mercredi 26 octobre 2016

Les 5 ans de la collection Plumes du Coq

Plumes du coq

Après avoir exercé le métier d'imprimeur, Olivier Weyrich lance en 2002 une maison d'édition qui porte son nom, et l'implante chez lui à Neufchâteau en province du Luxembourg. Le succès est au rendez-vous et l'entreprise emploie aujourd'hui sept salariés. Il commence par l'édition de beaux livres et d'ouvrages pratiques, mais il confie que "j'ai réalisé qu'il me fallait une collection littéraire pour être reconnu comme éditeur".

La collection "Plumes du Coq" est dirigée par un triumvirat composé d'un éditeur (Olivier Weyrich) et de deux directeurs de collection (Christian Libens et le regretté Alain Bertrand, remplacé ensuite par Frédéric Saenen).

Christian Libens explique à la revue "Le Carnet et les Instants" :   "Nous publions de la littérature générale ayant pour spécificité des décors totalement ou partiellement enracinés en Belgique francophone. Nous ouvrons une fenêtre aux auteurs d'ici et maintenant". Frédéric Saenen rajoute : "Nous publions de la littérature qui s'assume comme ancrée, située dans des territoires qui n'ont pas toujours auparavant été valorisés ni considérés comme un cadre digne de ce nom pour le roman. Mais écrire une histoire qui se passe en Belgique n'est pas un sésame. L'exigence littéraire prime : ce que nous recherchons, c'est l'affirmation d'une parole originale, dans un cadre wallo-bruxellois".

Que trouve-t-on dans le catalogue de la collection "Plumes de Coq"?   "Les étoiles de l'aube" (Bernard Gheur), "La malédiction de l'abbé Choiron" (Armel Job), "La danse de Pluton" (Frédéric Saenen), "La forêt d'Apollinaire" (Christian Libens), "Ma mère, par exemple" (André-Joseph Dubois), "Le grand cerf" (Nicolas Marchal), "Chaussée de Moscou" (Xavier Deutsch), "La promesse d'Almache" (Alain Dantinne), etc.

Personnellement, j'ai lu trois livres de cette collection :

- "Le lait de la terre" (Alain Bertrand) :  http://ecrivainsbelges.blogspot.be/2013/01/le-lait-de-la-terre-alain-bertrand.html

- "L'été sous un chapeau de paille" (Alain Bertrand) :   http://ecrivainsbelges.blogspot.be/2014/07/lete-sous-un-chapeau-de-paille-alain.html

- "L'Enfance unique" (Frédéric Saenen) :   http://ecrivainsbelges.blogspot.be/2017/07/lenfance-unique-frederic-saenen.html

Et c'est "L'été sous un chapeau de paille" qui est mon préféré parmi ces trois livres.

La plupart des titres de la collection s'écoulent à 400 ou 500 exemplaires, à l'exception du livre "Les étoiles de l'aube" de Bernard Gheur qui a eu plus de succès et obtiendra le Prix des Lycéens de Littérature. Olivier Weyrich explique :   "Economiquement, la collection n'a pas un véritable impact sur la maison d'édition. On arrive juste à l'équilibre, atteint grâce aussi à l'aide de la Fédération Wallonie-Bruxelles. "Plumes de Coq" valide par son existence les autres ouvrages publiés chez Weyrich. Grâce à la collection, nous sommes reconnus comme une véritable maison d'édition".


mercredi 19 octobre 2016

Interview d'Eric-Emmanuel Schmitt

Eric-Emmanuel Schmitt Portrait

Fin septembre, l'écrivain belge Eric--Emmanuel Schmitt a répondu aux questions du journaliste Raphaël Morata pour le magazine "Point de Vue" :

"Maintenant que vous vous faites interviewer par le héros de votre propre livre, vous rendez la vie difficile aux journalistes qui viennent vous voir...
- Disciple de Diderot, j'aime le jeu littéraire. Augustin, le héros du roman, voulait rencontrer un passionné des religions. Je n'allais pas laisser ma place à un autre. Il y avait cependant un piège, celui de la complaisance. Soit dire trop de bien de soi, soit dire trop de mal, ce qui est la même chose. Mais dans le regard bienveillant d'Augustin, je me suis trouvé sympathique.

- Doit-on prendre pour argent comptant toutes les affirmations de votre double littéraire :
- Je n'ai travesti, "proustianisé", que le village où j'habite en Belgique, en le baptisant Guermanty. Sinon tout ce que Schmitt affirme (j'ai l'impression de parler comme Alain Delon!) est authentique. Je me suis même surpris à distiller quelques confidences. Toutefois, je pense que l'écrivain doit garder certains secrets. Car de littéraire, on risque de finir dans le littéral.

- Vous n'auriez pas pu faire cet exercice à vos débuts?
- Jeune, en quête de reconnaissance, vous êtes plus en démonstration de vous-même que vous-même. On en fait toujours trop, et on s'éloigne de soi. Avec le temps et au fil des succès (et fort heureusement pour moi, je l'ai eu très rapidement), vous vous débarrassez de ce fardeau. Du coup, vous poussez le bouchon toujours un peu plus loin, dépassant les limites avec audace, insolence et folie.

- Votre roman débute comme une comédie fantastique, puis brusquement, un attentat islamiste à Charleroi survient...
- J'ai voulu retrouver cet état de sidération qui nous a tous frappés lors du drame du Bataclan. J'ai d'ailleurs pris la plume pour écrire ce roman au lendemain de ce drame effroyable. Je ne voulais pas décrire, mais comprendre l'irruption de la violence dans nos existences. La vie est une tragédie. Inutile d'écrire des tragédies. N'en rajoutons pas.

- Pensiez-vous que la Belgique pouvait, elle aussi, être frappée par le terrorisme?
- A entendre le juge antiterroriste belge, c'était impossible. On ne brûle pas la maison dans laquelle on habite... Etre le "nid" des terroristes, nous protège... Quelle complaisance! Comme disait le général de Gaulle, "On ne sort de l'ambiguïté qu'à ses dépens".

- Comment avez-vous vécu les attentats de Bruxelles de mars 2016?
- Ce furent des heures atroces. J'avais des proches à l'aéroport de Zaventem. Ils se sont envolés quinze minutes avant l'explosion. La personne qui les a enregistrés est morte. J'ai su qu'ils allaient bien après de longues minutes d'une angoisse extrême.

- Au fil de l'écriture, avez-vous eu l'impression d'être rattrapé par l'actualité?
- Quand on a compris le principe du terrorisme, on devient très vite Cassandre. Cela m'a frappé quand j'ai appris, cet été, l'exécution du père Hamel. L'attentat dans mon livre se passe à la sortie d'une église...

- Pourquoi avoir choisi Charleroi comme décor de votre livre?
- Ce n'est pas une ville symbole comme Paris ou Bruxelles. Pour moi, c'est la vie quotidienne de gens modestes. Y faire naître un sentiment de terreur m'est insupportable. J'aime les Carolos, ses habitants. Ils sont à l'image de la juge Poitrenaud de mon roman. Une Poelvoorde au féminin, qui passe du coq à l'âne, du sublime au trivial. Le "tout droit dehors", comme on dit en Belgique.

- Cette juge s'exclame d'ailleurs à un moment du livre : "Il faut foutre en examen le Dieu d'aujourd'hui".
- Face à tant de violences, on peut se poser la question d'un Dieu cruel. En tant qu'agnostique croyant, je ne peux apporter une réponse définitive. J'habite l'ignorance avec confiance. La foi n'est pas une manière de connaître, mais une manière de vivre l'ignorance. Le fanatisme religieux, c'est la surcompensation du doute. Ce sont des gens qui veulent avoir des certitudes sur l'existence de Dieu. Comme je le dis dans le livre, la violence est une maladie de la pensée. Une pensée qui refuse de ne pas savoir.

- L'Eric-Emmanuel Schmitt du livre vit hanté par ses admirations (Diderot, Colette, Mozart, Debussy, Pascal, Charles de Foucauld, etc.). Aucun auteur récent! N'est-ce pas contradictoire avec le fait d'être un nouveau membre de l'Académie Goncourt qui doit s'intéresser à ses contemporains?
- Je suis un "mécontemporain" qui vient juste d'ouvrir la porte en acceptant de faire partie de ce jury. Jusqu'à présent, je ne lisais et relisais que les classiques. C'est ma formation. Je suis entré à l'Ecole normale supérieure de la rue d'Ulm en latin et en grec. Pour moi, j'étais l'intime de Sophocle et Homère. Le succès m'a appris que j'étais bien de mon époque puisque mon temps me faisait la fête.

- Que vous apportent vos lectures....d'aujourd'hui?
- Elles m'ont permis de comprendre où je me situais dans le monde littéraire. De mieux définir ma singularité, celle de m'être risqué à une écriture fluide et volontairement accessible. La simplicité, ce n'est pas le simplisme. La simplicité, c'est toutes les difficultés résolues. Le simplisme, l'ignorance des difficultés. Mais aux yeux des imbéciles, c'est pareil.

- Vous pourriez écrire autrement?
- J'ai un rapport à la langue d'une grande aisance. Je suis un pasticheur incroyable. Je le dis sans forfanterie. Je peux vous écrire un texte dans n'importe quel style. A Normale sup, j'étais connu pour ce don : je faisais du faux Chateaubriand, du faux Duras, du faux Victor Hugo. Je fais des vers comme je respire. Mais moi, j'écris mes livres dans mon style.

- Votre été n'a pas été en pente douce?
- Un truc de fou. J'avais tout le temps avec moi une valise pleine de livres pour les Goncourt. J'ai joué un mois au Festival d'Avignon "Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran", et j'allais voir des spectacles pour les acheter et les monter dans mon Théâtre Rive Gauche. Et pour couronner le tout, à la demande de France 2, je suis allé à Rio, comme commentateur décalé des épreuves d'athlétisme des Jeux Olympiques. Je suis le fils d'une championne de sprint.

- "Faire bien, vite et beaucoup : telle est ma devise", dites-vous dans votre livre?
- J'y livre aussi l'un de mes secrets : je vis l'existence d'un être parti trop tôt. Je vis pour deux. Comme un respect de mémoire. Je ne perds pas une seconde, pas une miette... J'ai une sérénité métaphysique, mais j'ai une inquiétude existentielle.

- Avoir un théâtre, c'est aussi beaucoup de stress?
- J'ai pris le risque d'être chez moi parce que je voulais être libre. Cela m'agaçait de devoir appeler les directeurs pour leur vendre mes projets. La liberté, cela coûte cher... Disons des inquiétudes. Mais j'aime le pouvoir d'entreprendre. Je suis entouré d'une équipe formidable. C'est presque une aventure familiale.

- Votre Théâtre Rive Gauche propose "Le Chien"?
- Cette oeuvre a été présentée cet été dans le Off du Festival d'Avignon. Je n'y croyais pas trop. J'avais donné le droit de le faire à deux metteurs en scène parce que j'avais confiance en eux. Mais je n'ai même pas regardé l'adaptation qu'ils avaient tirée de cette nouvelle extraite du recueil "Les Deux Messieurs de Bruxelles". C'est ma préférée, la mieux écrite. J'y suis allé comme tous les spectateurs voir le résultat. Et comme tout le public, à la fin, j'étais debout en larmes. Un gros choc. Une déflagration. Donc, j'ai pris le risque de la monter à Paris.

- Acceptez-vous facilement que l'on s'empare de vos oeuvres?
- Je me souviens d'avoir participé avec Le Clézio à l'émission "Bouillon de culture". Pivot lui demandait si comme moi, il pourrait écrire des pièces de théâtre. Le Clézio avait répondu : "Non, je n'accepterais pas d'être dépossédé de mes textes". C'était très juste. Moi, d'emblée, j'écris pour être dépossédé, pour qu'ils appartiennent au metteur en scène, aux acteurs, à la vie...".

mercredi 12 octobre 2016

Interview de Xavier Hanotte

                       Résultat d’images pour Xavier Hanotte

A l'occasion de la sortie de son nouveau roman "Du vent", l'auteur belge Xavier Hanotte a répondu aux questions de la revue "Le Carnet et les Instants" (que vous pouvez recevoir gratuitement par courrier sur simple demande auprès du Service de Promotion des Lettres de la Fédération Wallonie-Bruxelles) :

"Pourquoi ce délai plus long que d'habitude entre la parution de "Des feux fragiles dans la nuit qui vient" et "Du vent"?
- Une première raison est d'ordre physique. J'ai connu des ennuis de santé qui ne me permettaient pas de me concentrer comme j'en ai l'habitude sur l'écriture d'un roman. Mais il y avait aussi des raisons liées à la création. Avec "Des feux fragiles", j'étais arrivé au bout d'un cycle. Ce livre, j'y avais pensé avant même d'écrire "Manière noire". C'était en quelque sorte mon premier roman à retardement, advenu après tous ceux qu'il avait inspirés. Et donc, après "Des feux fragiles", je me suis posé la question s'il ne fallait pas songer à renouveler ma manière d'écrire. Tout en me disant que je le ferais uniquement si j'en ressentais le besoin. Aucune angoisse là-dedans, mais une interrogation sans doute classique : est-ce que j'ai encore quelque chose à dire et comment? Mes problèmes de santé s'y sont ajoutés. Pour cette raison, relancer la mécanique s'est avéré plutôt compliqué. Après "Des feux fragiles", j'avais d'ailleurs embrayé sur autre chose :  un petit roman qui reprenait Barthélemy Dussert et Trientje là où je les avais laissés à la fin du "Couteau de Jenufa". Le titre provisoire était - et est toujours - "Un parfum de braise". Quelques pages existent et je compte bien m'y remettre, car "Du vent" est bouclé depuis octobre 2015 et l'envie est là.

- Qu'est-ce qui a déclenché la rédaction de "Du Vent"?
- Je m'en suis rendu compte a posteriori. Au départ, il y a un minuscule passage que l'on trouve dans "De secrètes injustices". Le commissaire Delcominette y relate à ses inspecteurs l'évasion du truand italien Donato. Ce dernier a emprunté l'uniforme d'une infirmière qu'il a ligotée avec de la bande Velpeau. L'inspecteur Marlaire, avec son humour un peu gras et macho, suggère alors de revendre les photos à une revue de bondage pour la caisse des anniversaires. Et bien entendu, Trientje ne sait pas de quoi il s'agit. Bon, soyons clairs, le bondage ne me fascine pas spécialement. Mais puisqu'il existe, quelle histoire raconte-t-il? Aucune puisqu'il neutralise tout. C'était donc un défi de narration. Si le personnage ligoté est immobile, l'intrigue aussi! Si Bénédicte Gardier ne peut pas bouger, comment faire évoluer son histoire? Donc, puisque j'aime les paradoxes, je me suis amusé à introduire une dimension de suspense dans une situation qui, a priori, ne l'autorisait pas. Je me disais aussi qu'il fallait introduire une touche d'humour, utiliser la qualité parodique du bondage tel qu'on en voyait dans presque tous les films d'espionnage des années 1960. Je me souviens qu'alors j'avais du mal à y croire - comme Jérôme Walque - tant les nœuds de cinéma semblaient aussi lâches que les scénarios... Bref, comment tirer tout ce qu'il y avait à tirer d'une situation par définition assez pauvre? Autre aspect encore : je voulais écrire en proscrivant toute vulgarité alors que le sujet semblait plutôt trivial. Encore un défi amusant. Et puis, on m'a tellement répété qu'il n'y avait jamais de sexe dans mes bouquins... Et bien, il n'y en a pas davantage dans "Du vent"...malgré son sujet!

- Mais le livre comporte également le roman sur Lépide. D'où vous est venue cette idée de lui consacrer un texte?
- Il s'agit d'une idée très ancienne. Adolescent, j'étais fasciné par un certain théâtre, celui de Giraudoux ("La Guerre de Troie n'aura pas lieu"), de Camus ("Caligula") ou de Montherlant ("La guerre civile"). L'envie est alors née d'investir moi-même l'Histoire et de lui faire dire quelque chose qui me soit personnel. Et Lépide m'intéressait de longue date, parce que c'est un personnage très méconnu. Ceux qui s'intéressent à l'histoire romaine et au second triumvirat retiennent Octave et Antoine. Ils oublient Lépide, ou se contentent de très peu. Voire divaguent. Je voulais rendre justice à un personnage que je puisse aussi, au même moment, "remplir". Du coup, puisqu'il écrit les deux récits en simultanéité (celui de Bénédicte Gardier et celui de Lépide), Jérôme Walque doit jongler avec des registres différents, voire opposés. Jusqu'à découvrir, par moments, que les extrêmes peuvent se rejoindre...

- Quelle image voulez-vous donner du personnage de Lépide?
- Lépide est un homme de bonne volonté, il cherche le mythique "juste milieu". Ce personnage tend aussi à une certaine intégrité morale, tout en connaissant ses faiblesses. La noblesse de sa famille l'obsède. Elle peut faire de lui un être parfois méprisant, mais elle lui impose aussi de se montrer à la hauteur. Pour Lépide, Antoine n'est qu'un vulgaire parvenu. Quant à Octave (le futur Auguste), Lépide n'oublie jamais que son vrai père est un usurier de province. Autrement dit, Lépide n'est en rien un personnage idéal, mais un homme qui veut bien faire et possède un sens inné de la chose publique. C'est aussi, avant tout, un homme de modération. Si la République ne fonctionne plus, il estime qu'elle ne doit pas pour autant disparaître. Il va donc tenter de concilier Antoine et Octave qui, chacun à leur manière, représentent une facette de Rome qui se prépare, où le pouvoir ne va pas sans violence. Mon Lépide combine donc vanité et responsabilité. Il croit en la parole et, surtout, en l'intelligence. En quoi il est un homme du passé, que la violence va emporter. Car voilà un général dénué de goût pour la guerre et les armes....dont tous les succès reposent sur son art de la négociation. En corollaire, il revendique un certain goût pour l'ombre, parce qu'il a le sentiment fort de n'être que le maillon d'une chaîne. Au pouvoir politique, il finira par préférer la responsabilité de Grand Pontife. Ce qui facilitera son départ du pouvoir, qu'il abandonne peut-être davantage qu'Octave ne le lui prend. En tout cas, il ne veut et ne peut entrer sans peine dans une logique de confrontation avec ses adversaires. Cela finit par caractériser son rapport problématique avec le pouvoir qu'il exerce. Quand Octave le brave en venant haranguer ses propres légions, Lépide pourrait intervenir mais il ne se montre pas et refuse de faire couler le sang. Au lieu de cela, il sort du jeu. A la fin de leur entrevue, quand Octave se vante de lui avoir retiré le pouvoir, Lépide affirme : "Le pouvoir, Octave, c'est du vent!". Ce à quoi le futur empereur répond : "Le vent, Lépide, souffle où il veut".

- Il y a aussi le roman qui raconte comment Jérôme Walque écrit le récit qui met en scène Bénédicte Gardier?
- L'ambition de Jérôme Walque est d'abord et avant tout d'écrire un roman sur Lépide. Mais entretemps, il se voit obligé d'écrire ce roman louchant vers le bondage, pour dépanner Jérémie, son ami qui est lui aussi écrivain. Il écrit donc deux chapitres et croit qu'il pourra s'arrêter là et passer le témoin à Jérémie. Du coup, il ne s'investit pas dans ce texte, l'écrit presqu'en esthète curieux. Par douce vengeance, il met même le personnage de Bénédicte dans une situation inextricable. Mais voilà que de façon parfaitement inattendue, il est appelé à continuer la rédaction et doit trouver une issue au problème qu'il a lui-même créé. A tous les niveaux et sur tous les registres, la question de la responsabilité constitue un des enjeux du livre : celle du pouvoir pour Lépide et celle de l'écriture créatrice pour Jérôme. Le contraste se marque d'autant plus que Jérôme doit mener de front deux types d'écritures très différentes".