'est quelque chose qui a du sens.

- Vous êtes une Belge publiée en France :  votre éditeur est-il ouvert à une langue qui n'est pas forcément toujours conforme au français de France?
- Ca a donné lieu à une paranoïa de la part de mon éditeur. Quand il s'est aperçu du style très particulier d' "Hygiène de l'assassin", il a cru que c'était du belge! Le texte était presque entièrement raturé par les correctrices avec la mention "belge". J'ai entièrement raturé les corrections en mettant "Non, ce n'est pas du belge, c'est du Amélie Nothomb!". Il m'a fallu quelques années pour le leur faire comprendre. Par ailleurs, si je me permettais cette liberté, c'était probablement dû au fait que j'étais belge. Donc, finalement, c'est du belge, mais pas de la façon dont ils l'imaginaient!

- Vous vivez en France depuis plusieurs années. Votre écriture est-elle néanmoins toujours marquée par le français de Belgique?
- En arrivant en France, j'ai découvert le français de France et il ne m'a pas déplu. Mais pourquoi ne pas montrer qu'en Belgique, nous avons une autre façon de parler? Ceci dit sans aucun désir revanchard. Mais jamais je n'ai été obsédée par l'idée de ne pas paraître belge. Au contraire, je ne supporte pas qu'on dise que je ne suis pas belge. Je ne sais pas pourquoi les Français disent toujours de moi que je suis "d'origine belge". Je suis belge, pas "d'origine belge"!

- Dans plusieurs interviews, vous avez pourtant évoqué votre sentiment d'apatridie, de ne venir de nulle part. Dans "Biographie de la faim", vous expliquez vous sentir ressortissante de l' "Etat de Jamais".
- Ce sentiment existe toujours mais c'est quelque chose qui a beaucoup évolué en moi suite à la crise de 2010-2011. A la profondeur de mon angoisse lorsqu'on a évoqué la possibilité que la Belgique n'existe plus, j'ai vraiment senti que j'étais de là. A l'impression d'apatridie s'est ajouté le sentiment de quand même être belge. Mon grand sentiment de vague est après tout une manière d'être belge.

- L'accueil de vos livres en Belgique est-il différent de l'accueil que vous recevez en France?
- L'accueil des lecteurs est sensiblement le même en Belgique et en France. L'accueil des journalistes est, lui, différent. D'une manière générale, j'ai constaté plus de vacheries à mon encontre de la part de journalistes belges.

- Vous écrivez vous-même des articles sur les livres des autres. Avez-vous eu récemment des coups de cœur littéraires (belges ou autres)?
- Oui, j'en ai eu un pour le manuscrit de Stefan Liberski qui va paraître en 2018 chez Albin Michel : ça s'appelle "La cité des femmes" et c'est formidable".

Retrouvez la suite de cette longue et intéressante interview dans la revue "Le Carnet et les Instants" que vous pouvez recevoir gratuitement par courrier sur simple demande auprès du Service de Promotion des Lettres de la Fédération Wallonie-Bruxelles. 

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