lundi 5 avril 2010

"L'enfant à l'endroit, l'enfant à l'envers" (Nicole Versailles)

Ce récit autobiographique de Nicole Versailles est une longue lettre à sa grand-mère Eugénie qu'elle n'a pas connue. Huit mois après son décès, son mari Cyrille se remarie, range tout souvenir de sa première épouse et oblige ses deux enfants à appeler "maman" leur nouvelle belle-mère. Suzanne (la fille d'Eugénie) en souffre et cela aura des conséquences sur ses relations avec sa propre fille Nicole : "Au plus profond de mes révoltes d'adolescente, je n'avais pas compris (mais comment l'aurais-je pu?) que son agressivité, son mal-être permanent n'étaient que l'expression de ses propres souffrances si anciennes et si fondamentales. Où aurait-elle pu apprendre à câliner ses enfants, à les prendre sur ses genoux, à les couvrir de baisers et de tendresses, quand elle-même bien trop tôt, avait dû assumer dans l'angoisse une responsabilité qui n'était pas de son âge?".

Cet extrait résume le coeur de ce livre : Nicole a souffert de ne pas être comprise par ses parents (sa maman en particulier), de vivre une enfance bridée par les corsets de la religion, et dénuée de toute fantaisie, liberté et joie de vivre. Elle décide de se retrancher dans le silence et dans ses rêves : "Ne rien dire, faire semblant de rien, encaisser sans broncher, se tisser une carapace d'indifférence... Il s'agissait de survivre. Quant à vivre, elle se disait que ce serait pour plus tard. Quand elle serait grande. Quand elle serait libre". Et le décès de son cousin à l'âge de 16 ans n'arrange rien...

Notre enfance a une influence considérable sur le reste de notre vie. Cela se ressent très fort dans ce livre émouvant et bien écrit. L'auteur n'a plus envie de se taire et de cacher son journal intime. Afin de tourner définitivement la page sur cette période triste de sa vie, elle a voulu comprendre les causes qui remontent au décès de sa grand-mère Eugénie, et raconter à ses enfants et petits-enfants ce qu'elle a vécu et ressenti. J'espère que cet exercice délicat lui aura permis de faire la paix avec son passé et de se sentir plus libre, plus légère et plus heureuse.

4 commentaires :

  1. Merci Vincent pour cette critique de mon livre
    Je constate combien les critiques sont différentes selon les commentateurs, selon leur sensibilité spécifique, selon le thème du livre qui les a davantage marqués
    Un livre ne vous appartient plus, il est au lecteur, qui le garde au chaud de ses appréciations, ou le rejette... alors que son voisin fera l'inverse
    Je me retrouve bien dans cet article, et je t'en remercie!

    RépondreSupprimer
  2. Oui c'est vrai, chaque commentaire est différent, et c'est tellement intéressant de trouver le tissu des différentes sensibilités qui l'expriment!

    J'ai beaucoup aimé ce livre de Coumarine, qui en effet ne lui appartient plus, et s'installe dans les coeurs de qui l'accueille...

    RépondreSupprimer
  3. ...et chaque critique enrichit les autres! On t'y retrouve bien PB!
    Bonne fin de semaine et bonnes vacances!

    RépondreSupprimer
  4. Et le livre est en commande chez mon libraire. Je le trouverai à mon retour de vacances

    RépondreSupprimer