lundi 19 septembre 2022

Bruno Coppens à Namur

                                            


Dimanche 23 octobre 2022

Retrouvez le chef d'oeuvre de Serge Prokofiev,  "Pierre et le loup", l'histoire de petti Pierre qui, un jour, s'aventure hors du jardin de son grand-père. Bruno Coppens vous racontera cette célèbre histoire et invitera le public à jouer avec lui ! Vous deviendrez le chat, l'oiseau, le canard, le chasseur, le grand-père et petit Pierre !   Bruno Coppens sera entouré de cinq musiciens donnant vie aux animaux et aux personnages de l'histoire.

Lieu : centre culturel de Namur.  Prix : 7 euros

Jeudi 27 octobre 2022

A travers son ouvrage "Ma terre promesse", Bruno Coppens nous offre un récit sans fard, une biographie sous forme de déclaration enflammée à une terre qui a tenu toutes ses promesses aux yeux de l'humoriste belge :  le Québec. Notre jongleur de mots national déroule l'écharpe du temps qui couvrait ses états d'âme, ses états d'homme, de père et d'amoureux, et raconte les liens uniques entre la Belgique et "la belle province". Suivez l'amoureux de la langue française dans sa transe atlantique vers sa "terre promesse" dont il s'est amouraché au cours de ses nombreuses tournées s'échelonnant sur une quinzaine d'années. 

Lieu : maison de la poésie de Namur.  Prix :  8 euros 

Plus d'infos sur la Maison de la Poésie de Namur :    www.mplf.be 

mercredi 10 août 2022

La librairie "L'Oiseau-Lire" à Visé

La revue "Le Carnet et les Instants" a interrogé Pierre et Béatrice Cerfontaine, les fondateurs de cette librairie en 1985.

Pierre Cerfontaine :   "En 1985, nous n'avions pas de prêts à rembourser, pas d'enfants. Nous ne risquions pas grand chose. Nous n'imaginions pas que plus de trente ans plus tard, nous serions toujours là, qu'onze personnes travailleraient avec nous dans la librairie, que nous passerions d'un tout petit espace de 34 m2 de l'autre côté de la rue aux 350 m2 d'aujourd'hui avec 32 pièces, et qu'on serait connus jusqu'en France via les auteurs qui viennent chez nous et qui racontent l'accueil qu'on leur réserve. Nous devons être les derniers libraires en activité à avoir encore envoyé nos commandes par la poste ou par téléphone. Avant le fax ! Il y a bien sûr des librairies qui existaient avant la nôtre, mais plus avec les mêmes personnes qu'à leur création, comme "Tropismes" avec la regrettée Brigitte de Meeûs, "Pax" de Philippe Mailleux qui l'a remise, etc. 

La littérature de jeunesse était à ses balbutiements. Nous étions peut-être une dizaine de librairies jeunesse à l'époque avec "La parenthèse" à Liège ou "L'ïle ouverte" à Verviers, qui n'existe plus, "Am Stram Gram" et "Le Rat Conteur" à Bruxelles. En librairies généralistes, "Molière" à Charleroi et "La dérive" à Huy étaient des précurseurs, mais beaucoup de libraires ne voyaient pas l'intérêt de se lancer dans la littérature de jeunesse. Aujourd'hui, c'est devenu une branche rentable. Pour l'édition, il y avait essentiellement L'école des loisirs et le Père Castor. Beaucoup d'éditeurs ne s'étaient pas encore lancés en jeunesse. 

On ne se camoufle pas : c'est un commerce. On ne vend pas n'importe quoi, n'importe comment, mais on est soumis aux lois du commerce. Certains libraires ont parfois tendance à l'oublier ou n'osent pas le reconnaître. Nous proposons aussi des ouvrages qui ont du succès. On a vendu presque 400 fois le dernier roman de Joël Dicker. D'une part, cela dégage des liquidités pour faire vivre la librairie. D'autre part, de quel droit peut-on juger ce que les gens lisent ? Personne ici ne s'accorde ce droit.

On a envie d'aller chercher l'enfant de l'école, de lui donner l'envie de pousser la porte, qu'il n'ait pas peur et qu'il se sente chez lui. Si on ne propose que du pointu, c'est impossible. Bien sûr, nous proposons aussi nos sélections plus personnelles. Notre rôle, c'est de proposer au public non pas ce qu'il aime, mais ce qu'il pourrait aimer. Notre objectif est de mettre à la portée des enfants et des adultes des livres dont la qualité est telle qu'elle les aidera dans leurs choix, dans le sens du bien commun, qu'elle les aidera à vivre. 

D'emblée, je me suis tournée vers les enseignants :  ils ont tout de suite accepté qu'une personne extérieure à l'école entre dans leur classe. Au début, je présentais tout un panel de livres depuis la maternelle jusqu'à la fin des humanités, avec l'idée de susciter le plaisir de la lecture et que chaque élève puisse choisir un livre qu'il aimait. Toutes les six semaines, un vendredi car il n'y a pas école le lendemain, de 19h à 21h, la librairie est au club de lecture des ados. Chacun vient raconter ses coups de coeur ou....écouter, sans obligation de prendre la parole". 

Plus d'infos :   www.loiseaulire.be

mercredi 13 juillet 2022

Eloge du pliant par Colette Nys-Mazure

L'auteure belge Colette Nys-Mazure (dont je vous ai déjà beaucoup parlé) a écrit ce texte "Eloge du pliant" pour la revue "Dimanche" de juillet 2022 :

Il ne s'agissait pas de faire le siège d'une maison, ni même d'en placer un devant la façade d'un café ou d'un commerce de campagne pour signaler au médecin ou au vétérinaire qu'une visite supplémentaire l'attendait, qu'il lui fallait entrer pour s'informer, mais tout simplement de sortir un pliant, une chaise ou un fauteuil les longs soirs d'été selon la coutume villageoise.

Je parle de ce temps où la population sans télévision aimait s'asseoir dehors et converser avec les passants, les voisins assis à proximité. Enfant, j'aimais cet usage de nos grands-parents paternels, installés sur la place entre l'église et son cimetière, un café, la boulangerie et la boucherie, juste en face du château de Bourgogne et son parc. Un pré vaste (devenu depuis parc à voitures) occupait le centre et offrait un vaste espace de jeux pour les enfants. Il n'y avait pas de barrière métallique opaque entre les maisons, les jardins, mais une vie ouverte et confiante.

Depuis la mort accidentelle de son fils aîné suivie de près par celle de son épouse, Bon Papa, vétérinaire apprécié, inspirait un respect teinté de commisération qui se traduisait par un regard apitoyé, chaleureux, posé sur nous, les trois orphelins. Bon Papa trônait littéralement dans son fauteuil, fumant la pipe légendaire qui roussissait sa moustache, aux côtés de son épouse, lectrice élégante. Nous jouions ardemment avec d'autres enfants, en attendant d'aller rejoindre le pliant préparé à notre intention : maintenant, on se calme !

Comme Pierre Sansot (1928-2005), j'entonnerais bien l'éloge du simple pliant sans dossier ni accoudoir, un des objets les plus modestes qui soit pour soutenir la patience et la fatigue, épargner l'humidité de l'herbe lors d'un pique-nique et permettre aux personnes trop âgées pour s'asseoir par terre de participer à la fête familiale champêtre. 

Je reviens au pliant à notre taille d'enfant, calé dans un recoin du long corridor et qui sortait ces soirs bénis pour partager avec les grandes personnes l'illusion d'un temps sans fin où il nous serait permis d'aller dormir plus tard, en vertu d'une grâce princière accordée de temps à autre et dont la rareté accroissait la valeur. C'était notre barque au milieu du lac de Tibériade.

Je n'ai pas une nature nostalgique, je ne m'abîme pas dans les visions que m'offre le rétroviseur, mais j'aime célébrer des moments de la vie qui ont eu cours et laissent en nous des vignettes puériles et joyeuses. Il m'apparaît qu'en ces heures vespérales, nous jouissions du temps de vivre que j'associerais plus tard à la chanson de Georges Moustaki.

"Nous prendrons le temps de vivre, d'être libres, mon amour. Sans projets et sans habitudes, nous pourrons rêver notre vie".

Dans "Le tourbillon de la vie" (oui, Jeanne Moreau), nous savourions ces haltes dans l'herbe puis sur nos pliants à contempler notre monde, tandis que croissaient les ombres, que le clocher de l'église délivrait ses neuf coups et que nous tentions de prolonger encore l'oubli des adultes afin de jouir d'un surcroît de loisir.

Nous savions que nous serions invités tôt ou tard à replier nos sièges, à les ranger, à gagner la chambre de l'étage. Le plaisir suprême était de jouer déjà en pyjama ! Aussi, je souris discrètement lorsqu'une petite fille me parle, comme d'une nouveauté à la une, des soirées pyjamas avec ses copines. Dans mon arrière-pays s'esquissent ces soirées au parfum villageois que personne jamais ne pourra me dérober. Oui, j'éprouve de la gratitude et non de la mélancolie.

Dans le sillage de "Célébration du quotidien", France Culture m'avait invitée à célébrer la chaise longue. Je suis allée à Paris enregistrer l'émission dans un jardin de rêve. Mais, au fond, j'aurais préféré évoquer le pliant !

Colette Nys-Mazure

Cliquez ci-dessous sur "Nys-Mazure Colette" pour retrouver mes anciens articles consacrés à cette auteure belge.

mercredi 15 juin 2022

La librairie "Claudine" à Wavre

Diane Platteuw, la responsable de la librairie "Claudine" à Wavre (ouverte depuis octobre 2020), s'est confiée à la revue "Le Carnet et les Instants" :

"Le projet est né d'une réflexion bien mûrie à un moment de ma vie professionnelle. Je lis depuis l'enfance, j'ai toujours aimé partager mes découvertes littéraires. J'étais déjà prescriptrice pour mes connaissances. De plus, je suis fascinée par la créativité et par le croisement des disciplines culturelles. Ouvrir une librairie, c'est faire de ce partage, de ce goût de la découverte une profession. C'est aussi créer un espace qui participe à la diffusion et à la création culturelles. J'avais aussi envie de créer un projet dans la ville où je vis depuis dix ans et dans laquelle je me suis impliquée. 

J'ai contacté plusieurs libraires en me proposant comme stagiaire. Yves Limauge m'a accueillie dans sa librairie de Woluwé-Saint-Lambert. Il m'a ensuite engagée pendant un an. Il m'avait dit à l'époque que tenir une librairie est un sport de combat. C'est lui qui m'a appris le métier avec talent et passion. Je lui dois un immense merci pour son parrainage. Nous continuons à nous voir régulièrement. Beaucoup de gens viennent à la librairie pour me demander ce que je leur conseillerais pour ouvrir ce genre de commerce. Je réponds que le passage par une autre librairie me paraît essentiel. Il faut se cogner à la réalité :  la trésorerie, les retours, les négociations avec les distributeurs, être attentive à ses charges fixes, etc. Le Syndicat des libraires francophones indépendants est un précieux référent également. Le réseau des libraires indépendantes n'est pas un mythe, et j'ai envie de m'inscrire dans cette dynamique : entre collègues, nous n'hésitons pas à faire appel à l'un ou à l'autre.

Des lecteurs sont venus acheter le livre "Brasiers" de Marie-Pierre Jadin sans savoir qu'elle travaillait ici. Elle apporte une touche particulière au conseil. Elle a une manière différente de lire un texte et de qualifier une écriture, un livre. C'est très excitant aussi de se dire qu'elle est en train d'écrire son deuxième roman. Et Louisa Van Breusegem est stagiaire chez nous. Je l'ai rencontrée dans le cadre d'une réorientation d'études. Elle nous apporte la vivacité de ses 25 ans. Elle appartient à la génération Harry Potter qui traque les nouveautés sur les réseaux sociaux. Elle a un contact différent avec les ados et certains viennent pour elle. 

Librairie généraliste veut dire ouverture. C'est même une condition de survie pour nous à Wavre. Cela me plaît d'avoir un public diversifié qui sait que nous nous couperons en quatre pour lui, pour le conseiller, lui apporter le service qu'il attend. En retour, il comprend nos contraintes et accepte d'attendre si nécessaire. Il sait que nous nous inscrivons dans une autre démarche d'Amazon qui entraîne le dépeuplement du centre-ville par la dématérialisation et la décommercialisation du secteur. 

Nous avons un rayon essais où les ouvrages féministes occupent pas mal de place. Même si la lecture apparait comme une activité plus féminine, notre clientèle est mixte. Ce féminisme, nous l'incarnons aussi en tant que femmes cheffes d'entreprise engagées dans la vie sociale. Sans avoir un axe militant affirmé, on donne de facto une certaine image".

Soutenons nos libraires !  Plus d'infos :   www.librairieclaudine.be

mercredi 11 mai 2022

Prix Goncourt de la nouvelle 2022 pour Antoine Wauters

                                    


Agé de 41 ans, l'auteur belge Antoine Wauters (dont je vous ai déjà parlé) a reçu le Prix Goncourt de la nouvelle 2022 pour "Le musée des contradictions", publié aux éditions du Sous-sol. En Belgique, il avait déjà reçu le prix de La Première pour "Nos mères" et le Prix Marcel Thiry pour "Césarine de nuit".

Deux auteurs belges figuraient dans la liste des six finalistes de ce prix littéraire français :  Antoine Wauters et Jean-Philippe Toussaint. Ces dernières années, deux écrivains belges ont décroché cette récompense :  Eric-Emmanuel Schmitt en 2010 pour "Concerto à la mémoire d'un ange" (éditions Albin Michel) et Caroline Lamarche en 2019 pour "Nous sommes à la lisière" (éditions Gallimard).

Cliquez ci-dessous sur "Wauters Antoine" pour retrouver mes autres articles sur cet écrivain belge.

mercredi 13 avril 2022

Deux nouveaux livres pour Daniel Charneux

                                        


Ancien professeur de français, l'auteur Daniel Charneux a sorti son premier roman il y a une vingtaine d'années. En 2022, il publie deux nouveaux ouvrages :   le roman "Les oiseaux n'ont pas le vertige" chez Genèse Edition et le recueil de poésies "A bas bruit" chez la maison d'édition belge Bleu d'encre. 

Daniel Charneux a confié à la presse :

"Dès mon enfance dans les Honnelles, j'ai été plongé dans la lecture avec un papa instituteur passionné d'écriture et de lecture. D'abord les Tintin pour la découverte du monde, ensuite les poésies apprises à l'école qui m'ont donné l'amour des mots. Puis, j'ai aussi été marqué par mon professeur de français en cinquième secondaire à l'athénée de Dour, qui m'a donné le virus de la poésie et l'envie d'effectuer des études universitaires en romanes.

Dès mes quatorze ans, j'ai été impressionné par un boxeur basque champion d'Europe. J'ai voulu d'une certaine manière raconter son histoire. Il joue donc un rôle de fil conducteur dans ce roman "Les oiseaux n'ont pas le vertige".

J'avoue que le hasard fait que ces deux livres sortent en même temps. Durant le deuxième semestre de 2020, j'ai écrit un poème par jour, donc en plein confinement ! On en a gardé soixante qui évoquent différentes thématiques allant de l'enfance à l'âge vieillissant".

Cliquez ci-dessous sur "Charneux Daniel" pour retrouver mes autres articles consacrés à cet écrivain belge.

mercredi 6 avril 2022

Mustafa Kör, Poète National Belge 2022-2023

                    


Mustafa Kör est un auteur belge d'origine turque né en 1976. Il habite dans la province du Limbourg et son oeuvre la plus récente, "De paix et d'amour", est sortie en janvier. Il a été choisi comme Poète National Belge pour les années 2022 et 2023, avec comme objectif de reserrer les liens entre les milieux littéraires de nos trois communautés linguistiques (un objectif également poursuivi à petite échelle sur ce blog). 

Mustafa Kör est le 5ème Poète National Belge après Charles Ducal (2014-2015), Laurence Vielle (2016-2017), Els Moors (2018-2019) et Carl Norac (2020-2021). Si vous voulez en savoir plus sur eux, cliquez à gauche dans les liens sur leur nom pour retrouver mes anciens articles sur ces auteurs belges.



mercredi 16 mars 2022

La librairie "Melpomène" à Mouscron

 Maria Paviadakis s'est confiée à la revue "Le Carnet et les Instants" à l'occasion des 45 ans de la librairie "Melpomène" à Mouscron qu'elle a reprise en 2017 :

"J'aime la sonorité du mot, et beaucoup de librairies ont un nom qui renvoie à la culture classique ou à l'Antiquité (comme Agora, Antigone, Bibliopolis, Papyrus). L'épouse du fondateur de la librairie, Jacques Bourgeois, était professeure de latin-grec au collège Sainte-Marie tout proche.

Toute ma famille grecque est partie dans le monde pour faire des affaires après la guerre et le régime des colonels. Je suis heureuse :  je suis indépendante, je me développe, je lis, je prends mes décisions moi-même, je suis une passionnée, hyperactive, je fonce puis j'assume ! Heureusement, certaines personnes refusent de passer par Internet, apprécient le conseil et le contact, favorisent le commerce local.

Melpomène, c'est un nom assez pointu, mais je ne souhaite pas donner une image élitiste de la librairie. A l'heure actuelle, il est important d'ouvrir la librairie à des publics très différents. Mouscron est une petite ville avec un centre bourgeois et des quartiers ouvriers qui datent de l'époque industrielle. On est entouré d'une dizaine d'écoles, de nombreux navetteurs viennent de la gare assez proche, il y a un arrêt de bus devant notre vitrine, il faut que celle-ci attire et parle à tout le monde. 

La culture doit être à la portée de tout un chacun. Même si une librairie reflète la personnalité du libraire ou de la librairie, j'ai voulu que Melpomène devienne une librairie généraliste. Même si je n'aime pas Musso, je trouve qu'il doit être en magasin. Il y a des mangas aussi qui font que des écoliers reviennent. Ils sont tout contents et je suis fière de les voir revenir. 

Catherine est une retraitée et une passionnée comme moi. Elle est à l'affût de "Livres Hebdo", de "Lire", des magazines spécialisés. Elle assiste aux rencontres éditoriales, dévore les services de presse, reçoit les représentants des diffuseurs avec moi pour les précommandes, car c'est impossible de tout lire, de tout avoir, de tout vendre. Il y a trop, beaucoup trop. Ce sont aussi des piles et des piles de livres qu'il faut réceptionner, encoder, mettre en rayons. Il y a trop d'entrées, trop de retours. Heureusement, Catherine est plus sélective que moi. Evidemment, il suffit que vous renvoyiez un ouvrage pour qu'on vous le demande...".

Plus d'infos sur "Melpomène" (qui est membre de la plateforme Librel) :   www.melpomene.be

Privilégions ces librairies indépendantes belges au lieu d'Amazon !

mercredi 2 février 2022

"Manger Bambi" (Caroline De Mulder)

                                 

A l'occasion de la sortie de son roman "Manger Bambi", Caroline De Mulder (née en 1976 à Gand) a répondu aux questions des journaux du groupe "L'Avenir" :

"Pourquoi vous êtes-vous intéressée à une adolescente comme Bambi ?

- J'avais envie de parler de la violence féminine qui est un sujet tabou. La taire, c'est priver les femmes d'une partie de leur humanité. J'ai choisi celle des gangs de filles qui est un phénomène très actuel. Et je voulais une fille qui se défende, c'est pourquoi Bambi est forte et ne se laisse pas faire, même si elle fait beaucoup d'erreurs, s'en prend aux mauvaises personnes, a un problème de perception par rapport à ce qui l'entoure. Pourtant, je l'aime bien.

- Vous ne craignez pas que le lecteur la rejette ?

- Je n'ai pas voulu créer un personnage que le lecteur aime mais qu'il ait envie de suivre. Je ne veux pas susciter de la sympathie, mais une certaine forme d'empathie. Bambi est assoiffée de tendresse mais évolue dans un monde très dur.

- On peut la comprendre ?

- Je peux la comprendre, mais je ne l'approuve pas. Elle est confrontée à la violence d'un univers sans repères, sans morale, où règnent le bling-bling, le pognon, et on ne lui a jamais fait voir le monde sous un angle différent. Elle est pourtant consciente du mal, ça la travaille, elle n'est pas dépourvue de morale, elle en recherche.

- La langue des filles est extrêmement codée ?

- Elle est constitutive de l'univers des personnages. La manière de parler révèle une manière de penser et d'être. La langue, c'est non seulement un vocabulaire, un niveau de langage, mais aussi un certain rythme, des images, des expressions. J'ai voulu exprimer la poésie de cette langue ado, argotique, populaire. J'ai essayé de trouver cette poésie du bitume très très brute. Ce travail a été passionnant et jubilatoire.

- Comment êtes-vous arrivée à une telle justesse ?

- Le travail sur la langue est assez semblable à celui sur le fond. Je prends une tranche de réalité et j'en fais autre chose. J'ai écouté cette langue, je l'ai étudiée, je m'y suis plongée et je l'ai sublimée dans ma fiction pour que cela sonne juste. Elle est très savoureuse, elle est d'une incroyable inventivité, et la difficulté était de ne pas en rajouter. J'ai essayé de faire une belle histoire.

- Que signifie le titre, "Manger Bambi" ?

- Il se réfère à la consommation omniprésente dans le livre, à la fois liée au consumérisme et d'ordre sexuel. C'est une forme de renversement ironique, ce jeune être est sur le point d'être consommé, consumé". 

mercredi 12 janvier 2022

La librairie "Le temps de lire" (Libramont-Chevigny)

 A l'occasion des 25 ans de sa librairie,  Pierre Bodson s'est confié à la revue "Le Carnet et les Instants" :

"C'est un rêve un peu fou qui s'est réalisé. Originaire de Paliseul dans le Luxembourg belge, j'ai grandi dans la boucherie familiale. Ce n'est pas anodin car j'y ai compris que j'aimerais le contact avec les gens. De plus, les parents de mon meilleur ami d'enfance tenaient une imprimerie et une librairie. Quand ils étaient absents, je prenais la place de cet ami qui n'était pas du tout lecteur. Je craignais le côté gestion et comptabilité. En plus, à l'époque, je me projetais dans l'univers de la chanson, j'étais reconnu pour ma voix remarquée par un professionnel, j'ai participé à des concours de chants, mais mes parents me voyaient plutôt comme instituteur.

Financièrement, c'était un risque et mes parents ont paniqué. D'abord, le projet a été mûri pendant un an avec une étude de marché préliminaire. J'avais l'avantage de ne pas avoir de surface commerciale à louer, et d'être aidé par le salaire de mon épouse. Il faut toujours avancer l'argent pour les livres, parfois des sommes importantes, avant d'en voir le bénéfice. Et la marge bénéficiaire est très faible. Beaucoup s'imaginent que nous gagnons très bien notre vie...mais ils ne prennent pas conscience de la prise de risque ! Le plus gros poste, ce sont les frais de transports. Tout se paie, y compris les retours. Heureusement, nous sommes soutenus par le Syndicat des libraires francophones de Belgique qui fait un travail formidable. Il porte nos revendications et nous soutient sur plusieurs fronts, comme le combat gagné pour le prix unique du livre, la création de Librel pour contrer Amazon, des formations, les relations avec certains partenaires comme les maisons de distribution, etc. Seuls, nous aurions plus de difficultés pour obtenir des résultats.

Il faut concilier la passion de la lecture, la gestion et le feeling avec la clientèle. Les gens sont venus car il y avait un réel manque à l'époque pour les amoureux de littérature et les curieux de culture à Libramont, mais aussi à Saint-Hubert, Neufchâteau et Bertrix. Très vite, ils ont aussi pris l'habitude de commander. Depuis 25 ans, il n'y a pas un seul jour sans une commande. Notre succès est aussi lié à la qualité de la clientèle qui est conciliante et accepte d'attendre ses livres.

Comme petit libraire, on n'a pas beaucoup le temps de lire, c'est le cas de le dire, en particulier tout ce qui paraît aux rentrées littéraires. Heureusement, les représentants ont vite compris le style de la maison, son identité, sa cohérence. Par exemple, nous vendons aussi des cartes postales mais nous privilégions celles avec des textes qui ont du sens. Pour nous aider, il y a aussi tout ce qui tourne autour de notre passion pour la littérature :  les grandes émissions comme "La grande librairie", "Sous couverture", en radio "La librairie francophone" que je n'ai pas ratée une seule fois d'autant que des libraires y interviennent, les journaux et les revues dont une qui me tient particulièrement à coeur : "Page".

Si ce sont surtout des dames qui participent à nos animations, je constate qu'il y a maintenant beaucoup de jeunes papas qui s'intéressent à la littérature jeunesse. Sinon, les hommes viennent plus pour les BD et les romans policiers ainsi que pour les livres régionaux ou traitant de la guerre, la nature, le jardinage. Les apéro-lectures, c'est un lieu où l'on partage ses propres expériences, son vécu, ses émotions, où l'on se dévoile parfois à partir d'une fiction. Peut-être les hommes ont-ils plus de mal à se confier ?".

Plus d'infos :   letempsdelire.be

Privilégions nos libraires au lieu de commander sur Amazon ! 

mercredi 5 janvier 2022

Meilleurs voeux pour 2022 !

Le monde littéraire belge se porte-t-il bien ? Malgré les difficultés, je voudrais partager ces deux éditoriaux différents mais plutôt optimistes :

1° Editorial de Marc Pasteger dans "Le Soir Mag" :

Au sein du monde culturel malmené par la crise sanitaire et ceux qui la gèrent, il n'y a pas que des victimes. Le livre se porte très bien, de façon même inespérée en comparaison d'une époque récente. On sait qu'en Belgique et plus encore en France, les librairies ont été un temps fermées. En cette fin 2021, le secteur affiche une santé exceptionnelle. Comparés à ceux de 2020, les chiffres sont excellents, mais face à une période atypique, évidemment non représentatifs. En revanche, selon Vincent Montagne, président du Syndicat national de l'édition (français), le secteur devrait croître de 19% en 2021 par rapport à ses niveaux de 2019, du jamais vu depuis des années. Ceux qui relativisaient les statistiques en expliquant que le livre avait bénéficié momentanément d'un report d'activités culturelles en rade se sont trompés sur le caractère du phénomène :  il dure. Le Covid aura permis à de nombreux acheteurs de (re)découvrir un plaisir infini :  la lecture. Dans le même temps, "Le Monde" notait l'ouverture de librairies indépendantes ayant la cote, plus que les rayons spécialisés de certaines grandes surfaces. En papier (toujours très majoritaire), en digital, en audio, vendu en ligne ou en magasin, le livre ne se contente plus d'un glorieux passé : il s'autorise un avenir prometteur !  La diversité de la production permet à tout un chacun de trouver son bonheur. De l'essai polémique aux conseils pour ados d'une "youtubeuse" en passant par le thriller faisant frémir ou les recettes de cuisine faisant saliver, la librairie constitue une sorte de caverne d'Ali Baba où les trésors attendent les clients les plus différents. On vous souhaite, dès maintenant et au long de 2022, de dénicher ceux qui vous sont destinés....

2° Editiorial de Nausicaa Dewez dans "Le Carnet et les Instants" :

En 2005, Jean-Luc Outers donnait à l'édito un titre enthousiaste :  "Ils nous donnent des ailes". "Ils", c'étaient François Weyergans et Jean-Philippe Toussaint, lauréats cet automne-là respectivement du Prix Goncourt (pour "Trois jours chez ma mère")  et du Médicis (pour "Fuir"). Seize ans plus tard, une autrice belge inscrit à nouveau son nom au palmarès de ce que l'on a coutume de désigner comme les grands prix littéraires d'automne (Goncourt, Renaudot, Médicis, Femina, Interallié, Académie française) qui allient prestige et garantie de vente substantielles. Amélie Nothomb a reçu le prix Renaudot le 3 novembre 2021 pour "Premier sang", paru chez son éditeur historique Albin Michel.

Cette récompense-là nous donne-t-elle des ailes ? D'aucuns pourront bien sûr argüer que le Goncourt est supérieur au Renaudot et qu'en 2021, Amélie Nothomb est seule face au doublé qui faisait le sel du millésime 2005. On aurait pourtant tort de bouder un événement rare à plus d'un titre. Outre les seize ans d'attente déjà évoqués, l'autrice d' "Hygiène de l'assassin" est en effet la troisième lauréate belge du Renaudot seulement : depuis sa création en 1926, celui-ci n'avait en effet récompensé jusqu'à présent que Conrad Dettez et François Weyergans, encore lui. Par ailleurs, cette distinction hexagonale souligne en creux l'absence de l'autrice au palmarès des plus grands prix belges consacrés au roman.

Le Renaudot est arrivé aux premiers jours de la campagne "Lisez-vous le belge ?", deuxième édition de l'opération de mise à l'honneur du livre belge dans les librairies, les bibliothèques, les classes, les médias,... Coïncidence à double tranchant. Un prix de cette importance a placé de facto un livre belge au centre des attentions. Mais il a aussi conforté le déséquilibre, que ne cessent a raison de déplorer maisons d'édition, auteurs et autrices concernés, entre l'intérêt réservé aux ouvrages estampillés par les grandes maisons parisiennes et la portion congrue laissée aux livres publiés en Wallonie ou à Bruxelles, quelle que soit, dans les deux cas, la nationalité des auteurs.

Face à ce déséquilibre, "Lisez-vous le belge ?" met en exergue dans un même élan livres d'auteurs belges publiés à l'étranger et livres publiés en Belgique, la curiosité pour les uns menant à s'intéresser aux autres et vice-versa. Des opérations similaires sont menés par les Québecois ("Le 12 août, j'achète un livre québécois!") et les Suisses ("la Quinzaine du livre suisse"). Dans un espace francophone dont Paris reste le centre littéraire et culturel indiscuté, les Francophonies périphériques ont ainsi conçu des dispositifs pour braquer les projecteurs sur le dynamisme de la création littéraire en français hors de France. Ces campagnes de promotion ont aussi une vertu informative :  avec le déficit de reconnaissance vient très souvent le défaut de connaissance.